Xyrop - Mot-clé - MJ2024-02-29T08:30:42+00:00urn:md5:a569525ea7dae80655214b43ebf9d4d9Dotclear[Réflexion] Le droit d'auteur appliqué aux parties de JdR ?urn:md5:4008b14fc20c874b9cd1650f7db02a0d2018-12-31T17:30:00+01:002020-05-10T16:57:03+02:00Ludoxauteurcréationdroit d auteurMJpropriété intellectuelle<p>Où s'arrête la responsabilité de l'auteur, et où commence celle du meneur de jeu ?</p>
<p>D'une première réflexion sur cette organisation du partage de la création entre auteur et meneur de jeu, toute une problématique s'est rapidement manifestée quant à la notion de la partie de Jeu de rôle en tant que représentation d'une œuvre préexistante, ou bien en tant qu’œuvre éphémère de collaboration entre les divers participants.</p>
<p>Cette problématique soulève d'autres interrogations sur la manière dont le droit d'auteur peut appréhender l'objet "partie de Jeu de rôle", et les conséquences des différentes qualifications juridiques appliquées à une partie de Jeu de rôle.</p>
<p>Bref, un avertissement est de rigueur : ceci est un billet juridique assez trapu (que certains trouveront sans doute soporifique) basé sur l'état du droit (et du JdR) à la fin de l'année 2018, et qui ne sera probablement jamais mis à jour.</p> <p>La remarque que l'on entend habituellement sur le partage de création entre auteur et meneur de jeu est qu'une fois que l'auteur a publié son jeu, celui-ci ne lui appartient plus vraiment : le meneur de jeu et les joueurs vont s'approprier son univers et en faire quelque chose de différent.</p>
<p>Le jeu de rôle, comme l'a très bien fait remarquer Olivier Caïra dans "<em>Jouer avec l'Histoire</em>", est en effet basé sur plusieurs incertitudes croisées :</p>
<ul>
<li>chaque joueur ignore ce que l'auteur a écrit, ce que le MJ a préparé, ce que les autres joueurs ont ou vont imaginer ou faire, et ce que seront les résultats des dés ;</li>
</ul>
<ul>
<li>le meneur de jeu ignore ce que les joueurs ont ou vont imaginer ou faire, et ce que seront les résultats des dés.</li>
</ul>
<p>Sur cette base, l'auteur a réalisé une trame, posé des hypothèses, proposé des alternatives, mais c'est au cours de la partie et seulement celle-ci que ces incertitudes seront résolues et que la narration se déroulera comme elle doit se dérouler.</p>
<p>Cependant, cette question soulève d'autres questions plus délicates sur la nature du jeu de rôle, et notamment la nature de sa protection en tant qu’œuvre par le droit d'auteur (ici le droit d'auteur "à la française", mais compte tenu du nombre de pays signataires de la <a href="http://www.wipo.int/treaties/fr/ip/berne/">Convention de Berne</a>, le raisonnement peut être élargi et étendu à la plupart des pays signataires sans trop de risque d'erreur).</p>
<h2>Rappels juridiques sur le droit d'auteur</h2>
<p>Premier rappel, une œuvre est protégeable par le droit d'auteur dès lors qu'il s'agit de la <ins>matérialisation</ins> (écrite, orale, musicale, etc.) <ins>originale</ins> d'une idée de son auteur.
Cette protection par le droit d'auteur se produit instantanément, dès la matérialisation de l’œuvre, sans qu'il soit besoin de l'enregistrer ou de la déposer. En revanche, il faudra le cas échéant être en mesure de prouver cette matérialisation par tous moyens. Le mérite artistique n'entre pas en ligne de compte (ce qui explique l'existence des colonnes de Buren), pas plus que la destination de l’œuvre (décorer un supermarché ou être exposée dans un musée), ou bien son caractère durable ou éphémère.</p>
<p>En ce qui concerne l'originalité, il faut également se rappeler que les idées sont de libre parcours :<strong><ins>SPOILER</ins></strong> tant Anthony Horowitz que Joan K. Rowling ont eu l'idée d'un gamin maltraité dans sa famille, dont la tante finit par gonfler et s'envoler, découvrant une école étrange au nord de l'Angleterre, où on apprend la sorcellerie, où les tableaux bougent tous seuls, où les fantômes semblent se mouvoir librement, où l'un des professeurs est un loup-garou, et un autre est secrètement l'antagoniste du héros, et les élèves s'affrontent pour récupérer une coupe magique - mais <strong><ins>FIN DU SPOILER</ins></strong> la matérialisation pratique de leur idée commune sous la forme d'ouvrages littéraires est très différente, de sorte que l’œuvre de Joan K. Rowling est très certainement protégée par le droit d'auteur et ne pourra très probablement pas être considérée comme une reproduction servile sans autorisation (c'est-à-dire un plagiat) des (excellents) romans d'Anthony Horowitz.</p>
<p>C'est donc l'originalité de la matérialisation qui est prise en compte, et qui explique pourquoi on peut trouver sur le marché des jeux de rôle aux thématiques très proches comme <a href="http://www.legrog.org/jeux/predateurs/predateurs-fr" hreflang="fr">Prédateurs de Flamberge</a> et <a href="http://www.legrog.org/jeux/vampire-la-mascarade" hreflang="fr">Vampire de White Wolf</a> sans pour autant considérer que Mark Rein•Hagen s'est livré à un plagiat portant atteinte aux droits des auteurs et éditeur de Prédateurs.</p>
<p>Deuxième rappel, le Code de la propriété intellectuelle distingue entre droits patrimoniaux et droits moraux applicables à une œuvre, dès lors que celle-ci est protégeable.</p>
<p>Les <strong>droits patrimoniaux</strong> sont les droits de reproduction, représentation, modification, traduction, adaptation, arrangement, et exploitation (comprendre distribution). Ils sont qualifiés de patrimoniaux parce que leur exploitation par leur titulaire (l'auteur principalement, mais s'il les a cédés, cela peut-être l'éditeur) aboutit habituellement à un avantage lucratif. Ils sont librement cessibles par l'auteur, qui a toute latitude pour organiser leur cession ou concession, via l'établissement de contrats ou de licences d'usage.
Lorsqu'un auteur écrit un ouvrage pour un éditeur, il cède habituellement ses droits patrimoniaux à cet éditeur en échange d'une contrepartie financière déterminée par contrat. L'éditeur devient dès lors <ins>titulaire</ins> des droits patrimoniaux (mais l'auteur reste auteur et titulaire des droits moraux, voir ci-après) sur l’œuvre.</p>
<p>Les <strong>droits moraux</strong> sont le droit au nom et à la qualité d'auteur (le fait <ins>pour une personne physique</ins> de pouvoir dire qu'elle est auteur), le droit de divulgation (le droit de révéler son œuvre au public), le droit au respect de l'intégrité de l’œuvre (le droit de s'opposer à un acte d'exploitation de l’œuvre qui la dénaturerait, qui la détruirait ou qui attenterait d'une manière ou d'une autre au respect de l'auteur, de son honneur, de sa réputation ou de ses intentions en divulguant l’œuvre - par exemple à l'exploitation de l’œuvre à des fins pornographiques), et le droit de retrait de l’œuvre (sous réserve de dédommager des tiers qui pourraient être lésés, c'est le fait de pouvoir revenir sur sa décision de divulgation de l’œuvre). En France, ces droits moraux sont perpétuels, inaliénables et imprescriptibles (ça explique pourquoi les éditeurs titulaires des droits patrimoniaux sont encore souvent obligés de dire qui est l'auteur des JdR qu'ils publient).</p>
<p>Un livre de jeu de rôle, un scénario, un groupe de scénario écrits, qu'ils soient publiés professionnellement ou non, sont - dès lors qu'ils sont matérialisés et originaux - protégeables par le droit d'auteur et constituent des œuvres littéraires et artistiques. J'ouvre immédiatement une parenthèse pour soulever le fait que les mécaniques des règles (principes de jeu, procédures de lancers de dés, etc.) ne sont pas protégeables par le droit d'auteur, mais que leur matérialisation sous forme écrite l'est. C'est aussi ce qui permet la tendance "Old-school revival" et les ouvrages du genre OSRIC, dont la teneur est particulièrement similaire à celle des anciens ouvrages de Donjons & Dragons, mais dont aucun texte (i.e. la matérialisation des règles sous forme écrite) n'est repris à l'identique : il ne s'agit pas d'une reproduction servile, ni d'une œuvre dérivée, mais d’œuvres purement originales protégeables et protégées par le droit d'auteur malgré des mécaniques de jeu très similaires.</p>
<p>Ceci étant posé, d'autres notions seront probablement abordées dans le cadre de cet article, et il convient de les rappeler :
Une œuvre peut avoir plusieurs titulaires de droits et plusieurs auteurs, et être elle-même composée de plusieurs œuvres (qui peuvent elles-mêmes avoir plusieurs titulaires) :</p>
<ul>
<li>l’œuvre composée de plusieurs autres œuvres est une <strong>œuvre composite</strong>. L'article L. 113-2, alinéa 2 du Code de la propriété intellectuelle la définit comme "<em>l’œuvre nouvelle à laquelle est incorporée une œuvre préexistante sans la collaboration de l'auteur de cette dernière</em>". L'incorporation vise plutôt le cas où cette œuvre préexistante est intégrée totalement, et moins le cas où seules des parties préexistantes sont intégrées dans l’œuvre nouvelle (ce qui relèverait plutôt de la notion d'<strong>œuvre dérivée</strong> au sens de l'article L. 112-3 du Code de la propriété intellectuelle). Pour approfondir la question, voir CA Paris, 1e ch., 10 mars 1970, D. 1971, p. 114, note P. L., mais également CA Versailles, ch. réunies, 18 mars 1992, RIDA 4/1998, p. 278 où une œuvre est qualifiée à la fois de composite et de dérivée ;</li>
</ul>
<ul>
<li>l’<strong>œuvre de collaboration</strong> est une œuvre créée par plusieurs individus à la fois, faisant acte de co-création d'une manière habituellement concomitante (enfin plus ou moins), où chaque contribution de chaque auteur peut être identifiée - et attribuée précisément à chaque auteur. Les auteurs d'une œuvre de collaboration sont co-titulaires des droits sur celle-ci, et pour exercer des actes de disposition (par exemple une cession de droits patrimoniaux à un éditeur), la totalité des auteurs doit être unanimement en accord avec cette cession. Si l'un des auteurs n'est pas d'accord, sa contribution personnelle peut être retirée de l’œuvre avant cession des droits patrimoniaux afin de permettre aux autres auteurs de céder les leurs. Un livre de Jeu de rôle est souvent une œuvre de collaboration, qui s'occupant des illustrations, qui s'occupant du chapitre relatif aux maladies et aux poisons, qui travaillant sur la maquette visuelle, etc.</li>
</ul>
<ul>
<li>l’<strong>œuvre collective</strong> est une œuvre crée par plusieurs individus à la fois, faisant acte de co-création d'une manière habituellement concomitante, mais où les contributions respectives des auteurs ne peuvent plus être identifiées dans l’œuvre (sachant que les formes émergentes de travaux collaboratifs tendent à remettre en question cette définition, que le rédacteur de ces lignes considère plutôt comme une œuvre plurale dont les contributions respectives des coauteurs ne peuvent pas être retirées / extraites / supprimées). Dans cette situation, est habituellement titulaire des droits patrimoniaux sur l’œuvre collective la personne (souvent morale) au nom et à l'initiative de laquelle cette œuvre collective a été divulguée (exemples d’œuvres collectives : une sculpture d'argile réalisée à plusieurs mains, un slogan publicitaire élaboré par une agence de publicité).</li>
</ul>
<h3>Au voisinage du droit d'auteur</h3>
<p>Une autre notion sera abordée dans cet article, à savoir celle des <strong>droits voisins</strong> de ceux de l'auteur. Ces droits voisins sont les droits des artistes-interprètes, des producteurs de phonogrammes, vidéogrammes et bases de données. Nous parlerons surtout dans cet article des droits voisins des artistes-interprètes, qui jouissent de droits sur leur travail de représentation d'une œuvre préexistante.</p>
<p>Ces droits voisins de l'artiste-interprète sont également démembrables en droits :</p>
<ul>
<li><strong>patrimoniaux</strong>, correspondant au fait de pouvoir exploiter commercialement l'interprétation de l’œuvre ainsi que la fixation de celle-ci, et donc en tirer profit. Les exploitations secondaires de l'interprétation (par exemple par diffusion d'une captation d'image de celle-ci) donnent habituellement lieu à rémunération de l'interprète. Par ailleurs, le fait d'interpréter une œuvre équivaut techniquement à l'exercice du droit patrimonial de représentation dont l'auteur de l’œuvre est titulaire - et aboutit habituellement à ce que l'auteur soit rémunéré en contrepartie de cette concession non-exclusive de son droit de représentation à l'interprète qui exerce ce droit de représentation en interprétant cette œuvre.</li>
</ul>
<ul>
<li><strong>moraux</strong>, correspondant globalement au droit au nom et au respect de l'artiste, de sa qualité et de son interprétation.</li>
</ul>
<h2>Qualification juridique d'une partie de Jeu de rôle</h2>
<p>Reste la partie de JdR en elle-même : est-elle une œuvre ? Est-elle l'exercice d'un droit patrimonial lié à l’œuvre ? Est-elle plus que cela ?</p>
<p>Coralie David explique dans son article "<a href="https://journals.openedition.org/sdj/682">Le jeu de rôle sur table : une forme littéraire intercréative de la fiction ?</a>" que "<em>Le JdR est l’expérience collective et orale d’une création et d’une réception de la fiction par le langage</em>" : on ne saurait mieux définir le JdR comme activité créatrice d'une oeuvre orale, au même titre qu'une poésie qui aurait été inventée et déclamée spontanément par son auteur à un cercle d'auditeurs restreint.</p>
<p>Un livre de jeu de rôle (un livre de règles, un livre relatif à l'univers, etc.) et un recueil de scénarios de jeu de rôle sont faits pour être lus, mais ont essentiellement vocation à être joués. Le jeu de rôle se rapproche dans une certaine mesure du jeu de société proprement dit, façon "Monopoly", qui est également une œuvre littéraire et artistique protégeable et protégée par le droit d'auteur, par son support matérialisé.</p>
<p>Il en diffère cependant parce que ce support n'est nullement un prérequis obligatoire, et également du point de vue de la résultante de l'exécution du jeu :</p>
<ul>
<li>le résultat d'une partie de jeu de société en général est un bon moment d'amusement entre participants (du moins peut-on l'espérer) ;</li>
</ul>
<ul>
<li>le résultat d'une partie de jeu de rôle est, outre un bon moment d'amusement entre les participants, l'élaboration progressive et la matérialisation orale d'une narration, via l'interprétation de leurs personnages par les joueurs, sur la trame suggérée plus ou moins fortement par l'auteur. Bref, cela ressemble fortement à l'acte de formalisation de plusieurs idées créatives issues de l'esprit des joueurs.</li>
</ul>
<p>Afin d'aboutir à une qualification juridique, il semble utile d'établir un parallèle avec une pièce de théâtre, qui peut certes être lue, mais qui a vocation à donner lieu à une interprétation vivante et éphémère par les comédiens, sous la direction artistique d'un metteur en scène, qui est l'exercice du droit patrimonial de représentation de la pièce de théâtre.</p>
<p>La représentation est définie par l'article L122-2 du Code de la propriété intellectuelle de la manière suivante : "<em>La représentation consiste dans la communication de l’œuvre au public par un procédé quelconque, et notamment : 1° Par récitation publique, exécution lyrique, représentation dramatique, présentation publique, projection publique et transmission dans un lieu public de l’œuvre télédiffusée</em> <a href="https://blog.xyrop.com/post/2018/12/31/..." title="...">...</a>"</p>
<p>Transposée au JdR, la "représentation" d'un livre et/ou d'un scénario de jeu de rôle est la partie elle-même, au cours de laquelle l’œuvre préexistante qu'est le scénario se voit interprétée, réinterprétée, voire fortement altérée par les différents participants autour de la table de jeu.</p>
<p>Le public de cette représentation est constitué :</p>
<ul>
<li>au minimum des différents participants, chaque joueur étant public du MJ et des autres joueurs, le MJ étant également public des improvisations et initiatives des joueurs ;</li>
</ul>
<ul>
<li>des éventuels spectateurs présents autour de la table dans le cadre d'une partie se déroulant dans un lieu public, la narration partagée crée au cours de la partie n'étant pas intelligible seulement par les participants mais également par les tiers présents ;</li>
</ul>
<ul>
<li>d'éventuels spectateurs de la télédiffusion d'une partie filmée.</li>
</ul>
<p>La partie de jeu de rôle proprement dite pourrait donc recevoir les qualifications juridiques suivantes :</p>
<blockquote><p><strong>1.</strong> si la partie se base sur un jeu ou un scénario préexistant, la représentation d'une œuvre préexistante (l'ouvrage conçu par l'auteur de JdR) par exercice du droit patrimonial de représentation, faisant naître une œuvre dérivée ainsi que des droits voisins d'artistes-interprètes au profit des participants ;</p></blockquote>
<blockquote><p><strong>2.</strong> une nouvelle œuvre qui pourrait (1) être basée sur la mise en scène partagée (résultant principalement de l'activité créatrice du meneur de jeu mais également, dans une certaine part, de l'activité des autres participants) de l’œuvre préexistante, (2) ou bien être également constituée de la performance d'artiste créative, éphémère et unique de ses participants, comparable à la fiction créée de manière spontanée et immédiate dans le théâtre d'improvisation (surtout lorsque la narration sort du cadre prévu par le scénario), (3) tout en incorporant potentiellement des parties d’une œuvre préexistante protégées par le droit d'auteur, donc constituant une œuvre dérivée.</p></blockquote>
<p>Analysons plus en détail chacune de ces qualifications possibles.</p>
<h2>Conséquences de la qualification de la partie de JdR comme exercice du droit de représentation</h2>
<h3>L'autorisation des auteurs et titulaires de droits</h3>
<p>L'article L. 122-4 du Code de la Propriété Intellectuelle dispose que "<em>toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle de l’œuvre faite sans le consentement de l'auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause est illicite. Il en est de même pour la traduction, l'adaptation ou la transformation, l'arrangement ou la reproduction par un art ou un procédé quelconque.</em>"</p>
<p>Si en effet la partie de JdR est l'exercice du droit de représentation d'une œuvre antérieure préexistante, alors il est en principe nécessaire que les participants d'une table de JdR se préparant à jouer le scénario antérieurement divulgué disposent de l'autorisation du titulaire des droits patrimoniaux sur ledit scénario.</p>
<p>Toutefois, l'article L. 122-5 du Code précité pose une exception à ce principe : "<em>Lorsque l’œuvre a été divulguée, l'auteur ne peut interdire : 1° Les représentations privées et gratuites effectuées exclusivement dans un cercle de famille ;</em>"</p>
<p>Cette qualification permet donc encore à un groupe d'amis proches (ou à une famille) de se réunir autour d'une table de jeu et de faire ensemble une partie de JdR.</p>
<p>La notion de cercle de famille est essentiellement jurisprudentielle, notamment appliquée aux différentes décisions sur l'exception de copie privée des vidéogrammes (mais bien entendu extensible au cas de l'interprétation <em>in vivo</em> d'une œuvre théâtrale), et interprétée très restrictivement par les tribunaux comme n'incluant que les personnes parentes ou amies très proches, unies de façon habituelle par des liens familiaux ou d’intimité.</p>
<p>Selon cette acception, les parties de JdR du dimanche entre amis à la maison sont sauvées : elles ne requièrent pas d'autorisation préalable des auteurs du JdR et scénario. Ouf !</p>
<p>Mais qu'en est-il du cas des parties réalisées en clubs ? Des démonstrations dans les manifestations publiques ? Des vidéos et podcasts de parties se multipliant dorénavant sur les plates-formes de <em>streaming</em> ?</p>
<p>Par définition, les clubs de JdR réunissent des personnes liées par une communauté d'intérêts. Les membres de clubs de JdR ne sont pas des personnes parentes ou des amis très proches unis de façon habituelle par des liens familiaux ou d’intimité - même si de tels liens d'amitié et d'intimité peuvent fréquemment peut naître autour de la table de JdR. En outre, les clubs réclament souvent une cotisation, participation ou adhésion à une association, ce qui vient contredire le critère de gratuité - même si les parties elles-mêmes ne sont pas payantes de manière individuelle.</p>
<p>Les parties de démonstration dans les manifestations ouvertes au public (telles que les conventions) sont par nature... publiques, ce qui est nécessairement exclusif d'une représentation dans un cadre privé. En outre, ces manifestations font souvent payer un droit d'entrée, ce qui introduit une notion d'exploitation économique de la représentation exclusive d'un cadre familial ou amical.</p>
<p>Par conséquent, ces parties en club et ces démonstrations dans le cadre de manifestations ouvertes au grand public <ins>ne relèvent pas</ins> de l'exception de représentation privée et gratuite dans le cercle de la famille.</p>
<p>Les vidéos filmées de parties de JdR correspondent très exactement à l'exercice du droit de représentation par <em>communication de l’œuvre au public</em> <a href="https://blog.xyrop.com/post/2018/12/31/..." title="...">...</a> <em> 2° Par télédiffusion. La télédiffusion s'entend de la diffusion par tout procédé de télécommunication de sons, d'images, de documents, de données et de messages de toute nature.</em> (article L. 122-2 du Code de la propriété intellectuelle).</p>
<p>Les télédiffusions de ces parties sur les plates-formes de <em>streaming</em> se fait à destination du public, et génèrent également une rémunération par les gestionnaires de plates-formes - ce qui exclut également ici qu'il s'agisse d'une représentation privée et gratuite dans le cercle de la famille.</p>
<p>Or, selon l'article L. 131-2, alinéa 1 du Code de la propriété intellectuelle, "<em>les contrats de représentation, d'édition et de production audiovisuelle (...) doivent être constatés par écrit. Il en est de même des autorisations gratuites d'exécution.</em>"</p>
<p>Cela signifie que, conformément aux règles du droit d'auteur, les parties de JdR en club, en convention, ou diffusées sur des plates-formes de <em>streaming</em>, dès lors qu'on pourrait les qualifier d'exercice du droit de représentation d'une ou plusieurs œuvres préexistantes, requièrent normalement un accord des auteurs des œuvres préexistantes, accord qui doit nécessairement intervenir par écrit <em>ad validitatem</em> (c'est-à-dire que l'écrit est une condition nécessaire mais pas suffisante de la validité de cet accord).</p>
<p>Peu d'auteurs de JdR et/ou de scénarios pensent à accorder une telle autorisation écrite.</p>
<p>La <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Licence_ludique_libre" hreflang="fr">licence ludique libre</a> <a href="http://www.opengamingfoundation.org/ogl.html" hreflang="en">Open Gaming License 0.1a</a> constitue une exception notable, car elle prévoit une autorisation générale de "distribution" pour tout bénéficiaire de contenu sous ladite licence, la définition de la distribution dans le cadre de cette licence recouvrant des actes relevant de l'exercice du droit de représentation selon l'article L. 122-2 précité, assortie néanmoins de conditions telles que le fait de faire figurer les notices correctes d'attribution des auteurs et titulaires des droits des œuvres préexistantes, et de conserver la même licence.</p>
<p>Pour autant, cette licence OGL 0.1a a été conçue d'abord pour régir les œuvres écrites directement dérivées des œuvres préexistantes sous cette licence, ce qui explique son caractère inadapté à de telles situations : peut-on raisonnablement attendre d'un MJ qui maîtrise une partie filmée ou une partie en convention d'ouvrir soudainement une parenthèse pour définir dans sa description ce qui relève de la licence ludique libre et ce qui relève de l'identité du produit ("<em>product identity</em>", qui est exploitable en conjonction avec le contenu ouvert donc peut être représenté par le MJ, mais non soumis aux termes de la licence libre) selon la licence OGL 0.1a ?</p>
<h3>La naissance de droits voisins pour les participants</h3>
<p>Autre conséquence de la qualification de la partie de JdR comme exercice du droit de représentation : elle fait naître des droits voisins d'artistes-interprètes au profit des participants, puisque ceux-ci sont les interprètes des personnages s'intégrant dans la narration résultant de la représentation vivante de l’œuvre écrite préexistante.</p>
<p>Cette qualification des joueurs participants comme artistes-interprètes est encore renforcée par le recours éventuels à des personnages pré-tirés conçus par l'auteur du JdR et/ou du scénario, puisque l'apport créatif des joueurs participants est conditionné par les aspects, caractéristiques et description de leur personnage d'ores et déjà défini par l'auteur.</p>
<p>Selon cette acception, les joueurs participants disposeraient donc de droits patrimoniaux dits "voisins" sur leur interprétation de leur personnage, d'une durée de 50 ans "<em>à compter du 1er janvier de l'année civile suivant celle de l'interprétation</em>" ou, si "<em>durant cette période, une fixation de l'interprétation dans un vidéogramme ou un phonogramme fait l'objet <a href="https://blog.xyrop.com/post/2018/12/31/..." title="...">...</a> d'une communication au public</em>", la durée est de 50 ans après ces faits pour un vidéogramme, et 70 ans après ces faits pour un phonogramme (article L.211-4 du Code de la propriété intellectuelle).</p>
<p>La reconnaissance de tels droits voisins pour les participants d'une partie de JdR ouvrirait alors la possibilité pour ces "joueurs-artistes-interprètes" de faire valoir un droit à une rémunération auprès des exploitants (plates-formes de <em>streaming</em> & <em>podcasts</em>) des vidéogrammes et phonogrammes ayant capturé l'interprétation de leur personnage (bien entendu hors des <a href="https://www.legifrance.gouv.fr/affichCodeArticle.do;?idArticle=LEGIARTI000032859751&cidTexte=LEGITEXT000006069414&dateTexte=20181230" hreflang="fr">cas d'exclusion L. 211-3 du Code</a> dont l'énumération serait ici fastidieuse).</p>
<h2>Conséquences de la qualification de la partie de JdR comme œuvre nouvelle</h2>
<h3>La mise en scène partagée de l’œuvre préexistante</h3>
<p>La représentation fait naître, sur la représentation spécifique de l’œuvre, des droits d'auteur au profit du metteur en scène ainsi que des droits voisins des artistes-interprètes au profit des comédiens.</p>
<p><a href="https://www.legifrance.gouv.fr/affichIDCCArticle.do;jsessionid=25C7366AAE431AD58450D5CA0DB71276.tpdila17v_1?cidTexte=KALITEXT000034449382&idArticle=KALIARTI000034449385&dateTexte=20170420&categorieLien=cid">L'avenant du 10 novembre 2016 relatif aux dispositions du titre VI « Metteur en scène de théâtre » de l'annexe I de la convention collective nationale des entreprises du secteur privé du spectacle vivant du 3 février 2012</a> présente de manière très claire l'origine de son droit d'auteur (qui n'est pas un droit voisin) pour le metteur en scène :</p>
<blockquote><p><em>Le metteur en scène de théâtre est celui qui, par son art personnel et sa créativité, apporte à l'œuvre écrite par l'auteur, une vie scénique qui en fait ressortir les qualités sans jamais en trahir l'esprit, son rôle s'inscrivant sur deux plans distincts :</em></p>
<p>
<em>- celui de la création intellectuelle correspondant à sa conception artistique de la mise en scène et qui lui confère les droits de propriété littéraire et artistique en sa qualité d'auteur de la mise en scène ;</em></p>
<p>
<em>- celui de l'exécution matérielle de cette conception dans le cadre de laquelle il exerce sous l'autorité du producteur et dans le strict respect du droit des autres auteurs, et particulièrement celui de l'auteur de l'œuvre initiale écrite ou composée, le choix des artistes et de tous les intervenants créatifs artistiques et techniques dont il prépare, coordonne et dirige le travail.</em></p></blockquote>
<p>Via l'interprétation des PNJ, via les décisions sur l'enchaînement des situations, via ce qu'il apporte en termes d'ambiance, le MJ ressemble fortement à un metteur en scène : il décide du jeu d'acteur requis pour l'interprétation des PNJ, il décide de l'ambiance lumineuse, des décorations de la table, de l'<a href="https://blog.xyrop.com/post/Illustration-musicale-en-JdR">illustration musicale</a> et des illustrations picturales de la partie - en s'aidant le cas échéant des indications de l'auteur, mais avec néanmoins une très grande liberté dans cette mise en scène.</p>
<p>Il faut rappeler néanmoins que cette distinction entre le droit d'auteur du metteur en scène et le droit voisin de l'artiste-interprète devient assez floue si on tente de qualifier les activités des joueurs participant à une partie de Jeu de rôle.</p>
<p>En effet, ceux-ci ne suivent pas aveuglément un script déjà totalement écrit (pour autant qu'ils le suivent !), ni des indications particulières du MJ/metteur en scène.</p>
<p>Via l'interprétation de son personnage, sur laquelle il a un contrôle presque absolu, chaque joueur a un impact potentiellement très fort sur le résultat final de la performance qu'est la partie de JdR, et peut ainsi grandement altérer la trame initialement imaginée par l'auteur.</p>
<p>Chaque participant est donc à la fois comédien et un peu metteur en scène, en plus d'être public actif où "<em>la fiction est assimilée alors même qu’elle est créée, le phénomène de réception </em><a href="https://blog.xyrop.com/post/2018/12/31/venant" title="venant">venant</a><em> nourrir celui de la création.</em>" (<a href="https://journals.openedition.org/sdj/682">Coralie David, Le jeu de rôle sur table : une forme littéraire intercréative de la fiction ?</a>)</p>
<p>La mise en scène nouvelle est donc une œuvre de collaboration, "<em>propriété commune des coauteurs</em>" qui "<em>doivent exercer leurs droits d'un commun accord</em>" selon l'article L. 113-4 du Code de la propriété intellectuelle, et qui résulte des activités créatrices de mise en scène combinées du meneur de jeu et des joueurs.</p>
<h3>Une performance d'artiste</h3>
<p>Cependant, un autre parallèle est également envisageable : la partie de JdR a pour objet la création d'une narration éphémère, qui n'a pas vocation à être rejouée plusieurs fois par les mêmes participants avec les mêmes personnages.
Les joueurs apportent en outre une spontanéité dans leurs réactions, prises de décision, dialogues, et orientations de la trame.
Enfin, les <a href="https://blog.xyrop.com/post/%5BTactique-de-ma%C3%AEtrise%5D-Alea-incertitude-information-jet2de">lancers de dés apportent réellement une incertitude</a> quant au déroulement effectif de l'intrigue, obligeant la totalité des participants à improviser les événements conséquence de ces aléas.</p>
<p>Dans ces conditions, la partie de JdR se rapproche considérablement des performances d'artistes créatives qui sont par nature toujours uniques et éphémères (bien qu'elles puissent faire l'objet d'une captation via un vidéogramme et d'une rediffusion) de manière comparable à la fiction créée de manière spontanée et immédiate dans le théâtre d'improvisation (surtout lorsque la narration sort du cadre prévu par le scénario).</p>
<p>Ces performances d'artistes sont des œuvres par elles-mêmes, résultant de la combinaison des apports créatifs et talents des différents participants.</p>
<p>Une partie de JdR pourrait dès lors être qualifiée de performance collective d'artistes, donc d’œuvre plurale. Il resterait à trancher la nature de l’œuvre qu'est cette performance pour connaître le titulaire des droits sur celle-ci.</p>
<p>En effet, la partie de JdR comme performance ressemble à une œuvre de collaboration dans la mesure où chaque contribution de chaque participant peut être identifiée et attribuée précisément à chaque auteur ( "<em>moi, j'ai dit ça, toi, tu as fait ça</em>").</p>
<p>Cependant, si la partie de JdR est une œuvre de collaboration, en cas de désaccord d'un des participants avec tous les autres quant à l'exercice des droits patrimoniaux sur la partie , il n'est pas possible de résoudre ce désaccord via la suppression de l'apport créatif de ce participant en raison de la nature même d’œuvre éphémère qu'est la partie de JdR.</p>
<p>C'est la raison pour laquelle il semble que la qualification d’œuvre collective soit plus appropriée pour une partie de JdR, les contributions respectives des co-auteurs pouvant certes être distinguées, mais ne pouvant plus être retirées de l’œuvre sans qu'elle cesse d'être l’œuvre ni la dénaturer.</p>
<p>Selon cette qualification, la personne au nom et à l'initiative de laquelle cette œuvre collective qu'est la partie de JdR a été divulguée est titulaire des droits patrimoniaux et peut seule décider des modalités d'exploitation de l’œuvre.</p>
<h3>Une œuvre composite</h3>
<p>En pratique, la partie de JdR, lorsqu'elle n'est pas totalement improvisée par le MJ, ni mise en œuvre la base d'une trame qu'il a lui-même rédigée, mais basée sur une œuvre tierce préexistante, vient nécessairement incorporer des parties de cette œuvre préexistante, sans intervention du titulaire des droits de l'auteur de l’œuvre préexistante. Il s'agit donc d'une œuvre composite au sens de l'article L 113-2 alinéa 2 du Code de la propriété intellectuelle : "<em>Est dite composite l’œuvre nouvelle à laquelle est incorporée une œuvre préexistante sans la collaboration de l'auteur de cette dernière.</em>"</p>
<p>Mettons immédiatement de côté le cas où la partie de JdR consiste par exemple à jouer l'exploration de la planète LV-426, ce qui motive le MJ à intégrer, à titre d'illustration musicale, des morceaux préexistants de l'album des bandes originales d'Alien de Jerry Goldsmith ou Aliens de James Horner.</p>
<p>Ici, le cas étudié est bien la partie de JdR en tant que création d'une narration commune et d'une interprétation de personnages, dérivées d'une trame, de personnage non-joueurs déjà décrits et d'indications rassemblés dans un livre de JdR et un scénario conçus exprès pour permettre le déroulement d'une ou plusieurs parties de JdR.</p>
<p>La première phrase de l'article L. 112-3 alinéa 1 du Code de la propriété intellectuelle dispose : "<em>Les auteurs de traductions, d'adaptations, transformations ou arrangements des œuvres de l'esprit jouissent de la protection instituée par le présent code sans préjudice des droits de l'auteur de l’œuvre originale.</em>" Également, "<em>L’œuvre composite est la propriété de l'auteur qui l'a réalisée, sous réserve des droits de l'auteur de l’œuvre préexistante.</em>" (article L. 113-4 du CPI).</p>
<p>Ce n'est donc pas parce que la création qu'est la partie de JdR pourrait être une œuvre dérivée qu'elle est pour autant dépourvue de la protection du droit d'auteur. En revanche, cette création <strong>ne doit pas se faire au préjudice des droits de l'auteur de l’œuvre originale</strong> : l'autorisation de l'auteur de l’œuvre originale est nécessaire pour créer une œuvre dérivée.</p>
<p>Évidemment, cette autorisation est implicite quand un auteur fixe ses considérations dans un ouvrage de JdR, avec l'espoir que celui-ci soit lu et joué.</p>
<p>Toutefois, comme rappelé <em>supra</em>, "<em>les contrats de représentation, d'édition et de production audiovisuelle définis au présent titre doivent être constatés par écrit. Il en est de même des autorisations gratuites d'exécution</em>" (Article L 131-2 du CPI alinéa 1) et "<em>les contrats par lesquels sont transmis des droits d'auteur doivent être constatés par écrit</em>" (Article L 131-2 du CPI alinéa 2).</p>
<p>Par conséquent, si la partie de JdR est qualifiée d’œuvre composite dérivée de l’œuvre préexistante qu'est l'ouvrage de JdR (livre de JdR ou scénario), alors son exploitation au-delà du cercle de famille de l'article L. 122-5 du CPI requiert l'accord écrit de l'auteur de l’œuvre préexistante, accord qui ne peut pas être présumé.</p>
<p>La sanction de cette absence d'autorisation, évoquée <em>supra</em>, est plutôt rude : "<em>Toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle faite sans le consentement de l'auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause est illicite. Il en est de même pour la traduction, l'adaptation ou la transformation, l'arrangement ou la reproduction par un art ou un procédé quelconque</em>" (Article L. 122-4 du Code de la propriété intellectuelle).</p>
<p>Autrement dit, si cette qualification est retenue, l'autorisation écrite expresse du titulaire des droits de l'auteur sur un ouvrage de JdR particulier est indispensable pour toute divulgation au public de l’œuvre composite qu'est la partie de JdR correspondant à l'adaptation vivante de l’œuvre préexistante, que cette divulgation soit faite dans le cadre d'une manifestation publique (convention, démonstration, ou autre) ou bien par la diffusion d'un vidéogramme ou phonogramme via une plate-forme de <em>streaming</em>.</p>
<p>Passer outre une telle absence d'autorisation constitue une prise de risque car l'exercice d'un droit de l'auteur sans en être titulaire ni disposer de son autorisation est une contrefaçon, et la contrefaçon est un délit (articles L.335 et suivants du Code de la propriété intellectuelle).</p>
<p>Il est important de garder à l'esprit que, comme rappelé <em>supra</em>, les licences ludiques libres et certaines licences Creative Commons constituent de telles autorisations écrites préalables - rendant ainsi licites les éventuelles parties de JdR, œuvres composites dérivées de ces ouvrages préalables.</p>
<h2>La partie de JdR et le respect des droits moraux de l'auteur</h2>
<p>De plus en plus souvent, les auteurs de JdR formulent des notes d'intention, des remarques à l'égard des lecteurs, des explications sur la manière dont la partie devrait se dérouler, sur l'ambiance qui devrait émerger au cours de la partie.</p>
<p>Certains s'autorisent à insister, par exemple, sur le fait que leur jeu est sérieux et que, si les personnages-joueurs ont des pouvoirs, les parties ne doivent pas tourner à une foire d'empoigne façon comic-books des années 50, mais à des situations dramatiques pleines de pathos.</p>
<p>Plus prosaïquement, des auteurs donnent aussi des indications sur la manière dont certains PNJ devraient être interprétés par le MJ, leurs maniérismes, leur accent, etc.</p>
<p>Bref, certains auteurs de JdR indiquent ce qui, selon eux, est <ins>une</ins>, voire <ins><strong>la</strong></ins> "bonne manière de jouer" à leur jeu.</p>
<p>Dans un jeu comme le Monopoly, cela ne poserait évidemment aucune difficulté : il s'agirait alors d'un rappel de la règle qui aboutit à un amusement optimisé selon l'auteur.</p>
<p>Mais comme évoqué plus haut, le Jeu de Rôle n'est pas qu'un jeu de société façon Monopoly. C'est un jeu dans lequel les participants vont fournir un apport créatif original pour faire naître une nouvelle interprétation de l’œuvre préexistante (l'ouvrage de JdR de l'auteur) et une œuvre composite reprenant des parties de l'ouvrage de JdR d'origine.</p>
<p>Ainsi, en posant des indications sur une "bonne manière de jouer" à l'intérieur de son ouvrage, l'auteur de JdR fixe tout simplement des conditions pour l'exercice du droit de représentation de l’œuvre, et donc, par extension, vient limiter :</p>
<ul>
<li>les possibilités de mise en scène de son jeu ou de son scénario par les participants à la partie - exactement de la même manière que des didascalies pour les pièces de théâtre, qui font partie intégrante de la manière dont son œuvre <strong>doit</strong> être mise en scène selon le dramaturge.</li>
</ul>
<ul>
<li>le champ des possibles des œuvres composites pouvant résulter de l'adaptation et de la transformation de son œuvre originelle en une œuvre dérivée (hors le cas particulier de la parodie).</li>
</ul>
<p>L'article L. 121-1 du Code de la propriété intellectuelle dispose : "<em> L'auteur jouit du droit au respect de son nom, de sa qualité et de son œuvre</em>".</p>
<p>Dès lors que l'auteur a écrit quelle était, selon lui, "la bonne manière" de jouer à son JdR, il pourrait arguer que la divulgation au public (par démonstration dans une convention ou par télédiffusion) d'une représentation de son œuvre (ou d'une œuvre composite) qui ne respecterait pas cette "bonne manière de jouer" constitue une <strong>dénaturation</strong> de son œuvre originelle, et donc une atteinte à son droit moral.</p>
<h2>Conclusions</h2>
<h3>Conclusion pour les éditeurs de JdR</h3>
<p>Peut-on imaginer qu'un éditeur de JdR ou qu'un auteur prétende réguler, sur l'un ou l'autre des fondements évoqués <em>supra</em>, des parties de démonstration en convention ou bien des diffusions de parties filmées ?</p>
<p>Cela ne semble pas inconcevable, car il est dans l'intérêt des éditeurs de réguler la communication autour de leurs créations ludiques.
Un éditeur pourrait ainsi vouloir éviter qu'une partie filmée donne un exemple contraire à l'image que l'éditeur veut donner de son jeu, ou qu'un MJ fasse jouer en convention un scénario qui révèle des secrets essentiels de l'univers de jeu (ce qui risquerait de faire baisser l'appétence des acheteurs potentiels pour le livre d'univers contenant ces secrets).</p>
<p>La qualification de la partie de JdR par le droit d'auteur permet un tel contrôle <em>a priori</em> de la divulgation hors du cercle de famille des éléments importants de l’œuvre originelle via les représentations et œuvres dérivées, en obligeant les divulgateurs potentiels de la représentation ou de l’œuvre composite à obtenir une autorisation préalable.</p>
<p>Cependant, à n'en pas douter, l'encadrement strict de cette pratique aboutirait sans doute à un déficit d'image considérable pour l'éditeur concerné : le marché du JdR est un marché de niche dont les pratiquants ne sont pas assez nombreux.</p>
<p>Dès lors, seuls de très gros éditeurs comme Hasbro par exemple pourraient se permettre ce type d'intervention, en refusant par exemple son agrément à la diffusion de parties de Donjons & Dragons 5e édition abordant des thématiques sexuelles fortes, ou en refusant son autorisation à des scénarios de démonstration autres que ceux spécifiquement prévus par cet éditeur, ou encore en exigeant un niveau de qualité / d'expérience / charisme minimal pour le MJ.</p>
<h3>Conclusion pour les participants des parties de JdR divulguées au public</h3>
<p>Les différentes qualifications juridiques possibles d'une partie de JdR aboutissent au constat que des droits d'auteur (de nature tant morale que patrimoniale) et/ou des droits voisins naissent presque inévitablement au profit de ses participants dès la première matérialisation d'un apport créatif de leur part.</p>
<p>Corollaire de cette naissance de droits, la faculté de revendiquer le bénéfice de leur exploitation : il n'est pas inenvisageable pour un joueur d'une partie filmée d'exiger, selon la qualification juridique retenue, que la diffusion de cette partie respecte son droit voisin d'artiste-interprète, respecte l'exercice de son droit moral d'auteur (droit à voir son nom apposé sur le vidéogramme), voire, si ce ne s'agit pas d'une œuvre collective, que le vidéogramme ne soit pas du tout divulgué à moins qu'il ne lui soit versé une part de rémunération proportionnelle à son apport créatif sur la base des bénéfices d'exploitation du vidéogramme.</p>
<p>Sur la base de ces constats, la démarche qui semble émerger d'elle-même consiste, pour les organisateurs de parties filmées ou de parties de démonstration publiques, à prévoir une contractualisation (qui n'a pas besoin d'être très longue ni complexe et qui peut pour les parties filmées s'inscrire dans le cadre de la gestion du droit à l'image) entre les différents participants afin d'articuler les différents droits d'auteur et droits voisins qui naîtront dans le cadre de la partie.</p>
<p>On peut ainsi imaginer que les participants s'accordent pour céder, de manière exclusive ou non, leurs droits au MJ, à l'un des participants, ou à une association tierce dès avant la partie, afin que ce cessionnaire puisse se trouver seul titulaire des droits et en charge de leur exploitation (bien entendu en faisant attention de ne pas tomber dans le cas de l'article L. 131-1 du Code de la propriété intellectuelle, qui dispose que "<em>La cession globale des œuvres futures est nulle</em>").</p>
<p>Évidemment, de nouvelles questions émergent : Comment rédiger de tels accords ? Est-ce que les licences Creative Commons ou de Youtube peuvent s'appliquer valablement à des parties filmées basées sur des contenus eux-mêmes sous licence ludique libre OGL 0.1a ? Faudrait-il prévoir une licence dans tous les ouvrages de JdR ? Qu'y faire figurer ?</p>
<p>Ces nouvelles questions dépassent très largement l'objet du présent article, qui n'est après tout qu'une réflexion juridique sur les qualifications juridiques possibles d'une partie de JdR.</p>
<p>Dans l'hypothèse où vous m'auriez lu jusqu'au bout je me permets de vous adresser mes félicitations pour avoir supporté une telle quantité de prose amphigourique et assommante.</p>
<p>MISE À JOUR : <a href="https://blog.xyrop.com/index.php/post/2019/01/09/%5BR%C3%A9flexion%5D-Droit-d-auteur-non-applicable-JdR">Et si aucune qualification juridique ne peut être retenue, que se passe-t-il ? C'est l'objet de ce nouveau billet</a>.</p>https://blog.xyrop.com/post/2018/12/31/%5BR%C3%A9flexion%5D-Droit-d-auteur-JdR#comment-formhttps://blog.xyrop.com/feed/atom/comments/59[D1000 et D100] Ateliers-conférences les 2 et 3 novembre 2018urn:md5:252fa362abc02a0f7247350fa48cde4e2018-10-29T15:46:00+01:002018-10-29T15:51:26+01:00LudoxAtelierJeu de rôlemener une partieMJÉvénement <p>Les 2 et 3 novembre 2018, deux ateliers-conférences se tiendront au Pavillon
des Canaux, 39 quai de la Loire, 75019 Paris, France. Le samedi 3 novembre, ces
ateliers seront suivis de parties de démonstration de JdR sur une thématique
horrifique : c'est halloween, c'est normal.</p>
<h2>Atelier : Mener une course poursuite - 02 Novembre 2018, de 19 à 20
heures</h2>
<p>De nombreux jeux de rôles tentent d’émuler des scènes tirées d’autres média
narratifs comme par exemple les films de cinéma et surtout les films d’action.
Passage quasiment obligé de ce type d’histoire, la scène de poursuite, où les
protagonistes prennent en chasse un antagoniste, ou au contraire sont eux-mêmes
pourchassés. Or, très souvent, les meneurs de jeu (et les réalisateurs de films
!) échouent à créer une scène de poursuite captivante. Cet atelier décortique
la mécanique de ces scènes et vous propose en séance de créer vous-même votre
propre scène de poursuite, la plus palpitante que vous ayez jamais
imaginée !</p>
<p><strong>Inscriptions gratuites mais indispensables sur Eventbrite :</strong>
<a href="https://blog.xyrop.com/post/2018/10/29/bit.ly/2E6QHeP">bit.ly/2E6QHeP</a></p>
<h2>Conférence : Tuer les personnages-joueurs - 03 Novembre 2018, de 15
heures à 16 heures 30</h2>
<p>On dit souvent qu’il n’y a pas de gagnants dans une partie de JdR, mais
seulement des survivants. Est-ce à dire que les joueurs dont les personnages
sont morts ont échoué ? La mort des PJ doit-elle être vraiment la fin de
la partie, voire celle de la campagne ? Et si les PJ ne risquent rien,
comment leur faire ressentir l’importance de ce qu’ils vivent ? Cet
atelier d’1h30 vous donnera des astuces pour gérer le risque de mort des PJ
ainsi que sa survenance. Après cela, il sera temps d’en finir définitivement
avec le sentiment d’impunité de ces PJ irresponsables !</p>
<p><strong>Inscriptions gratuites mais indispensables sur Eventbrite :</strong>
<a href="https://blog.xyrop.com/post/2018/10/29/bit.ly/2IMB7Um">bit.ly/2IMB7Um</a></p>
<h2>Parties de jeu de rôle - samedi 03 novembre de 17 à 18 heures et de 18 à 19
heures</h2>
<p>Avec les jeux suivants : Friday Night Zombi, Sombre, Pathfinder,
Donjons & Dragons.</p>
<p><strong>Inscriptions gratuites mais indispensables sur Eventbrite :</strong>
<a href="https://blog.xyrop.com/post/2018/10/29/bit.ly/2CzmT9p">bit.ly/2CzmT9p</a></p>
<p><strong>Événement organisé avec le soutien inconditionnel et la logistique
brillante de D1000 et D100, et du Pavillon des Canaux. Allez leur dire merci
!</strong></p>
<p><a href="http://d1000etd100.com/">http://d1000etd100.com/</a></p>
<p><a href="http://www.pavillondescanaux.com/">http://www.pavillondescanaux.com/</a></p>
<p><a href="http://www.pavillondescanaux.com/conference-sur-les-jeux-de-role-jeux-de-roles/">
http://www.pavillondescanaux.com/conference-sur-les-jeux-de-role-jeux-de-roles/</a></p>https://blog.xyrop.com/post/2018/10/29/%5BD1000-et-D100%5D-Ateliers-conf%C3%A9rences-les-2-et-3-novembre-2018#comment-formhttps://blog.xyrop.com/feed/atom/comments/6[Tactique de maîtrise] Aléa, incertitude et rétention d'informations : usages du lancer de dés en JdRurn:md5:6ab6130d8054714048e2740d4cc9a94e2018-09-12T12:28:00+02:002020-05-10T16:58:25+02:00LudoxaléaconseilsdésMJPratiquetactique de maîtriseTactique de maîtrise<p>La plupart des jeux de rôle sur table présentent l'usage des dés de la manière suivante :</p>
<ul>
<li>une action impossible échoue toujours ;</li>
<li>une action inratable réussit toujours ;</li>
<li>quand on ne sait pas si l'action est impossible ou inratable, on lance les dés.</li>
</ul>
<p>Le lancer les dés a cependant d'autres usages et impacts, et ce billet a pour objet de poser mes propres réflexions - peut-être bien vaines et sans fondement - sur le sujet.</p> <p>Avant d'aller plus loin, précisons quand même une chose : le terme "dé" dans cet article peut désigner tout objet dont l'utilisation génère un résultat aléatoire.
Les expressions "lancer de dés" ou "jet de dés" dans cet article peuvent donc être comprises comme toute opération technique destinée à obtenir un résultat aléatoire qui alimentera les mécaniques de jeu de la partie de JdR, comme par exemple tirer les cartes, lire dans le marc de café, <a href="https://blog.xyrop.com/index.php/post/2017/06/27/%5BRetex%5D-JdR-minimal">lancer un objet dans un bol</a>, cliquer sur un générateur en ligne, <a href="https://blog.xyrop.com/index.php/post/2014/01/26/Cutups-en-fran%C3%A7ais">trouver un mot au pif</a>...</p>
<h2>Les jets de dés des joueurs</h2>
<p>En tant que meneur de jeu, avant de demander un jet de dés au joueur pour résoudre une action incertaine de son personnage, j'essaie de garder en tête les paramètres et enjeux suivants :</p>
<h3>L'articulation entre le jet de dés et le paradigme de l'univers du jeu</h3>
<p>De manière générale, les mécaniques de jeu dans leur ensemble ont une importance ("<a href="http://ptgptb.fr/le-systeme-est-important" hreflang="fr">Le système est important</a>").</p>
<p>Au-delà de l'existence ou non de ces mécaniques, il y a également la question de leur <ins>usage</ins> en pratique dans le cadre de la partie :</p>
<p>Ainsi, un jeu comme Donjons & Dragons, avec ses règles de magie très structurées, se prêtera en général moins bien à une partie de JdR où la magie doit être quelque chose de merveilleux et d'incompréhensible, sauf si les joueurs n'ont absolument aucune connaissance des règles de magie et des sortilèges, auquel cas leur usage demeurera, au moins pour un temps, assez mystérieux.</p>
<p>Aussi, un jeu PbTA ("motorisé par l'Apocalypse") qui ne prévoit par exemple pas de compétences particulières, n'est pas très approprié pour déterminer si une activité ne figurant pas parmi les Actions (au sens de la mécanique de jeu, et énumérées en nombre limité) est incertaine ou non : s'il est raisonnable ou intéressant pour la narration que le personnage réussisse ou échoue à son action, alors le joueur déterminera si effectivement son personnage réussit ou échoue à son action.</p>
<p>Les jets de dés faisant partie des mécanismes de base de la plupart des JdR, il serait déraisonnable de ne pas s'interroger sur l'impact pratique de ces mécaniques.</p>
<p>Quand le MJ demande un jet de dés au joueur afin de déterminer si l'action de son personnage réussit ou échoue, il fixe implicitement le fait que l'action entreprise n'est ni inratable, ni impossible. Or, cela a une réelle conséquence sur l'ambiance du jeu, avec potentiellement un impact sur la perception qu'auront les joueurs de l'univers du jeu et de son paradigme.</p>
<p>Exemple :
Le joueur s'exclame : "<em>- J'm'en fous, j'latte le Shoggoth avec un </em>ura-mawashi-geri<em> (coup de pied retourné à la Chuck Norris pour les intimes) !</em>"</p>
<p>Selon que le MJ répond immédiatement, sans demander de jet de dé "<em>- Ton pied s'enfonce profondément dans la chair molle du Shoggoth qui se referme avec un bruit de succion visqueuse autour de ton mollet. Tu sens tes os, tibia, péroné, tarse, métatarse, cheville, être pris dans une pression épouvantable et se briser en petits éclats à l'intérieur de ta jambe alors que la douleur t'éblouit en un voile blanc de métal en fusion...</em>" ou bien "<em>- euh, fais un jet d'arts martiaux pour voir si tu touches. OK, tu fais ton jet de dégâts ? Bon, ben, ton pied heurte violemment la masse du Shoggoth et une sorte de lymphe noirâtre se met à couler du point d'impact.</em>", les conséquences sur l'ambiance du jeu ne seront pas les mêmes.</p>
<p>Dans ce dernier exemple, le meneur de jeu qui a laissé le joueur lancer les dés a fait entrer dans le paradigme de l'univers de jeu que l'usage des arts martiaux contre une créature tentaculaire et antédiluvienne est non seulement possible, mais peut en outre être efficace. Ce faisant, il a nécessairement réduit l'écart conceptuel entre un humain connu et même chiffré via une feuille de personnage (le personnage-joueur) et une créature indicible et à peine concevable (le Shoggoth) à un simple hasard des dés. Cet usage de l'aléa rationalise implicitement le rapport entre le joueur et une créature qui devrait échapper à toute rationalité selon le paradigme de l'univers de jeu. De plus, le joueur pourrait même être encouragé à continuer d'utiliser des arts martiaux contre des créatures du mythe !</p>
<p>Il n'en serait pas de même dans un univers à la Donjons & Dragons, où quand un joueur s'exclame "<em>- J'm'en fous, j'latte l'<a href="http://www.pathfinder-fr.org/Wiki/Pathfinder-RPG.Otyugh.ashx" hreflang="fr">otyugh</a> avec un ura-mawashi-geri !</em>", il sera légitime que le meneur de jeu demande un jet de dés. Le paradigme de l'univers de Donjons & Dragons est après tout celui de héros affrontant - souvent par les armes - des ennemis parfois bien plus puissants que le commun des mortels, et ont habituellement une chance de l'emporter.</p>
<p>Avant de demander un jet de dés, outre l'incertitude de l'accomplissement de l'action, il me semble ainsi important de <strong>se demander si le jet de dés ne remet pas en cause le paradigme de l'univers de jeu, ou ne fait pas disparaître une part de l'ambiance souhaitée</strong>.</p>
<h3>Fluidité de la partie</h3>
<p>Le jet de dés va également induire une coupure dans la fluidité des échanges verbaux qui font naître la narration.</p>
<p>Le personnage-joueur déclare son intention d'agir ("<em>- J'latte le Tremere d'un ura-mawashi-geri bien placé !</em>") et le meneur de jeu interrompt les échanges et fait lancer les dés pour savoir si effectivement le coup de pied touche le Tremere et si ce dernier subit quelque dégât.</p>
<p>Cependant, chaque jet de dé va nécessairement faire perdre quelque secondes dans la partie alors que les participants vont se pencher sur le résultat et son interprétation. Un meneur qui demande beaucoup de jets de dés aux personnages-joueurs diminue sensiblement la fluidité de la narration, et change l'ambiance vers quelque chose de plus technique (ce qui peut être un effet délibérément recherché - ou au contraire quelque chose que le meneur de jeu pourrait souhaiter éviter).</p>
<p>Cette multiplication des jets de dés et la diminution de la fluidité qu'elle engendre peut être rendue nécessaire par le système de jeu, mais elle a aussi un effet psychologique réel sur les joueurs : un meneur de jeu qui demande soudainement beaucoup de jets de dés ralentit le temps, et dans un certain sens fait passer le message selon lequel ce qui est en train de se passer requiert beaucoup de minutie et implique des enjeux plus importants ou un aléa plus grand.</p>
<p>L'augmentation des jets de dés au cours de la scène augmente l'aléa, et les joueurs vont probablement ressentir la situation de leurs personnages comme une situation où l'incertitude est bien plus importante, où tout peut basculer sur un détail.</p>
<p>En même temps, ce type de demande peut cacher une fausse impartialité : rien n'empêche un MJ qui a besoin que les PJ soient repérés alors qu'ils tentent d'infiltrer une base secrète de demander beaucoup de jets de discrétion jusqu'à ce que l'un d'entre eux soit raté, situation statistiquement presque inévitable.</p>
<h2>La gestion de l'incertitude</h2>
<h3>Les incertitudes croisées, structure de base d'une partie de JdR</h3>
<p>La découverte de l'intrigue dans une partie de JdR, ce qui fait une grande partie du sel de cette activité, repose principalement sur trois sources d'incertitude :</p>
<ol>
<li>Le MJ, bien qu'il connaisse une partie du scénario, ignore les actions qui seront entreprises par les personnages-joueurs ;</li>
<li>Les joueurs ignorent l'essentiel du scénario, et les actions des autres joueurs tout comme le degré de perversité du MJ ;</li>
<li>Tous les participants ignorent les résultats des lancers de dés à venir.</li>
</ol>
<p>La totalité de la mécanique d'une partie de JdR est ainsi basée sur ces incertitudes croisées, chaque participant jouant avec des informations plus ou moins incomplètes. Les participants peuvent également tirer un amusement extradiégétique de l'écart entre leur propre conscience de l'intrigue et de ses ressorts d'une part et de l'ignorance intradiégétique de leur personnage d'autre part. Ils se rapprochent ainsi de la position du narrateur omniscient en littérature, sans toutefois pouvoir y accéder en raison des décisions et actions potentiellement imprévisibles des autres participants de la partie, et de l'existence de l'aléa des dés avant que ceux-ci ne soient lancés.</p>
<p>En effet, l'incertitude liée à un aléa n'est éprouvée par chaque participant de la partie que tant que le résultat du jet de dés concerné n'est pas connu de ce participant. Une fois que le résultat d'un jet de dé est connu d'un participant de la partie, ce dernier peut se projeter et imaginer les conséquences probables du résultat : la connaissance du résultat réduit l'incertitude.</p>
<h3>Le bruit derrière le paravent</h3>
<p>Forts du constat selon lequel l'incertitude est réduite lorsque le résultat du lancer de dés est connu, et désireux de maintenir une certaine tension à leur table de jeu, nombre de meneurs font leurs jets de dés de manière cachée, voire font eux-mêmes certains jets de dés des PJ (typiquement les jets de perception) afin de maintenir les joueurs dans l'incertitude.</p>
<p>À partir de là, les joueurs sont contraints de faire aveuglément confiance au meneur de jeu quant à l'exercice impartial et loyal de son pouvoir de décision et d'arbitrage.</p>
<p>Or, beaucoup de meneurs considèrent que "les dés ne servent qu'à faire du bruit derrière le paravent" (paravent désignant l'écran du meneur de jeu, je dis ça pour ceux qui comme moi s'interrogent sur la circulation des masses d'air à la table de jeu) : en clair, leurs impartialité et loyauté connaissent pour limite l'opportunité d'ajuster arbitrairement un résultat qui leur déplaît pour une raison ou une autre (typiquement pour sauver un personnage d'une mort grotesque et vaine ou pour permettre la fuite d'un antagoniste). J'ai entendu d'innombrables fois des variantes de la justification "<em>non, mais c'est pour pas que le paladin de niveau 67 meure bêtement tué par un gobelin de base avec une dague rouillée</em>".</p>
<p>L'intervention du meneur serait alors rendue nécessaire pour contrebalancer un défaut dans les règles du jeu. Soit. Mais alors, puisque l'issue est connue d'avance puisque le meneur de jeu décide de ce qui se produit sans prendre en compte le résultat des dés, <strong>pourquoi lancer quelque dé que ce soit</strong> ? Le meneur de jeu pourrait tout aussi bien assumer de prendre toutes les décisions quant aux réussites ou échecs des actions entreprises par tous les personnages de la partie en fonction de critères connus ou inconnus des autres participants de la partie. Le meneur de jeu deviendrait alors un conteur qui maintient les joueurs sont dans une situation d'interactivité illusoire, inconscients qu'ils n'ont aucun impact sur le déroulement de l'intrigue.</p>
<p>Au final, prenant acte de la fiction d'impartialité du meneur de jeu protégé par son écran de jeu, et compte tenu de l'intérêt d'augmenter la fluidité de la narration au cours de la partie, nombre de créateurs de JdR ont conçu des mécaniques où seuls les joueurs lancent les dés, par exemple les jeux PbtA (Powered by the Apocalypse / Propulsés par l'Apocalypse), le meneur se limitant à prendre des décisions relatives à l'univers de jeu et aux actions des PNJ, qui n'entraînent un jet de dé par les joueurs qu'en cas d'impact direct sur les PJ.</p>
<p>A l'inverse de la démarche présidant aux mécaniques des jeux PbtA, certains meneurs de jeu friands d'aléa demandent beaucoup de jets de dés afin de résoudre les situations incertaines sans avoir jamais à user de leur pouvoir de décision : dans un certain sens, il est confortable de pouvoir dire "<em>écoute, je suis désolé, mais ce sont les dés qui ont tranché</em>" et dans une certaine mesure de se défausser des responsabilités consubstantielles du pouvoir de décision et d'arbitrage du meneur, par exemple dans <a href="https://blog.xyrop.com/index.php/post/2015/08/25/%5BGeekopolis-2015%5D-Vid%C3%A9o-de-l-Atelier-/-Masterclass-%22Tuez-vos-PJ-%21%22">la mort d'un personnage-joueur</a>. J'avoue avec une humilité teintée de honte avoir souvent fait partie de ceux-ci, et céder encore parfois à cette tentation.</p>
<p>Entre ces deux cas extrêmes se trouvent d'autres utilisations des lancers de dés qui peuvent se révéler des instruments utiles pour à augmenter l'intensité de la partie.</p>
<h2>Le jet de dés comme instrument d'ambiance</h2>
<h3>L'aléa comme source d'imprévisibilité</h3>
<p>Les JdR qui mettent l'accent sur le pouvoir de décision du MJ, parfois en lui enlevant les dés, négligent peut-être un peu l'utilité de l'aléa comme outil d'inspiration / de relance de l'intrigue. Certes, au premier abord, les meneurs de jeu allient talent, génie, intelligence, sagacité et charisme ce qui les rend normalement à même de toujours tout pouvoir gérer dans le cadre de l'univers de jeu. Pour autant, chaque meneur de jeu a ses particularités, ses habitudes, ses idiosyncrasies de sorte que des joueurs qui le connaissent trop bien pourraient anticiper à certaines décisions ou certains événements imaginés par le meneur.</p>
<p>Le dé s'avère dans ce cas un allié précieux pour le meneur, en lui permettant de laisser totalement au hasard certains éléments de l'univers sur lesquels il lui est demandé de statuer par les joueurs. Afin de garder un certain contrôle sur le déroulement de la partie, il est bien entendu possible de ne laisser au hasard que les éléments qui n'ont qu'un impact indirect ou limité sur le déroulement de l'intrigue en cours, mais ce cloisonnement peut limiter l'efficacité de cette tactique puisque le risque de prévisibilité perdurera pour les éléments les plus importants de la partie.</p>
<p>Ce dé est aussi un allié lorsque le meneur ne sait tout simplement pas répondre à une question qui lui est posée par un joueur : il en laisse la réponse au hasard et se laisse surprendre lui-même par le déroulement de la situation.</p>
<p>Un type de dé pratique pour tenir lieu de source d'imprévisibilité est le dé "smiley", à six faces, qui selon le contexte donne une bonne idée de la réponse à apporter au joueur (de "non, et ça va mal se passer" à "oh, mais bien entendu (mais en fait ça va très mal se passer façon échec critique mais les personnages-joueurs l'ignorent)").</p>
<h3>La transparence de l'aléa comme source d'autorité et d'impartialité : à bas l'écran du MJ !</h3>
<p>Comme rappelé ci-avant, la tentation est grande pour un MJ de se limiter de faire du bruit avec les dés derrière le paravent et de donner l'illusion que le déroulement de la partie obéit aux résultats statistiques des lancers de dés des joueurs.
Des joueurs à qui tout réussit pourraient se figurer bénéficier de coups de pouce alors qu'il n'en est rien, ou imaginer que le meneur de jeu triche en leur défaveur alors qu'il a de bonne foi réalisé trois réussites critiques d'affilée.</p>
<p>Ainsi, on voit fréquemment des meneurs de jeu soulever brièvement leur écran pour montrer le résultat de leur jet de dés, pour prouver aux joueurs que la situation improbable en train de se dérouler n'est nullement de leur fait.</p>
<p>Mais dans ce cas, si le meneur de jeu n'a pas de scrupules à montrer qu'il ne triche pas avec les dés, pourquoi ne pas faire les jets de dés au vu et au su des joueurs ? Les joueurs font bien les leurs de manière ouverte, alors pourquoi pas le meneur, en toute transparence ?</p>
<p>Avec un aléa transparent, les joueurs vont constater que le meneur ne triche pas pour les sauver ni pour les enfoncer, ce qui va renforcer leur confiance quant à son impartialité et à la justice de ses arbitrages.</p>
<p>Mais ce n'est pas le plus important. Le plus important est que les joueurs pourront constater que chaque point d'expérience, chaque réussite (et chaque plantage) leur appartiennent réellement, sont dus à leur chance (d'une manière statistiquement cohérente) et à leur talent, ce qui augmente l'intensité de la partie pour ceux-ci.</p>
<p>L'écran de jeu pourrait évidemment demeurer utile à titre de référence de règles et pour cacher les éventuelles notes prises par le meneur de jeu (pour peu que celui-ci prenne des notes).</p>
<h3>Distinguer ce que les personnages-joueurs peuvent savoir ou non</h3>
<p>Contrairement à ce que l'on pourrait croire, l'incertitude ne disparaît pas totalement une fois le résultat du dé connu. En effet, la connaissance du résultat du dé est un <strong>indicateur</strong> de la suite des événements, dont le degré de fiabilité peut varier en fonction d'autres paramètres inconnus du personnage-joueur.</p>
<p>Exemple, deux personnages-joueurs, l'un violoniste, l'autre harpiste, veulent interpréter <a href="https://soundcloud.com/pelerin/m-ditation-de-tha-s-de" hreflang="en">la Méditation de "Thaïs" de Jules Massenet</a> afin de bouleverser leur auditoire. L'un et l'autre vont lancer les dés pour déterminer le degré de réussite de leur tentative, et le violoniste, bien que très compétent, fait un jet de dés dont il constate le résultat assez moyen. Les joueurs sont conscients du caractère modéré de la réussite. Dans l'espace partagé imaginaire, cela se traduit par le fait que le violoniste a fait un infime écart de hauteur entre les deux Sol4 qui se succèdent à 1:43 (joués chacun avec un doigt différent ce qui a très légèrement modifié la fréquence).</p>
<p>Ce que les joueurs et personnages-joueurs ont plus de mal à connaître, c'est l'état émotionnel de l'auditoire, quoiqu'on pourrait arguer que des instrumentistes habitués à jouer en public ne devraient pas s'y tromper. Il ne serait donc pas déraisonnable dans cette hypothèse que les joueurs aient déjà connaissance du résultat du dé pour juger de l'émotion du public, ceci avant que le meneur de jeu ne narre de manière effective la réaction de l'auditoire.</p>
<p>Un personnage-joueur a pu tenter de lancer un sort d'enchantement sur un personnage non-joueur sans savoir que ce dernier est immunisé à ce type de magie : la connaissance du bon résultat du dé est donc un indicateur pour le joueur de ce que le sortilège du personnage a été correctement lancé, mais il ne peut que se tromper sur les conséquences de son action en raison de sa méconnaissance de l'immunité de sa cible. Dans un tel cas, le meneur de jeu pourrait faire un faux jet de résistance à la magie pour le personnage non-joueur immune, afin d'éviter d'attirer l'attention du joueur sur cette situation inhabituelle.</p>
<p>Connaître le résultat du jet de dés ne suffit donc pas : l'incertitude ne disparaît totalement de manière effective que lorsque le personnage-joueur devient conscient de la totalité des tenants et aboutissants de l'action entreprise.</p>
<p>Or, il existe des situations où les personnages-joueurs ne devraient pas matériellement connaître les conséquences exactes des actions entreprises par eux ou par des personnages non-joueurs, mais où les règles de la plupart des JdR telles qu'elles sont conçues ne permettent pas une telle finesse : celle qui survient le plus fréquemment en JdR est tout simplement la scène de conflit (physique ou non).</p>
<p>Par simplicité, l'exemple sera basé sur des mécaniques de conflit physique (qui sont présente dans la quasi-totalité des JdR), mais les principes sont les mêmes pour des mécaniques de conflit social ou de conflit mental.</p>
<p>Quand un personnage-joueur est engagé dans un combat, il sait la plupart du temps s'il a touché son adversaire, ou si son adversaire l'a lui-même touché. Ce qui lui échappe et ne peut que lui échapper, c'est la gravité des blessures de part et d'autre. Bien qu'il voie son adversaire saigner, ce dernier est-il réellement affaibli ? Le PJ a senti le fer de la rapière percer son abdomen, et les élancements douloureux dans son ventre ne sont-ils pas le signe qu'il est gravement atteint ?</p>
<p>Les personnages-joueurs ne devraient pas être en mesure de connaître autre chose que les conséquences <strong>apparentes</strong> de leurs attaques et défenses, et <strong>non pas la réalité</strong> de ces conséquences.</p>
<p>Or, avec des jets de dés faits au vu et au su des participants, ceux-ci ne peuvent ignorer s'ils ont atteint ou non leurs adversaires. En outre, les PJ connaissant les dégâts / blessures infligées ainsi que les jauges affectées par les attritions, il devient très difficile au meneur de jeu qui pratique les jets de dés apparents de conserver la distinction entre savoir des personnages et savoir des joueurs.</p>
<p>Cependant, même dans cette situation, rien n'empêche le meneur de jeu de rétablir l'incertitude en rétablissant le secret dès lors qu'il s'agit des dégâts infligés, non pas en cachant les mécaniques de détermination des blessures, mais <strong>en conservant secret l'état exact des PJ et PNJ</strong>.</p>
<p>Il n'est en effet rien de plus simple pour un MJ que de demander aux joueurs d'indiquer <a href="https://blog.xyrop.com/post/paradoxe-PV">leur nombre de PV / niveaux de blessure / états de santé / points de santé mentale</a> au début de la partie, de noter ces indications, et de gérer lui-même ces compteurs en tenant le compte sur une feuille blanche, derrière son écran de meneur, <strong>sans jamais donner une autre indication au joueur qu'une description de la manière dont son personnage se sent, ni jamais préciser le niveau de santé exact du personnage</strong>. Après tout, le MJ le fait souvent déjà pour des dizaines voire centaines de PNJ, ce n'est pas ajouter le compte de 5 personnages-joueurs qui va changer grand chose à son travail.</p>
<p>Ainsi, même si le joueur peut avoir compris en voyant le résultat des dés que son personnage a reçu une blessure de 3 PV, le meneur de jeu n'en fera pas mention et indiquera : "<em> - le bretteur fait glisser sa lame contre ton bras, t'infligeant une large estafilade diagonale entre le coude et l'épaule, qui imprègne immédiatement le tissu de ton pourpoint d'une humidité chaude. Ton avant-bras s'engourdit légèrement.</em>"</p>
<p>Au PJ de décider dans cette situation si la blessure est plus grave que prévu ou non, s'il est trop affaibli ou bien encore assez vaillant pour continuer le combat.</p>
<p>Tous les jets de dés sont ouverts, les joueurs connaissent la qualité de réussite de leurs actions et de celles de leurs adversaires, mais ne sont pas en mesure d'en jauger précisément les conséquences.</p>
<p>Pour éviter les petits malins qui voudraient tenir le compte de la santé de leur personnage, le meneur de jeu peut annoncer répartir <strong>arbitrairement et inégalement</strong> un certain nombre de points de vie ou niveaux de santé supplémentaires entre les PJ juste après que ceux-ci aient indiqué leur total de départ - avantage objectif pour les personnages-joueurs, mais qui introduit une incertitude très forte quant à leur état réel et rétablit la tension qui aurait sinon pu être diminuée par les jets de dés apparents.</p>https://blog.xyrop.com/post/%5BTactique-de-ma%C3%AEtrise%5D-Alea-incertitude-information-jet2de#comment-formhttps://blog.xyrop.com/feed/atom/comments/60[Tactique de maîtrise] Scénario basé sur un diagramme d'Ishikawaurn:md5:41f4822b50fe8fbf25a2385a097a59de2018-05-03T13:56:00+02:002020-05-10T17:00:39+02:00LudoxconseilsJdRJeu de rôlemaîtrisermener une partiemeneur de jeuMJPratiqueTactique de maîtrisetactique de maîtrise<p>Très souvent, les scénarios que l'on peut trouver dans le commerce contiennent des phases narrativement simplistes où le meneur doit faire en sorte que s'accumulent les péripéties, les revers pour les personnages-joueurs. On trouve un inventaire des difficultés envisageables, disponibles pour le meneur de jeu. Ainsi le voyage est agrémenté de péripéties telles que : la caravane est attaquée par des brigands, un dromadaire se blesse, un puits est à sec, etc.</p>
<p>Ces péripéties apparaissent au final aux joueurs comme dictées par l'arbitraire du meneur de jeu ou de l'auteur du scénario. Il existe cependant une manière simple et efficace de faire survenir ces péripéties d'une manière extrêmement logique, qui donnera l'impression aux personnages-joueurs qu'ils sont les seuls responsables de la situation insoluble dans laquelle ils se retrouveront.</p>
<p>Cette tactique de maîtrise est basée sur un détournement d'usage d'un outil appelé diagramme d'Ishikawa, et ce billet reprend, tout en la détaillant et en l'approfondissant, l'une des sections (diapositives 12 à 16) de la présentation disponible <a href="https://blog.xyrop.com/public/Gamemastering/Atelier_Masterclass_Tuez_vos_PJ.pdf">ici</a>.</p> <h2>Le diagramme de quoi ?</h2>
<p>Le diagramme d'Ishikawa est un outil de gestion de la qualité industrielle. Lorsqu'une défaillance dans la qualité d'un produit est détectée, le diagramme d'Ishikawa sert à inventorier les causes de cette défaillance, en les organisant dans un diagramme en arête de poisson. Ce diagramme permet de visualiser ainsi les causes de défaillance, organisées de la plus évidente, qui sera proche de la "colonne vertébrale du poisson", jusqu'à à la plus lointaine - séparée de la défaillance par plusieurs liens de causalité de plus en plus ténus - qui sera perdue dans les ramifications.</p>
<p>Les causes de défaillances du diagramme d'Ishikawa sont réparties en différentes catégories :</p>
<ul>
<li>Matériaux (matières premières) entrant en jeu</li>
<li>Matériels utilisés, les machines et équipements</li>
<li>Méthodes, processus et tactiques mis en œuvre</li>
<li>Main-d'œuvre, les tiers intervenants</li>
<li>Milieu, l'environnement général pour l'accomplissement de l'objectif qualitatif</li>
</ul>
<p>On peut éventuellement y ajouter les catégories :</p>
<ul>
<li>Mesure, à savoir les évaluations et appréciations réalisées</li>
<li>Management, la manière dont la Main d’œuvre s'est trouvée encadrée et pilotée</li>
</ul>
<h2>Quel rapport entre qualité et une intrigue de JdR ?</h2>
<p>Sauf cas particulier, les joueurs visent en principe une forme de succès dans le cadre des scénarios auxquels ils participent via leurs personnages. Rien que la survie du personnage est déjà une forme de succès.</p>
<p>Ces objectifs des joueurs peuvent tout à fait être considérés comme une forme de qualité du résultat produit par le déroulement de l'intrigue / de la partie :</p>
<p>La qualité totale est atteinte lorsque la caravane arrive à sa destination dans les temps prévus, sans pertes humaines ni de marchandises. Lorsque ce n'est pas le cas, alors le résultat du processus "intrigue" est de qualité partielle (la caravane est en retard et il y a eu plusieurs morts dans l'escorte), de mauvaise qualité (la caravane est arrivée en retard, trois chameaux chargés des marchandises les plus précieuses se sont perdus dans une tempête de sable, et certains membres de l'escorte véhiculent une maladie contagieuse), voire pas atteint du tout (la caravane n'est jamais arrivée, tous les personnages-joueurs sont morts ou capturés par les nomades cannibales).</p>
<p>La défaillance qualitative est donc un déroulement de la partie qui aboutit à un résultat insatisfaisant pour les personnages-joueurs (qui ne remplissent pas leurs objectifs).</p>
<h2>Objectifs et arbitraire du meneur de jeu, défis pour les joueurs</h2>
<p>De son côté, le meneur de jeu est là pour opposer des défis aux personnages-joueurs : dans une certaine mesure, la défaillance qualitative est son objectif.</p>
<p>Évidemment, il n'est rien de plus facile pour le meneur de jeu que de fixer arbitrairement une situation d'échec du scénario, mais un tel comportement est sans intérêt et même contre-productif : le MJ est là pour challenger les joueurs pour qu'ils s'amusent, et non pour leur imposer l'arbitraire frustrant d'un démiurge mesquin.</p>
<p>Bien au contraire, pour confronter les personnages-joueurs à un défi, il faut d'abord leur laisser une chance, et même de nombreuses chances. Les chances que des personnages-joueurs seront parfois, mais pas nécessairement, en mesure de saisir représentent autant de défis intellectuels et/ou émotionnels pour les joueurs eux-mêmes. Pour cela, il est efficace d'encourager les personnages-joueurs dans leurs entreprises, ceci <del>même</del> surtout quand celles-ci apparaissent intéressantes à court terme mais sont contre-productives à long terme compte tenu de ce que sait le meneur de jeu sur les véritables causes des difficultés.</p>
<p>Pour donner sa pleine efficacité à cette tactique et supprimer toute sensation d'arbitraire, il est essentiel de <ins>donner du pouvoir</ins> aux personnages-joueurs : de les mettre dans la position de décisionnaires ou à tout le moins d'acteurs essentiels pour gérer les causes de défaillance qualitative (au sens de risques pouvant mener à l'échec de leurs objectifs).</p>
<p>Ainsi, il devrait être loisible au personnage-joueur, chef de la caravane en butte à des impératifs calendaires, d'imposer un pas rapide au convoi. Un tel pas rapide permet effectivement, à court terme, d'avancer plus vite et de réduire le temps du voyage. Cependant, à moyen terme, la fatigue s'installera plus vite chez les membres de la caravane, tout comme les risques de blessures, tandis qu'à long terme l'eau consommée plus rapidement pourrait venir à manquer vers la fin du voyage. Ces nouvelles causes potentielles d'échec devront être à leur tour gérées.</p>
<p>Bref : le meneur de jeu aura ainsi donné à ce personnage-joueur "<em>la corde pour se pendre</em>".</p>
<p>À un niveau "méta-jeu", les joueurs auront conscience des opportunités saisies, de celles qu'ils auront laissé échapper, et de leurs échecs à anticiper des difficultés : réussites et échecs survenant progressivement, les joueurs ne manqueront pas de se tenir eux-mêmes pour principalement responsables du déroulement favorable ou au contraire défavorable de l'intrigue.</p>
<h2>Brainstorming</h2>
<p>Le diagramme d'Ishikawa détourné lui permet de poser les objectifs des personnages-joueurs en partant de l'hypothèse que ceux-ci ne seront pas remplis à la fin de l'intrigue, et de se créer une liste des causes et leviers, des plus proches aux plus lointains, qui auraient pu contribuer à cette situation de non-qualité / non-atteinte de ces objectifs.</p>
<p>Ainsi, reprenant l'exemple de la caravane, le meneur de jeu pourrait décider que les causes les plus immédiates de défaillance dans chaque catégorie sont les suivantes :</p>
<ul>
<li><strong>Matériaux</strong> (matières premières) : les cordages et bâches utilisés pour emballer les marchandises sont trop fragiles et ont une tendance à céder au cours du voyage ;</li>
<li><strong>Matériels</strong> : l'instrument pour s'orienter dans le désert est faussé et indique une direction imprécise, les selles sont inconfortables pour les voyageurs, il manque des couvertures pour les nuits fraîches, les gourdes d'eau sont trop petites ou trop peu nombreuses ;</li>
<li><strong>Méthodes</strong> : le rythme imprimé à la caravane est trop soutenu ce qui fatigue les bêtes, le chemin planifié passe par une zone trop difficile à franchir ;</li>
<li><strong>Main-d'œuvre</strong> : un faux marchand envoie régulièrement des pigeons voyageurs pour informer un groupe de bandits de la progression de la caravane, le guide fait des erreurs d'orientation ;</li>
<li><strong>Milieu</strong> : le désert est parcouru de tempêtes de sable, les puits du parcours envisagé sont à sec, la température est insoutenable le jour (trop chaud) et la nuit (trop froid), le sable s'insinue partout, les scorpions et serpents se glissent dans les affaires des caravaniers ;</li>
<li><strong>Mesure</strong> : le poids des marchandises a été sous-évalué, les bêtes de somme avancent moins vite que calculé, les quantités de vivres sont insuffisantes ;</li>
<li><strong>Management</strong> : ceci est surtout de la responsabilité des personnages-joueurs, qui feront leurs propres erreurs, n'en doutons pas - il n'est donc pas nécessaire de l'indiquer.</li>
</ul>
<p>Si la mission de la caravane aboutissait à un échec, une analyse post mortem de cet échec dans le cadre d'une démarche qualité pourrait aboutir à un diagramme tel que celui-ci :</p>
<p><img src="https://blog.xyrop.com/public/Gamemastering/Images/Ishikawa/ishikawa1.png" alt="" style="display:table; margin:0 auto;" /></p>
<p>Quand ces causes se présentent spontanément (ou plutôt que le meneur de jeu les fait survenir directement ou mentionne leur possible apparition), les PJ s'empressent habituellement de prendre les contre-mesures qui s'imposent, souvent d'une manière relevant un peu du <em>méta-gaming</em>.</p>
<p>Pour éviter cela, inverser le diagramme d'Ishikawa permet d'imaginer les causes plus lointaines de ces différentes causes plus proches menant à l'échec de la mission des PJ. Dès lors, le MJ a tout le loisir de les exposer de manière très ouverte à leur sagacité, sans pour autant en faire apparaître les conséquences. Les PJ ainsi informés ne peuvent pas ignorer des faits qui <em>in fine</em> pourraient mener à l'échec de leurs objectifs. La subtilité de cette technique réside dans le fait que, le MJ se comportant de manière loyale et ne cachant aucune information importante, la survenance de l'échec ne résultera au final que d'un enchaînement de causalités aggravé par le défaut d'anticipation des PJ. Autrement dit : ça va mal se passer mais c'est entièrement la faute des joueurs !</p>
<p>Ainsi, dans le cas ci-dessus, le meneur de jeu va distiller les informations aux PJ relativement aux causes des causes d'échec potentielles de leur quête :</p>
<ul>
<li>"<em>Non loin de vous, deux artisans s'invectivent : - "Fils de putois, le fil de lin que tu m'as vendu est pourri ! Comment veux-tu que je travaille correctement ?"</em>". C'est la cause lointaine de la défaillance des <strong>Matériaux</strong>, bâches et cordes ;</li>
<li>"<em>Au moment de charger ses affaires, votre guide fait tomber son paquetage. Il l'ouvre rapidement et fouille parmi ses outils, puis referme le sac visiblement soulagé</em>". Le choc a endommagé l'astrolabe du guide, et celui-ci ne s'en est pas aperçu. "<em>'J'ai acheté des selles toutes neuves, je ne lésine pas sur la sécurité', vous confie le marchand.</em>" Ces selles neuves sont hélas trop dures et vont fatiguer les animaux et les voyageurs au début du voyage. "<em>Vous devriez vous méfier, les nuits du désert sont fraîches. J'ai depuis longtemps tout un stock de couvertures qui ne me servent pas, et dont je veux me séparer. Voulez-vous me les acheter ?</em>" Ces couvertures à première vue acceptables, ont été entreposées trop longtemps. Cette mauvaise conservation est la cause de ce qu'elles s'effilochent dès qu'on les déplie. Ce sont des exemples de causes lointaines de la défaillance des <strong>Matériels</strong> ;</li>
<li>"'''J'ai peur que nous ne soyons suivis par des pillards du désert. Peut-être devrions-nous forcer le pas ?', suggère votre guide." Ceci aggraverait la fatigue des hommes et des bêtes, et la présence des pillards peut donc pousser les PJ à commettre une erreur de <strong>Méthode</strong> ;</li>
<li>"<em>Le caravanier pousse un juron en perdant aux dés. Un autre membre du convoi s'étonne : 'Qu'est-ce qu'il joue, celui-là ! J'aurais juré qu'il était sur la paille, et le voici à dépenser sans compter !</em>'" Le caravanier a reçu de l'argent pour trahir la caravane et informer des brigands de sa progression. Le besoin d'argent et son appétit du jeu du marchand est la cause de sa trahison, défaillance de <strong>Main-d'œuvre</strong> ;</li>
<li>"<em>Une jeune enfant émaciée, aux lèvres parcheminées, s'approche de toi et caresse l'outre d'eau à ta ceinture avec un regard de convoitise. 'Messire, il n'a pas plu de toute la saison, et mon petit frère se meurt de soif...</em>'" Si la région n'a pas connu de pluie pendant toute la saison, alors les arrêts aux puits prévus sur le chemin de la caravane seront probablement insuffisants pour ravitailler les caravaniers en eau. La cause lointaine des puits à sec est donc annoncée, encore faut-il que les PJ anticipent. C'est une cause de défaillance du <strong>Milieu</strong> ;</li>
<li>"<em>Non, ne forçons pas le pas pour échapper aux pillards, nous risquons de fatiguer les bêtes. Perdons-les plutôt en traversant les rocailles. Cela ne devrait pas prendre plus d'une heure.</em>" Au bout de plus d'une demi-journée, il faut se rendre à l'évidence, la région rocailleuse est beaucoup plus étendue que prévu. En outre, deux bêtes se sont blessé les pattes contre les rocs acérés, et la caravane entière est contrainte de se déplacer à leur vitesse moindre. La décision d'échapper aux pillards est la cause de cette erreur de <strong>Mesure</strong> dans la vitesse de progression.</li>
</ul>
<p>Synthétisées dans un diagramme d'Ishikawa inversé, les informations sur les causes proches et lointaines d'échec de la mission se trouvent dans les cadres verts :</p>
<p><a href="https://blog.xyrop.com/public/Gamemastering/Images/Ishikawa/ishikawa2.png"><img src="https://blog.xyrop.com/public/Gamemastering/Images/Ishikawa/ishikawa2.png" alt="" style="display:table; margin:0 auto;" /></a></p>
<h2>Conclusion</h2>
<p>Cette méthode permet au meneur de jeu de trouver facilement des manifestations, intégrées dans l'espace imaginaire partagé, des causes de défaillance de la mission des PJ.</p>
<p>En présentant clairement, loyalement et assez tôt dans l'aventure toutes les informations contenues dans les cadres verts, le meneur de jeu remet entre les mains des joueurs l'entière responsabilité du bon ou mauvais déroulement de l'aventure.</p>
<p>Lorsque les causes d'échec lointaines n'ont pas été détectées ou gérées en amont par les PJ, il suffit dès lors au meneur de suivre le diagramme qu'il a conçu : au cours de la partie, il devra narrer de manière objective les causes d'échec plus proches qui se seront réalisées faute de prise en compte par les joueurs.</p>https://blog.xyrop.com/post/2018/05/03/%5BTactique-de-ma%C3%AEtrise%5D-Sc%C3%A9nario-retors-gr%C3%A2ce-au-diagramme-d-Ishikawa#comment-formhttps://blog.xyrop.com/feed/atom/comments/46[Tactique de maîtrise] Mener une partie de 2 heures maximum en convention ou salonurn:md5:74230b23803c36b991e4e9c22780f3822018-01-22T10:35:00+01:002020-05-10T17:05:58+02:00LudoxAide de jeuconseilsconventionJdRmener une partieMJPersonnages précréésRetour d expériencesalontactique de maîtrise<p><em></em>La tendance sur les salons et conventions depuis les 5 dernières années est en effet au raccourcissement de la durée que les visiteurs des salons sont prêts à accorder à leur participation à des parties de JdR. Cela peut sembler paradoxal pour une activité qui est connue pour être consommatrice en temps, mais c'est pourtant ce qui se passe : annoncez aux visiteurs qu'ils vont rester 3h30 assis sur une chaise, et ils vont s'inquiéter voire renoncer à venir à la table de jeu. Or, que vous souhaitiez mettre en œuvre une simple démonstration ou faire connaître votre jeu, l'intérêt de la partie que vous proposez en salon est précisément faire venir des joueurs à votre table de JdR et non de les faire fuir !
Après 15 ans au moins passés à mener et participer à des parties de JdR au cours de conventions et salons consacrés, cet article présente quelques conseils nés de l'expérience pratique - comme disent nos amis anglophones : YMMV (<em>Your Mileage May Vary</em>).</p> <h2>Les contraintes des conventions</h2>
<p>Commençons par enfoncer une porte ouverte, et rappelons-donc les contraintes des conventions, parties de JdR un peu spéciales. Ce sont ces contraintes qui doivent amener le MJ à modifier sa manière de maîtriser :<br />
<strong>Le bruit</strong> : Le bruit est la contrainte numéro 1 de la partie de convention. Qui n'a jamais maîtrisé une partie à deux pas du stand "<em>Dance Dance Revolution</em>" (faits authentiques) ne saurait comprendre parfaitement le sens de l'expression "<em>mener une partie dans la douleur</em>". Le bruit de fond constant contraint le MJ à forcer sa voix et interdit la plupart du temps les scènes feutrées dont les protagonistes chuchotent. Les pics de bruit (et là je pense à toi, oui, toi l'enf**** qui soufflais dans ta corne de brume à côté de ma table de démo) interdisent tout échange avec les joueurs, et vont faire perdre autant de temps effectif pour le déroulement de la partie.<br />
<strong>Durée limitée</strong> : Le manque de temps est la deuxième contrainte de la partie de démonstration en salon. Si le temps imparti pour la partie est écoulé sans que le scénario soit achevé, le MJ a le choix soit de s'interrompre, soit de continuer. Dans les deux cas, il fera des malheureux. Si le scénario demeure inachevé, ses joueurs seront frustrés de ne pas connaître la fin (ou de l'apprendre sans avoir pu la jouer). S'il choisit de poursuivre la partie au-delà du temps imparti, ce sont les joueurs de la partie suivante qu'il va frustrer en retardant le début de leur partie ou en étant forcé d'écourter le déroulement de leur propre scénario. En clair, il faudra tenir le temps imparti d'une manière ou d'une autre.<br />
<strong>Les joueurs</strong> : ce sont a priori de parfaits inconnus, avec des attentes disparates et une expérience variable du JdR. Le temps est limité, le MJ n'a pas trop le temps d'apprendre à les connaître, et de s'adapter à leurs attentes. Quant au "contrat social" du JdR, n'en parlons même pas : si des joueurs connaissant le JdR sauront éventuellement préciser s'il existe des sujets tabous, les joueurs débutants n'auront même pas idée de la manière dont se déroule une partie, autant dire que se projeter dans son contenu leur passera très loin au-dessus.<br /></p>
<h2>Le joueur de convention</h2>
<p>Concentrons-nous un instant sur le joueur de salon. Ses caractéristiques particulières sont structurantes de l'attitude du MJ :</p>
<ul>
<li>Il ne connaît pas le MJ. Il ne sait pas que le MJ châtie systématiquement les joueurs qui l'interrompent en leur coupant une phalange, ni qu'il a une obsession pour les intrigues à tiroir et les femmes drows en déshabillé de cuir. Le MJ doit expliquer avant la partie comment il fonctionne, s'il fait des choses inhabituelles pour un MJ lambda. Par exemple, je n'utilise pas d'écran pour cacher mes jets de dés : tous les joueurs peuvent les constater - ça veut également dire que je ne "triche" pas pour sauver les personnages-joueurs, et c'est ce que j'explique habituellement aux joueurs qui viennent à ma table ;</li>
<li>Il ne connaît pas le scénario. Il est là pour le connaître, et même peut-être pour faire des choses auxquelles le MJ n'aurait pas pensé, comme par exemple parler à un monstre là où son groupe habituel l'aurait juste massacré à coups d'épée bâtarde. Cela veut dire par corollaire qu'il ne faut pas le sanctionner s'il s'éloigne du scénario, mais au contraire le récompenser ;</li>
<li>Il ne connaît probablement pas l'univers de jeu de la partie, et il faudra le guider gentiment dans la bonne voie ("<em>- je pense qu'un Bushi du Lion éviterait ce genre de comportement.</em>") plutôt que de le sanctionner ("<em>- ton Daimyo est offensé et t'ordonne le seppuku !</em>")</li>
<li>Il accepte les contraintes des conventions. Il sait que la partie va être courte, se dérouler dans un environnement bruyant, et que l'aventure sera adaptée au plus grand nombre. S'il a choisi de participer à une partie en salon, c'est qu'il accepte ces contraintes et qu'il estime qu'elles ne le gêneront pas.</li>
<li>Mais alors, pourquoi est-il présent ? Que vient-il donc chercher ? Sans trop se fourvoyer, on peut dire que le joueur de convention cherche d'abord et avant tout le plaisir de la découverte : découverte d'un nouveau jeu (voire d'un loisir inconnu pour les grands débutants), d'un nouvel univers, d'un nouveau système de règles, découverte d'autres manières de jouer, découvrir de nouveaux joueurs et MJ sympathiques.</li>
</ul>
<p>Partant de cette hypothèse, le devoir du meneur de jeu en convention est donc de donner à ces joueurs non seulement ce plaisir de la découverte, mais aussi <strong>l'envie de la découverte</strong>. Les impératifs du meneur par rapport au joueur de convention sont alors non seulement de lui mettre des souvenirs plein la tête, de faire en sorte que cette partie soit marquante, bref, d'en faire des tonnes, mais également de lui donner envie de continuer la partie ou la campagne, de lui faire regretter que la partie n'ait pas duré plus longtemps. Avant même de passer par le contenu de la partie, ça passe par l'attitude du meneur de jeu en démonstration qui doit faire <ins>un effort pour être sympathique</ins>, comme par exemple sourire en se présentant, demander leurs prénoms aux joueurs, faire qu'ils se sentent détendus et accueillis, sourire en présentant le jeu et l'univers, complimenter les joueurs sur leur choix de prétirés, sourire, rire avec eux, etc.</p>
<h2>La préparation de la partie</h2>
<p><strong>La matériel</strong> requis pour une partie de convention est le suivant : <br /></p>
<ul>
<li>des feuilles de personnages prétirés pour 4 à 5 joueurs. Sauf exception très particulière que nous verrons plus loin, la contrainte de temps exclut nécessairement le temps pour les joueurs de créer leurs personnages. Alors je sais bien : "<em>les prétirés, c'est le mal !</em>" et puis "<em>ça fait partie intégrante du plaisir du JdR</em>", mais outre qu'on a pas le temps, et que certains joueurs trouvent que remplir leur fiche est une corvée, la plupart des joueurs de salon sont là pour bénéficier de temps de jeu effectif - soit ils sont déjà rôlistes et connaissent déjà le plaisir jouissif de créer un perso, soit ils ne sont pas rôlistes mais en prenant plus de temps pour les faire jouer, le MJ augmente les chances qu'ils le deviennent à terme et qu'ils découvrent ce plaisir par eux-mêmes plus tard. Et puis franchement, tous les groupes de personnages ressemblent d'une manière ou d'une autre à l'Agence tous risques. Autant gagner du temps et faire les fiches d'Hannibal, Futé, Barracuda et Looping avant...</li>
<li>autant d'assortiments de feuilles de personnages prétirés que de parties prévues. Les joueurs aiment griffonner sur les fiches de prétirés, et on peut espérer qu'ils auront plaisir à la garder avec eux en souvenir de la partie. Sans compter que le titre du jeu est habituellement sur la fiche - c'est un aide-mémoire - et qu'on peut également y mettre des mentions du site web du jeu, de la page Facebook, etc. ;</li>
<li>des personnages prétirés adaptés au scénario & complémentaires. Ce n'est pas la peine de mettre un barbare avec une grosse hache dans le groupe de prétirés si le scénario est entièrement tourné vers l'intrigue. Si le scénario consiste à prendre d'assaut une forteresse, il faudra que l'érudit du groupe ait une bonne raison d'être présent. De même, les personnages prétirés devraient être complémentaires les uns avec les autres, afin qu'ils aient chacun quelque chose à faire dans la partie. Dans le cas contraire, c'est prendre le risque qu'un ou plusieurs joueurs s'ennuient.</li>
</ul>
<p><strong> La teneur du scénario</strong><br />
Le profil des joueurs peut fortement varier autour d'une table - une partie de démo d'<a href="http://www.legrog.org/jeux/exquisite-replicas" hreflang="fr">Exquisite Replicas</a> avec autour de la même table deux demoiselles de 12 ans sevrées à Chica Vampiro et un ancien MJ de <a href="http://www.legrog.org/jeux/kult" hreflang="fr">Kult</a> risque d'aboutir à un grand écart thématique/intellectuel pour le MJ.
Par conséquent, il faudra déterminer un dénominateur commun pour la partie de démonstration, afin, autant que faire se peut, de rassembler les joueurs autour de thèmes qui peuvent être difficiles tout en restant grand public (sans forcément être grand public). Cela, sans même parler des spectateurs de la partie : le gamin de 10 ans qui vient observer la table n'est pas forcément prêt à entendre la description détaillée de la manière dont le phallus démesuré et hérissé de piquants du démon de Slaanesh vient empaler l'anus du nain tueur de trolls et fouailler ses entrailles dans une agonie exquise. En clair, il faut du "Interdit aux moins de 12 ans non accompagnés", et pas du "Interdit aux mineurs".
Cela n'empêche pas de proposer quelque chose de <a href="http://www.legrog.org/jeux/Sombre" hreflang="fr">Sombre</a>. Simplement, il faut faire preuve de discernement dans les thématiques, et, pour les scènes potentiellement choquantes, suggérer plutôt que décrire.</p>
<p><strong>Placement en milieu de table</strong><br />
Je ne vais pas revenir sur la question du <a href="https://blog.xyrop.com/index.php/post/2017/06/19/Placement-MJ" hreflang="fr">placement en milieu de table</a>, qui est pour moi <ins>la base</ins> pour une partie de JdR en table longue (telles que très souvent les tables de convention), et qui est absolument indispensable lors des parties de démonstration sur les salons. Il y a beaucoup trop de bruit environnant en salon (visiteurs, autres tables) pour qu'un MJ puisse envisager un autre placement afin de se faire entendre de tous les joueurs à sa table, du moins sans se bousiller la voix.</p>
<p><strong>Pastilles au miel</strong><br />
Corollaire du placement en milieu de table, la pastille au miel est la meilleure amie du MJ de convention à partir de la 2e démonstration d'affilée. Contraint de placer sa voix afin de dominer le bruit ambiant, le MJ sollicite fortement ses cordes vocales, et la pastille au miel permet de soulager leur irritation.</p>
<h2>Présenter l'univers et les règles</h2>
<p>C'est vrai qu'il serait plaisant de pouvoir présenter l'univers et les règles de manière détaillée. Cependant, la partie est contrainte par le temps : 2 heures maximum ! Il n'est donc pas sérieux de prendre des heures pour présenter les querelles intestines des clans Tremere et Giovanni avant de commencer à jouer.
Le plus simple est encore de poser le décor via d’autres œuvres, en espérant que les joueurs les connaissent : "<em>- C’est un crossover entre Matrix et Pirates des Caraïbes, mais dans un univers façon Harry Potter, où vous jouez des zombies...</em>" - si l'univers est "grand public", ce sera probablement plus facile.</p>
<p>Si l'univers est trop atypique, il est envisageable d'engager l'immersion via une interaction avec un PNJ : "<em>- Comme vous le savez certainement, l'Hégémonie subit de plus en plus d'attaques de Pirates sur ses frontières. Ces attaques pourraient être financées par la Ligue Rouge, nos rivaux de toujours, mais nos informations nous laissent penser que des administrateurs de l'Hégémonie félons seraient les vrais responsables. Votre mission sera de vous rendre au comité de coordination des cités cultivatrices de varech mutant, et d'y démasquer les traîtres.</em>"</p>
<p>Si l'univers est trop riche et foisonnant, autant proposer une découverte progressive de l'univers. Ceci consiste à ne décrire que ce que les joueurs savent de leur environnement immédiat, en limitant les explications à ce qui est strictement nécessaire pour les joueurs, et en complétant progressivement les trous dans les savoirs des joueurs au fur et à mesure de la partie. Ceci constitue un gain de temps appréciable, et permet de ménager des temps morts explicatifs qui peuvent "reposer" les joueurs éprouvant des difficultés de concentration.</p>
<p>En ce qui concerne les règles, il serait idéal de pouvoir toutes les expliquer au début. Cependant, le temps est limité : conséquence, il est préférable de commencer à jouer tout de suite, et peu importe que les joueurs ignorent les subtilités des jets de dés. Dès que le joueur annoncera une action qui nécessite un jet de dé, le MJ lui dira : "<em>Fais un jet de Quantum + Macramé sous Charisme, s'il te plaît.</em>", comme si le joueur connaissait les règles, ceci afin de familiariser le joueur avec le jargon, puis de l'aider et lui expliquer comment réaliser son jet. Ainsi, les seules règles qui auront besoin d'être expliquées sont celles qui seront strictement et évidemment nécessaires dans le cadre de la partie.</p>
<h2>Méthode du donjon en 5 pièces</h2>
<p>Le <em><a href="https://www.roleplayingtips.com/rptn/rpt156-6-methods-making-dungeons-interesting/" hreflang="en">Donjon en 5 pièces</a></em> est une méthode de découpage en 5 scènes d'un "donjon" (une aventure quelconque, qui ne se passe pas forcément dans un donjon), inventée par Johnn Four. Cette méthode consiste à découper l'aventure en 5 scènes : 1. Entrée et gardien ; 2. Énigme ou intrigue ; 3. Tromperie ou revers ; 4. Grand final ; 5. Récompense, révélation, coup de théâtre.</p>
<p>Cette méthode est très adaptée à des parties de 2 heures. En affectant des durées prévisionnelles à chaque scène, on peut obtenir ceci :</p>
<ol>
<li>Entrée et gardien - 15 minutes</li>
<li>Énigme ou intrigue - 30 minutes</li>
<li>Tromperie ou revers - 40 minutes</li>
<li>Grand final - 20 minutes</li>
<li>Récompense, révélation, coup de théâtre - 15 minutes</li>
</ol>
<p>Ça fait 2 heures pile, ce qui est précisément la durée prescrite pour une partie de démonstration en salon !</p>
<p>Évidemment, d'<a href="http://ptgptb.fr/structure-pour-les-scenarios-de-convention" hreflang="fr">autres structures et découpages de scénarios sont bien entendu possibles pour tenir les délais contraints des parties de convention</a>.</p>
<h3>Comment exploiter l'aventure en 5 scènes afin de respecter ces impératifs de délais ?</h3>
<p>1. Entrée et gardien<br />
Il semble raisonnable de prévoir 5 minutes d'exposition / description de l'action, afin de laisser les joueurs entrer dans leurs personnages, faire connaissance par le roleplay, et de les laisser prendre la mesure de leurs capacités et des objectifs du scénario. Les PJ devraient pouvoir consacrer une dizaine de minutes à surmonter ce premier obstacle à l'accomplissement de leurs objectifs. Ceci leur permettra également d'apprendre et d'expérimenter en douceur les règles.</p>
<p>2. Énigme ou intrigue<br />
Il ne faut pas que les joueurs se dispersent, ni perdre de temps. Une fois la problématique de la scène posée ("<em>il faut traverser les pièges mortels pour s'emparer de l'idole des indiens Ovitos</em>", "<em>il faut persuader ce flic corrompu de nous donner le nom de son contact dans la mafia</em>"), un indice clair sur la manière de triompher de l'énigme, ou un levier de négociation potentiel pour intriguer efficacement devraient être fournis aux PJ dans les 5 minutes du début de cette scène.<br />
Au cours des 25 minutes suivantes, les joueurs devraient travailler à mettre efficacement en oeuvre cet indice ou ce levier.<br />
Il est très important de faire en sorte que l'énigme soit un test relevant du QI, accessible potentiellement à n'importe quel joueur donc PJ, plutôt qu'un test de connaissances qui ne serait accessible qu'à un public restreint ("- ah, désolé, il faut connaître l'héraldique pour comprendre tout le sel de cette énigme"), ou pire, au seul PJ ayant LA compétence qui va bien. L'intérêt en est de mettre en valeur le caractère universel du JdR, montrer que n'importe qui peut s'en sortir grâce à un peu d'ingéniosité, bref que c'est un loisir accessible à tous.<br />
En ce qui concerne l'intrigue, il est évidemment indispensable de récompenser l'effort de "<em>roleplay</em>" afin de motiver les joueurs à s'immerger encore plus dans la partie. Le résultat n'en sera que plus divertissant pour tous les participants de la table.</p>
<p>3. Tromperie ou revers<br />
Il est important là aussi que la découverte de la tromperie ou du revers inattendu (les PJ se sont trompés de personne / salle / cible, l'otage n'en est pas un, etc.) se produise dans 5 premières minutes de la scène, pour ensuite laisser une période relativement longue, 35 minutes donc plus du quart de la durée totale de la partie, pour permettre aux joueurs de trouver une nouvelle approche.<br />
C'est la substance même du JdR que de permettre aux joueurs d'élaborer leur propre solution à une situation imprévue, et c'est pour ça qu'il faut leur laisser du temps pour réfléchir et agir efficacement. Pour des joueurs débutants, c'est peut-être le meilleur moment de la partie, parce que c'est à ce moment-là qu'ils s'aperçoivent que le destin de leur personnage est vraiment entre leurs mains, et qu'ils peuvent entreprendre tout ce qu'ils peuvent imaginer.</p>
<p>4. Grand final<br />
Le grand final consiste habituellement à une épreuve (combat, diplomatie, cuisine au wok, etc.) contre le grand méchant. Il faut bien une vingtaine de minutes pour ce grand final, parce qu'il requiert de ne pas lésiner sur les descriptions afin de poser l'ambiance.
C'est aussi l'occasion pour le meneur d'"exploser le budget" en termes d'effets spéciaux et de figurants, façon superproduction hollywoodienne, et d'en mettre "plein la vue" aux joueurs.<br />
Cependant, il faut faire extrêmement attention à l'écoulement du temps : les descriptions longues du MJ sont autant de temps qui n'est pas exploitable pour les joueurs.
Idéalement, chaque personnage-joueur devrait avoir l'occasion d'accomplir quelque chose qui est dans ses cordes, qui le met en valeur, au cours de cette scène.</p>
<p>5. Récompense, révélation, coup de théâtre<br />
Cette scène de 15 minutes est utile pour lier l'aventure en 5 scènes avec l'aventure suivante. Cependant, elle est souvent superflue dans une partie de convention. On peut ainsi l'expédier en 2 phrases : "<em>... Et pour vous remercier d'avoir sauvé son fils, la reine vous offre à chacun un séjour de longue durée dans ses geôles : personne ne doit savoir ce qui s'est réellement passé dans l'antre de Vermithrax.</em>"<br />
L'intérêt d'avoir d'ores et déjà prévu un coup de théâtre final rapide à mettre en scène est, pour le MJ, de disposer d'une provision de temps supplémentaire en cas de dépassement des durées des scènes précédentes.<br />
Au contraire, si les scènes précédentes se sont déroulées rapidement et qu'il y a encore du temps disponible, le coup de théâtre final peut être joué entièrement plutôt que raconté, ou bien parallélisé avec la scène 4 ("<em>- Pendant que vous affrontez Vermithrax, un autre groupe d'aventuriers se barre avec son trésor !</em>", laissant encore une fois aux PJ l'opportunité de prendre leur destin en main et de renverser la situation, donnant une conclusion mémorable au scénario.</p>
<h2>Simplifier un scénario existant</h2>
<p>Tous les MJ n'ont pas la possibilité de créer un scénario de convention. Les MJ dans cette situation ont donc recours à des scénarios préexistants. Cependant, nombre de ceux-ci ne sont pas adaptés à des parties de démonstration en salon, et requièrent des adaptations pour les simplifier.<br />
Ces adaptations ne sont pas difficiles, mais requièrent d'être menées avec une certaine rigueur pour rendre le scénario jouable en moins de 2 heures.</p>
<h3>Inventorier les factions, leurs objectifs et les PNJ</h3>
<p>La première étape consiste à identifier le nombre de factions dans le scénario, et à en réduire le nombre à 2, et au maximum 3, sachant que les PJ sont eux-mêmes une faction.</p>
<p>La deuxième étape vise à s'assurer que les objectifs des factions sont simples et clairs. Chaque faction ne doit avoir qu'un seul objectif. Les objectifs divergents au sein d'une même faction constituent potentiellement un scénario à part entière - autant dire que ça ne rentrera pas dans les 2 heures imparties.</p>
<p>La troisième étape consiste à inventorier les PNJ, et à fusionner les PNJ équivalents. Les PNJ équivalents sont des PNJ qui appartiennent à la même faction et ont la même fonction. Par exemple, telle faction comporte un sergent et un lieutenant piorads. Ces deux PNJ seront fusionnés en "officier piorad" sans autre distinction.</p>
<h3>Hiérarchiser les scènes et dégager les scènes-clefs</h3>
<p>Toutes les scènes ne sont pas d'égale importance. Certaines scènes sont totalement superflues dans la partie, tandis que d'autres sont vitales pour l'avancée de l'intrigue.
Pour raccourcir la durée potentielle du scénario, il faut supprimer les scènes superflues pour se concentrer sur les scènes-clefs.</p>
<p>Le critère de hiérarchisation et de suppression est l'enjeu dramatique. Le MJ supprime progressivement les scènes du scénario par ordre croissant d'enjeu dramatique.</p>
<p>Ainsi, le combat contre les 3 kobolds dans la forêt n'est pas une scène a priori très importante (ce ne sont que trois kobolds dans la forêt).
Si le combat a pour objet de trouver un indice, son enjeu dramatique est moindre que si ce combat doit empêcher les kobolds de tuer le jeune marquis. Il est donc préférable de supprimer cette scène et de directement donner l'indice aux PJ le cas échéant.</p>
<p>De même, le duel de cuisine au wok contre Vermithrax le dragon est porteur d'enjeux dramatiques différents selon qu'il permet au dragon de savoir si les PJ sont dignes de son attention, ou selon qu'il pourrait sauver les habitants du royaume de la mort par une cuisson préservant toute leur saveur.
Dans ces hypothèses respectives, il est préférable de considérer que Vermithrax juge déjà les PJ dignes de son attention, et de jouer le duel dont l'enjeu est de savoir si Vermithrax va s'offrir un beau gueuleton de chair humaine.</p>
<p>Cette hiérarchisation faite, il est préférable de ne conserver que 4 à 5 scènes-clefs dans tout le scénario.</p>
<h3>Relier entre elles les scènes-clefs</h3>
<p>Une fois ces scènes à enjeux dramatiques forts identifiées, reste à vérifier que le scénario tourne encore. La manière de le faire est encore d'essayer de relier entre elles les différentes scènes-clefs, pour vérifier que "ça tourne", c'est-à-dire que les PJ peuvent logiquement passer de l'une à l'autre avec les informations dont ils disposent et leurs capacités.</p>
<p>À cet effet, tout schéma est valable !</p>
<p><a href="https://blog.xyrop.com/public/Gamemastering/Images/Simplifer_Scenario.png"><img src="https://blog.xyrop.com/public/Gamemastering/Images/Simplifer_Scenario.png" alt="" style="display:table; margin:0 auto;" title="Simplifier un scénario en enlevant les scènes superflues" /></a></p>
<p>Cet effort de simplification permet globalement de revenir sur une structure proche du "donjon en 5 pièces".</p>
<p>Si des scènes-clefs ne peuvent être reliées que de manière indirecte, il est possible de conserver les scènes intermédiaires mais de les éliminer rapidement de l'intrigue via des ellipses, ou des descriptions où les personnages-joueurs ne sont que passifs (i.e. comme des cinématiques de jeux vidéo). Il est cependant nécessaire :</p>
<ul>
<li>de ne pas abuser du procédé pour que les personnages-joueurs conservent leur liberté d'agir et d'influer sur la narration ;</li>
<li>de limiter le nombre et la durée de ces descriptions elliptiques pour, d'une part, ne pas ennuyer les joueurs, et d'autre part, ne pas dépenser trop de temps pour ces cinématiques qui n'ont pas d'autre intérêt que de permettre de passer à la scène-clef suivante.</li>
</ul>
<h3>Et pourquoi ne pas faire un THACO ?</h3>
<p>Évidemment, fidèle lecteur de ce blog, tu t'interroges : pourquoi ne pas compléter un THACO conformément à la <a href="https://blog.xyrop.com/index.php/post/2014/08/29/Strategic-Gamemastering-part-2">méthode de maîtrise stratégique</a> sur la base des <a href="https://blog.xyrop.com/index.php/post/From-RPG-theory-to-Gamemastering-Strategy">informations figurant sur les fiches de prétirés</a>, puis <a href="https://blog.xyrop.com/index.php/post/2015/09/02/Strategic-Gamemastering-part-3-Flags-THACO-PlotHooks">compléter le THACO avec les composants du scénario envisagé</a> ?</p>
<p>Bien entendu, faire un THACO est possible dans cette hypothèse puisque le MJ a déjà les personnages prétirés sous la main. Rien de plus simple que de les décomposer et d'exploiter leurs thématiques communes les plus saillantes. Pour autant, la méthode de maîtrise stratégique part du principe que les joueurs auront le temps d'explorer le background et d'essayer d'accomplir les objectifs de leurs personnages. Le niveau de contrainte temporelle des parties de démonstration est donc contradictoire avec les avantages de la maîtrise stratégique, car les joueurs n'auront pas le temps de cette mise en œuvre.</p>
<p>L'utilité du THACO dans cette hypothèse est d'aider à déterminer les thématiques qui sont les plus porteuses d'enjeux dramatiques dans le cadre de la narration du scénario préexistant, et ainsi d'identifier les scènes à mettre en exergue ou au contraire à éliminer (ou à réduire via des ellipses).</p>
<h2>Anticiper et gérer les scènes chronophages</h2>
<p>Même avec la meilleure des préparations, les parties peuvent quand même s'éterniser et dépasser le temps imparti. Voici une revue des causes les plus fréquentes de dépassement afin de les anticiper, ainsi que des conseils pour les gérer lorsqu'elles surviennent.</p>
<h3>Combat</h3>
<p>C'est la scène chronophage par excellence, et la cause n°1 de dépassement. Le combat est une succession d'actions très rapprochées dans le temps, avec des jets de dés souvent plus nombreux. La plupart des systèmes de jeu aboutissent à une sorte d'étirement du temps, qui font que les quelques secondes du combat sont gérées finalement bien plus lentement que le reste des actions de jeu.</p>
<p>Les pistes pour gérer cette cause de dépassement sont les suivantes :</p>
<ul>
<li>Résoudre les combats en 4 tours de jeu maximum. Par exemple en donnant <a href="https://blog.xyrop.com/index.php/post/paradoxe-PV">moins de points de vie aux PNJ (ou aux PJ)</a>, en considérant qu'un seul coup met hors de combat un figurant, ou encore en décidant que les PNJ se rendent ou fuient s'ils n'ont pas le dessus ;</li>
<li>Accélérer les tours de jeu selon <a href="https://blog.xyrop.com/index.php/post/2016/11/07/%5BTactique-de-ma%C3%AEtrise%5D-Les-trois-%C3%A9tats-du-joueur%2C-et-comment-les-exploiter">la tactique de maîtrise appropriée</a>, en donnant un temps d'action limité et en différant la description des conséquences des actions.</li>
</ul>
<h3>Séparation des joueurs</h3>
<p>C'est la cause n°2 de déperdition de temps dans un scénario. Les joueurs se séparant en plusieurs groupes (et parfois en groupes de un !), ils obligent le MJ à multiplier les descriptions.</p>
<p>Pour faire avancer l'intrigue rapidement malgré cette séparation, et ainsi mitiger l'impact chronophage de cette cause de dépassement, les pistes possibles sont les suivantes :</p>
<ul>
<li>maintenir les joueurs <a href="https://blog.xyrop.com/index.php/post/2016/11/07/%5BTactique-de-ma%C3%AEtrise%5D-Les-trois-%C3%A9tats-du-joueur%2C-et-comment-les-exploiter">dans un état de réactivité en conservant 2 des 3 unités temps / lieu / action</a> ;</li>
<li>paralléliser les scènes-clefs (par exemple "2. Enquête" et "3. Tromperie"), en faisant en sorte que chaque groupe s'occupe de l'une de ces scènes, puis rassembler les groupes sur la partie "4. Grand final".</li>
<li>ne pas oublier les moyens de communication entre PJ pour permettre à chaque groupe de PJ d'influer directement sur le déroulement de la scène de l'autre groupe.</li>
</ul>
<h3>Enlisement de l'enquête</h3>
<p>Il s'agit de la cause n°3 de déperdition de temps. Autant une enquête peut être passionnante et fait partie intégrante du plaisir du jeu, autant celle-ci finit parfois par s'enliser. Les joueurs finissent dans ce genre de cas par piétiner, ne plus trop savoir dans quelle direction chercher, voire même ne plus trop savoir ce qu'ils cherchent.</p>
<p>En cas d'enlisement de l'enquête, il est de la responsabilité du meneur de prendre des mesures pour la faire avancer :</p>
<ul>
<li>un PNJ pose les bonnes questions. Par exemple "<em>– Qu’en pense la femme de la victime ?" "– Zut, on a oublié de l'interroger !!!</em>" (authentique)</li>
<li>après deux recherches ratées (jets de dés foireux), la recherche suivante réussit toujours et permet à l'enquête d'avancer malgré le manque de chance des joueurs ;</li>
<li>préférer "non, mais" à "oui, mais" afin de fermer une fausse piste tout en ouvrant une bonne piste ;</li>
<li>éviter les quêtes annexes qui vont faire perdre du temps au groupe de joueurs sans faire avancer l'intrigue principale. C'est une partie de démonstration en salon, pas un jeu vidéo ! Si l'information ou l'objet utiles peuvent être obtenus d'un PNJ, il est préférable que le MJ considère qu'il suffit de persuader intelligemment le PNJ de les fournir, sans pour autant devoir d'abord collecter les 15 gemmes roses, tuer la marmotte enragée, remettre une missive importante ou escorter un marchand boiteux jusqu'à la ville proche.</li>
</ul>
<h3>Énigmes</h3>
<p>Causes n°4 de dépassement, les énigmes.<br />
Comme dit plus haut, elles devraient reposer sur le QI et le sens de l'observation des joueurs, et non leurs connaissances, afin de laisser une chance à chacun de briller et de faire avancer l'intrigue. Cependant, elles ne doivent pas aboutir à un blocage total du groupe des joueurs, sous peine de faire perdre du temps pour faire avancer l'intrigue.
En cas de blocage, il est donc préférable de prévoir (ou d'improviser) une alternative pour passer outre l'impossibilité de trouver la solution de l'énigme.
Par exemple : "<em>Faute de mot de passe, la porte ne s'ouvre pas. De dépit et de frustration, votre guide elfe laisse échapper un sanglot et frappe du poing le mur de métal. Chose curieuse, un éclat de peinture métallique tombe au sol là où ses jointures ont heurté le mur. Apparemment, une partie du mur n'est pas en métal, mais en petits rocs recouverts d'un calcaire friable puis peint pour lui donner une apparence de solidité. Il vous suffirait d'une pioche...</em>"</p>
<h2>Faire encore plus court : interruptions contrôlées</h2>
<p>Même avec une bonne préparation et ces conseils, il peut s'avérer impossible de prévoir une partie de moins de deux heures. Soyons lucides, certains jeux de rôle ne s'y prêtent tout simplement pas !</p>
<p>Dans cette hypothèse, le MJ peut envisager de placer une limite temporelle réelle au déroulement de la partie : une interruption contrôlée rendant totalement impossible le dépassement du temps imparti pour la démonstration.</p>
<p>Si le MJ fait ce choix, il lui faut être clair avant la partie auprès des joueurs de sa table, et leur expliquer que quel que soit l'endroit où ils seront rendus, dans pile 2 heures, la partie s'interrompra, que le scénario soit fini ou non.
Ceci limitera certes la mauvaise surprise qui consiste à interrompre la partie, mais n'enlèvera pas totalement la frustration de l'inachèvement aux joueurs.</p>
<h3>Début de campagne interrompu</h3>
<p>Cet expédient peut s'avérer indispensable pour des JdR qui, comme <a href="http://www.legrog.org/jeux/conspirations/over-the-edge-2eme-ed-en" hreflang="fr">Over the Edge</a> n'ont été conçus que pour être joués en campagne - et excluent quasiment par définition les scénarios "<em>one-shot</em>" typiques des conventions.</p>
<p>Dans cette hypothèse, pour mes parties de démonstration d'Over the Edge, j'ai pris le temps d'expliquer aux joueurs qu'ils joueraient un début de campagne, et qu'ils découvriraient certainement beaucoup du sel du jeu, mais que ce jeu étant conçu pour de la campagne, ils n'en verraient pas la fin.</p>
<p>Cette méthode est à utiliser avec beaucoup de modération, parce qu'il s'agit un petit peu d'une tricherie de la part du MJ qui aurait peut-être quand même pu imaginer un scénario one-shot. Avec le recul, je dirais que cette méthode n'est valable que si le JdR concerné ne permet <ins>vraiment pas</ins> le jeu en "<em>one-shot</em>", et que si le MJ est absolument <ins>certain à 200%</ins> que sa partie sera vraiment géniale.</p>
<h3>Partie en temps réel</h3>
<p>L'autre méthode pour contrôler la durée de la partie de démonstration est de fixer une limite en temps réel au scénario lui-même : par exemple, "<em>dans 2 heures, le virus se répandra dans l'atmosphère et l'Humanité sera annihilée. 1h59m56s... 55s...</em>".</p>
<p>Ceci rend matériellement impossible le dépassement du temps imparti, mais requiert du meneur de jeu qu'il soit en mesure d'équilibrer les séquences d'étirement du temps (i.e. de combats) avec les ellipses de déplacements et de recherches d'information. Il s'agit néanmoins d'un beau défi pour les joueurs, et qui les aiguillonnera pour faire de cette partie de convention une partie intense et mémorable.</p>https://blog.xyrop.com/post/2018/01/22/%5BTactique-de-ma%C3%AEtrise%5D-Mener-une-partie-de-2-heures-maximum-en-convention-ou-salon#comment-formhttps://blog.xyrop.com/feed/atom/comments/57[Stratégie de maîtrise] Strategic Gamemastering traduit sur PTGPTB !urn:md5:f153727383024bc90bc69ea9fb57dbdb2017-07-06T11:11:00+02:002020-05-10T17:11:03+02:00LudoxCreative agendagamemasteringGMGM ToolsJdRJeu de rôlemaîtrise stratégiquemaîtrisermener une partiemeneur de jeuMJPTGPTBStrategic gamemastering <p>L'équipe de Places To Go, People To Be a eu la bonté (et le courage) de traduire en français intelligible mon <a href="https://blog.xyrop.com/index.php/post/From-RPG-theory-to-Gamemastering-Strategy">premier billet de la série "Strategic Gamemastering"</a>. Qu'ils en soient loués et remerciés !</p>
<p>Voici le lien vers la traduction du billet :</p>
<p><strong>"<a href="http://ptgptb.fr/la-maitrise-de-jeu-strategique" hreflang="fr">La maîtrise de jeu stratégique</a>"</strong></p>
<p>Les billets suivants de la série "Strategic Gamemastering" sont accessibles via les liens ci-dessous :</p>
<ul>
<li><a href="https://blog.xyrop.com/index.php/post/2014/08/29/Strategic-Gamemastering-part-2" hreflang="en">Strategic Gamemastering, part 2: Data organization and exploitation through the THACO</a></li>
<li><a href="https://blog.xyrop.com/index.php/post/2015/09/02/Strategic-Gamemastering-part-3-Flags-THACO-PlotHooks" hreflang="en">Strategic Gamemastering, part 3: Flags, THACO, and plot hook writing practices</a></li>
</ul>https://blog.xyrop.com/post/%5BStrat%C3%A9gie-de-ma%C3%AEtrise%5D-Strategic-Gamemastering-traduit-sur-PTGPTB#comment-formhttps://blog.xyrop.com/feed/atom/comments/40[Tactique de maîtrise] Le placement du MJ à la table de jeuurn:md5:30781b15e865f10fc93d9f355cad1ccb2017-06-22T07:00:00+02:002020-05-10T17:15:08+02:00LudoxconseilsConventionInteractionsJeu de rôlemaîtrisermener une partiemeneur de jeuMJPratiquetactique de maîtrise<p>Lorsque la table où va se dérouler une partie de Jeu de rôle est rectangulaire ou elliptique, le meneur de jeu devrait-il se placer en bout de table, ou bien au milieu de la table ? Querelle des anciens et des modernes ? Junte menaçant de renverser le MJ et de le déposséder de son fauteuil de président ? C'est bien ce qu'il convient d'examiner.</p> <p>La plupart des MJ que j'ai pu rencontrer au cours de ma vie de rôliste se placent spontanément en bout de table, présidant la partie de jeu de rôle comme s'il s'agissait d'un conseil d'administration. Beaucoup de joueurs eux-mêmes se placent spontanément en réservant la "présidence" au meneur de jeu. Mais d'autres préconisent un placement sur le côté long de la table.</p>
<p>Quelles en sont les avantages et inconvénients ?</p>
<h3>En bout de table</h3>
<p>La traditionnelle position en bout de table a pour avantage de protéger un tant soit peu de la vue des joueurs les sacro-saintes "notes" (pour les anciens) ou désormais (pour les modernes) l'écran de l'ordinateur portable ou de la tablette.
De fait, les écrans de jeu (que d'aucuns, sans doute habitués à jouer en extérieur, désignent sous le terme "paravent") sont plutôt conçus pour les extrémités de table.
Autre avantage de la position en bout de table : les joueurs éloignés du MJ peuvent plus facilement organiser leurs apartés et dialogues sans gêner les joueurs les plus proches du MJ.</p>
<p>Le bout de la table présente les inconvénients suivants par rapport au milieu de table, à savoir :</p>
<ul>
<li>une distance inégale entre MJ et joueurs, faisant varier le volume sonore auquel des joueurs différents peuvent interagir avec le MJ. Pour être entendu clairement de tous, le MJ doit parler au joueur le plus éloigné ;</li>
<li>une distance importante entre le MJ et le joueur le plus éloigné physiquement, ce qui est un inconvénient important et auquel il est difficile de remédier quand le cadre de jeu est bruyant, et qui, même dans un cadre calme, rend compliquées les interactions "en murmures" ;</li>
<li>le fait que les joueurs les plus proches du MJ bénéficient naturellement d'un avantage pour se faire écouter, et peuvent bien malgré eux parasiter la vue ou l'ouïe des joueurs situés derrière eux - les joueurs du fond pouvant par exemple manquer des détails de la gestuelle du MJ lorsqu'il interprète un PNJ.</li>
</ul>
<h3>En milieu de table</h3>
<p>La comparaison des distances d'interaction entre MJ et joueurs pour les deux options, en prenant une table rectangulaire de dimensions 2x1 donne le résultat suivant :</p>
<p><a href="https://blog.xyrop.com/public/Gamemastering/Images/Tables2.png"><img src="https://blog.xyrop.com/public/Gamemastering/Images/Tables2.png" alt="" style="display:table; margin:0 auto;" /></a></p>
<p>Il est aisé de constater que le placement au milieu du côté long de la table a pour avantage à la fois de <ins>réduire</ins> et d'<ins>égaliser</ins> la distance d'interaction entre MJ et joueurs.</p>
<ul>
<li>Les joueurs étant répartis autour du meneur de jeu, ceux-ci bénéficient d'une distance d'interaction qui varie peu et est en outre inférieure à la distance maximale dans le cas d'un MJ en bout de table ;</li>
<li>Le MJ a globalement moins d'efforts à faire pour se faire entendre des joueurs les plus éloignés. Il peut s'adresser à ceux-ci et ceux-ci peuvent lui répondre avec un volume sonore inférieur à celui du "MJ de bout de table" : tous les participants économisent leur voix, tout en entendant mieux le MJ - ce qui est en outre un avantage déterminant si la partie se déroule dans un environnement bruyant (convention, club, etc.).</li>
</ul>
<p>Mais ce placement a en outre d'autres avantages :</p>
<ul>
<li>le MJ a plus de place en largeur pour disposer son matériel, et peut plus facilement accéder au centre de la table (pour modifier une carte, poser un accessoire, etc.) ;</li>
<li>les joueurs peuvent tous voir les gestuelles du MJ sans se gêner les uns les autres ;</li>
<li><a href="https://blog.xyrop.com/index.php/post/Illustration-musicale-en-JdR">Si le MJ illustre musicalement ses parties</a>, il peut plus facilement garder la source de musique près de lui (et ainsi la contrôler de manière plus pratique) tout en s'assurant que la plupart de ses joueurs en sont équidistants.</li>
</ul>
<p>Les inconvénients du placement sur le côté long de la table sont les suivants :</p>
<ul>
<li>La répartition des joueurs dans un angle plus large requiert que le MJ sache tourner sa tête et son corps pour ne pas exclure les joueurs aux extrémités de la table. Pour interagir spécifiquement avec un joueur à son côté, le MJ devra prendre garde à se reculer légèrement de la table afin de ne pas exclure les autres joueurs de son interaction ;</li>
<li>L'écran de jeu est moins efficace pour soustraire les notes aux regards du joueur situé juste à côté du MJ ;</li>
<li>les joueurs situés aux extrémités de la table sont relativement éloignés l'un de l'autre ce qui peut limiter en partie leurs interactions (mais pas plus que ne l'est le MJ en bout de table du joueur à l'autre extrémité).</li>
</ul>
<h2>Conclusion</h2>
<p>La position "en milieu de table" présente des avantages plus nombreux, notamment dans la facilitation des interactions orales, que ceux de la position "en bout de table", avec des inconvénients auxquels il est également facile de remédier.</p>
<p><em><strong>La position "en milieu de table" correspond donc, selon moi, à l'état de l'art actuel de la maîtrise de parties de Jeu de Rôle dans une situation nominale.</strong></em></p>
<p>La position "en bout de table" devrait donc demeurer réservée à des cas bien particuliers, une configuration où les deux critères suivants sont cumulativement réunis :</p>
<ul>
<li>il est absolument impératif que le MJ préside ;</li>
<li>l'environnement de la partie est parfaitement calme et silencieux.</li>
</ul>https://blog.xyrop.com/post/2017/06/19/Placement-MJ#comment-formhttps://blog.xyrop.com/feed/atom/comments/63[Tactique de maîtrise] Le paradoxe des Points de Vieurn:md5:08368ed52354841b84d05f6044d328e92017-02-13T11:45:00+01:002020-05-10T17:18:09+02:00LudoxconseilsJdRJeu de rôlemaîtrisermener une partiemeneur de jeuMJpoints de viePVtactique de maîtrise<p>Ce billet est présente une réflexion sur la notion de points de vie (et de niveaux de vie) d'un personnage, et sur l'exploitation de ceux-ci dans les jeux de rôle.<br />
Il se clôt par la présentation d'une manière différente d'appréhender la gestion des chances de survie des personnages dans le cadre d'une partie de jeu de rôle.</p> <h2>Les mécaniques de points de vie</h2>
<p>D'après Gary Gygax, père du loisir qu'est le jeu de rôle, les points de vie (PV) représentent dans leur partie moindre la résistance physique innée du personnage et pour l'essentiel représentent sa "bonne étoile", sa faculté d'encaisser les coups accrue à raison de son aguerrissement, ou encore sa chance d'éviter que chacun de ses combats ne se révèle le dernier.<br />
Il explique l'accumulation progressive des PV avec l'augmentation du niveau de personnage comme la chance ou la grâce divine, ainsi que la capacité accrue du personnage expérimenté à détourner le coup potentiellement fatal qui aurait achevé un personnage de niveau moindre.<br />
Ce n'est alors que quand l'attrition des PV d'un personnage est trop importante, que sa chance tourne court, qu'il risque réellement de mourir.<br /></p>
<p>Reste que cette interprétation de l'accroissement des points de vie soulève un certain nombre de questions critiques :<br /></p>
<ul>
<li>dans ce type de jeu, à moins de mettre en place une mécanique supplémentaire (ex. <a href="http://www.legrog.org/jeux/conspirations/over-the-edge-2eme-ed-en" hreflang="fr">Over the Edge</a>), un personnage auquel il ne reste plus qu'1 point de vie est aussi frais en termes de capacité d'action qu'un personnage indemne ;</li>
<li>pourquoi, si les PV sont une manière de définir avant tout la chance, la grâce divine ou la capacité à éviter les coups, est-ce que leur total (sans compter leur récupération) est si fortement calqué, dans nombre de jeux, sur la seule constitution physique du personnage ?</li>
<li>comment articuler la capacité à dévier un coup fatal avec les armures ?</li>
<li>si les PV représentent essentiellement la grâce divine, un personnage pieux ne devrait-il pas disposer de plus de points de vie qu'un personnage impie ?</li>
<li>si les PV représentent essentiellement "la chance de s'en sortir", un personnage débrouillard ne devrait-il pas avoir plus de points de vie qu'un personnage moins dégourdi ?</li>
<li>si les PV représentent essentiellement l'intelligence du combat et l'agilité accrue permettant de transformer des coups mortels en égratignures, un personnage plus intelligent et plus agile ne devrait-il pas avoir plus de points de vie qu'un personnage bête et lourdaud ?</li>
</ul>
<p>Pour résoudre ces difficultés apparentes, des solutions mécaniques ont été développées, pour augmenter de manière générale la dangerosité de chaque combat dans l'espoir de redonner un enjeu narratif aux conflits armés contre le premier kobold / quidam venu, tout en préservant l'esprit du jeu (et donc le fait que les personnages risquent leur vie à chaque combat ou non selon l'ambiance voulue).<br /></p>
<p>Dans les jeux où la mort est omniprésente et où l'héroïsme implique souvent un risque extrême :<br /></p>
<ul>
<li>mettre un total de PV faible et qui n'évolue que peu (ex. <a href="http://www.legrog.org/jeux/appel-de-cthulhu/appel-de-cthulhu-6eme-ed-fr" hreflang="fr">l'Appel de Cthulhu</a>) ;</li>
<li>permettre qu'un personnage puisse mourir d'une blessure grave alors qu'il lui reste des PV (ex. <a href="http://www.legrog.org/jeux/aces-eights" hreflang="fr">Aces & Eights : Shattered Frontier</a>, <a href="http://www.legrog.org/jeux/hackmaster/5th-edition/hackmaster-basic-en" hreflang="fr">Hackmaster 5th edition</a>) ;</li>
<li>prévoir que les armes causent des pertes de PV extrêmement importantes par rapport au total de PV des personnages (ex. <a href="http://www.legrog.org/jeux/paranoia" hreflang="fr">Paranoïa</a>) ;</li>
<li>considérer que l'aléa important des dégâts d'armes s'explique par le fait que les dégâts infligés peuvent correspondre aux blessures que le personnage attaqué s'est lui-même infligées en évitant ou bloquant tant bien que mal le coup (ex. <a href="http://www.legrog.org/jeux/conspirations/over-the-edge-2eme-ed-en" hreflang="fr">Over the Edge</a>) ;</li>
<li>remplacer les PV par des niveaux de vie avec des effets particuliers limitant les capacités du personnage lorsque ses blessures sont trop importantes (ex. <a href="http://www.legrog.org/jeux/vampire-la-mascarade" hreflang="fr">Vampire</a>).</li>
</ul>
<p>Dans les jeux qui requièrent que les personnages aient une chance de survie afin d'inciter les joueurs à "faire agir leur personnage de manière héroïque", mais ne risquer qu'en apparence la vie de leur personnage puisque ces joueurs disposent de mécaniques de jeu propres à leur permettre d'éviter la mort de leur personnage :<br /></p>
<ul>
<li>distinguer l'encaissement des blessures proprement dites de la capacité de les éviter avec deux jauges distinctes (ex. <a href="http://www.legrog.org/jeux/star-wars-d20" hreflang="fr">Star Wars d20</a>, <a href="http://www.legrog.org/jeux/spycraft" hreflang="fr">SpyCraft</a>, <a href="http://www.legrog.org/jeux/fantasy-craft" hreflang="fr">FantasyCraft</a>) ;</li>
<li>remplacer les PV par une accumulation de désavantages ou "stress" au lieu d'une attrition (ex. <a href="http://www.legrog.org/systemes/cortex-plus" hreflang="fr">Cortex Plus</a>) ;</li>
<li>ajouter des moyens pratiques de regagner des points de vie, via les sorts / potions de soin / trousses médicales / cuves bacta / trop grande bonté du meneur, via le "second souffle" (ex. <a href="http://www.legrog.org/jeux/d-d4-dungeons-and-dragons-quatrieme-edition" hreflang="fr">D&D 4e édition</a>) ;</li>
<li>contrebalancer la relative vulnérabilité des personnages par des points d'intrigue (ex. <a href="http://www.legrog.org/jeux/buffy-the-vampire-slayer" hreflang="fr">Buffy Unisystem</a>, <a href="http://www.legrog.org/systemes/cortex-plus" hreflang="fr">Cortex Plus</a>), de destin (ex. <a href="http://www.legrog.org/jeux/warhammer/warhammer-2eme-edition/warhammer-2eme-ed-2eme-imp-fr-51337" hreflang="fr">Warhammer</a>), d'héroïsme (ex. certaines options de jeu dans <a href="http://www.legrog.org/jeux/pathfinder" hreflang="fr">Pathfinder</a>) qui permettent au personnage de "tromper la mort".</li>
</ul>
<p>En pratique, tous ces mécanismes sont d'autres manières de calculer ou d'exprimer l'attrition progressive des chances de survie du personnage, jusqu'à ce qu'il meure, parce qu'il :<br /></p>
<ul>
<li>a trop de blessures ;</li>
<li>est trop désavantagé ;</li>
<li>n'a plus de niveaux de vie disponibles ;</li>
<li>a bu toutes les potions de soins / utilisé tous ses sorts de guérison / vidé la trousse de secours militaire / a abusé de la bonté du meneur ;</li>
<li>a déjà dépensé tous ses points d'intrigue / de destin / d'héroïsme.</li>
</ul>
<p>En pratique, plus ça change, plus ça reste pareil.<br /></p>
<h2>Conséquences des mécanismes usuels</h2>
<p>Conséquence fréquente des mécanismes les plus répandus de gestion des points de vie : au début de la partie, les joueurs jouent leurs personnages comme des héros inconscients, qui se suspendant aux chandeliers, qui sautant de toit en toit, qui se jetant sur le côté en vidant les chargeurs de ses Colts 45. Pourquoi ne le feraient-ils pas, d'ailleurs ? En pratique, ils se savent invulnérables... du moins jusqu'à ce que leurs points de vie leur fassent défaut...<br /></p>
<p>Effet pervers : c'est précisément au moment du combat final contre le grand méchant, alors que les personnages ont toutes les raisons de vouloir se dépasser, que l'attrition de leurs PV est probablement la plus importante.<br />
Résultat : les joueurs réfléchissent à deux fois avant de sauter sur la tête de Vermithrax le dragon rouge, parce que : "<em>- Bon, c'est haut quand même, et puis il ne me reste que 8 points de vie, et j'ai très peu dans la compétence Acrobaties.</em>"<br /></p>
<p>Si le joueur continue de jouer son personnage comme un héros, continuant de prendre des risques considérables "sans filet" alors que l'attrition de ses chances de survie est presque complète, il est rare que les mécanismes du jeu le récompensent pour cette prise de risque : habituellement, c'est le meneur de jeu qui va lui donner un petit coup de pouce, pour l'encourager, pour pallier cette lacune.<br /></p>
<p>Même en dehors de toute situation extrême, la simple rixe avinée dans une ruelle sordide devient alors "une question de vie ou de mort" pour le personnage, l'importance narrative de ladite situation se trouvant en total décalage par rapport à l'importance narrative du personnage lui-même tel que représenté par son total maximum théorique de PV.<br /></p>
<p>Cette situation fait évidemment fortement réfléchir sur la notion même de jauges de santé / niveaux de vie / points de vie. Si le meneur de jeu est régulièrement contraint d'intervenir pour rééquilibrer les points de vie par rapport à la narration, est-ce que la conception usuelle des points de vie sert vraiment l'histoire interactive en train d'être créée ? Est-ce que les mécanismes des points de vie servent réellement l'intérêt de la partie ?<br /></p>
<h2>Une autre conception des points de vie</h2>
<p>D'autres concepteurs de jeu ont mené leur propre réflexion sur la nature des points de vie, pour leur affecter une fonction de régulation de la narration. Pour citer deux exemples, les points de vie ont été interprétés comme une faculté d'agir :<br /></p>
<ul>
<li>dans <em><strong><a href="http://www.legrog.org/jeux/heroquest/heroquest-2eme-ed-en" hreflang="fr">Hero Quest</a></strong></em>, où plus les personnages ont de PV, et plus ils peuvent accomplir de choses à leur tour de jeu ;</li>
</ul>
<ul>
<li>dans <em><strong><a href="http://www.legrog.org/jeux/extreme-vengeance/extreme-vengeance-en" hreflang="fr">Extreme Vengeance</a></strong></em> ou plus récemment <em><a href="http://zapti.free.fr/pirates/" hreflang="fr">Pirates !</a></em>, où un personnage ayant reçu trop de blessures ne peut plus agir jusqu'à la scène suivante.<br /></li>
</ul>
<p>Ces conceptions rapprochent donc les points de vie d'une "faculté d'action narrative", puisque le personnage est le véhicule par lequel le joueur va agir sur l'histoire et altérer son déroulement.<br /></p>
<h2>Ce que sont réellement les PV</h2>
<p>L'existence de conceptions aussi disparates des PV et de mécanismes aussi différents ne peuvent que conduire à s'interroger sur la véritable fonction des PV : <strong> en vrai, les PV, à quoi ça sert ?</strong><br /></p>
<p>Il ne faut pas être grand clerc pour s'apercevoir que les PV servent d'abord à satisfaire <strong>le joueur</strong> : il faut qu'il ait le temps de s'amuser avec son personnage, d'avoir une influence sur le déroulement de la partie via celui-ci.<br /></p>
<p>La mécanique des PV évite que le personnage ne meure de l'infection d'une griffure de chat, d'un panaris mal soigné, ou d'un coup de poing d'Eudes sur le nez. Sans cela, le joueur pourrait concevoir déception ou frustration en perdant son personnage dans une situation qui ne serait pas à la hauteur de l'importance narrative de ce personnage telle que perçue par les participants de la partie.<br /></p>
<p>Les mécanismes de PV permettent ainsi au personnage d'être à la hauteur des enjeux narratifs des scènes les plus importantes, et d'avoir une chance de s'en tirer.<br /></p>
<p>C'est à cette préoccupation d'éviter au joueur soit que son personnage n'ait pas d'importance narrative, soit qu'il n'ait pas le temps de donner cette importance à son personnage afin de lui permettre de répondre aux enjeux de l'intrigue, que répondent les inventions des "points d'héroïsme" et des PV comme "faculté d'agir dans une scène".<br /></p>
<p>Partant de ces conceptions, les PV aboutissent à un triple paradoxe :<br /></p>
<ul>
<li>quand les règles du jeu proposent peu de PV, ni la forte implication du personnage dans l'intrigue, ni l'investissement du joueur dans la partie ou l'interprétation de son personnage n'ont d'impact positif sur la survie de ce personnage ;</li>
</ul>
<ul>
<li>quand les règles du jeu proposent beaucoup de PV, ni l'absence d'implication du personnage dans l'intrigue, ni le faible investissement du joueur dans la partie n'ont d'impact négatif sur la survie de ce personnage ;</li>
</ul>
<ul>
<li>quand les règles du jeu font des PV une capacité d'action, le personnage ne peut plus mourir quelle que soit la situation - privant le joueur de la sensation du danger de perdre son personnage dans une situation dont les enjeux narratifs sont à sa hauteur.<br /></li>
</ul>
<p>Ce triple paradoxe survient à raison de la décorrélation entre, d'une part, l'implication dans l'intrigue du personnage, l'importance narrative des enjeux auxquels il est confronté, et d'autre part ses chances de survie à des situations dangereuses.<br /></p>
<p>Il suffit de le constater pour que la solution à ce triple paradoxe apparaisse d'elle-même :<br />
<strong>Recréer, dans les mécaniques des règles elles-mêmes, la corrélation entre l'importance du personnage pour l'intrigue et ses chances de survie.</strong><br /></p>
<h2>Créer la corrélation entre implication narrative et survie</h2>
<p>Il y a probablement autant de manières de le faire que d'auteurs de jeu de rôle et de meneurs de jeu.<br /></p>
<p>Le cœur de la question est cependant très simple : si tout l'enjeu des points de vie est de simuler le seuil d'importance narrative du personnage, pourquoi ne pas directement considérer cette notion comme telle ? Oublier les points de vie, et clairement noter sur la fiche du personnage une jauge destinée à mesurer son seuil d'importance narrative ?<br /></p>
<p>Reste à déterminer la valeur d'une telle jauge.<br /></p>
<p>Une manière simple de le faire est de se poser les questions suivantes : est-ce que les arcs narratifs dans lesquels ce personnage intervient sont intéressants, voire captivants pour les participants de la partie ? Est-ce que ce serait dommage que la mort de ce personnage empêche de dénouer l'écheveau de certaines intrigues en cours ?<br /></p>
<p>Si la réponse est oui, alors ce personnage ne devrait pas pouvoir mourir.<br /></p>
<p>Si la réponse est non, alors ce personnage devrait au contraire être en danger de mort.<br /></p>
<p>Ainsi, il est possible de concevoir une règle mécanique permettant de répondre à ces questions : en effet, les seuls spectateurs en mesure de juger de l'importance narrative, de la richesse des intrigues, sont les participants à la partie, c'est-à-dire les autres joueurs et le meneur de jeu.<br /></p>
<p>Afin d'encourager les joueurs à s'emparer de l'intrigue via leurs personnages, pourquoi ne pas les faire tous voter, à la fin de chaque partie, sur les personnages les plus impliqués dans la narration et/ou dont les arcs narratifs leur semblent les plus intéressants ?<br /></p>
<p>Le résultat de ce vote permettrait de déterminer un seuil d'importance scénaristique pour chaque personnage, qui bénéficierait alors d'une "<em>immunité scénaristique à la mort</em>" pour toutes les scènes ou situations dont le péril serait en deçà de ce seuil d'importance scénaristique, et risquerait de mourir dans les scènes dont le péril serait au-delà de ce seuil.<br /></p>
<p>Le personnage le plus intéressant du groupe pourrait tout simplement être immune à la mort pour la prochaine partie.<br /></p>
<p>Pour éviter la confiscation de cette immunité scénaristique par un joueur, et diminuer la compétition entre joueurs, des mécanismes supplémentaires pourraient être envisageables, comme par exemple le fait qu'aucun personnage-joueur ne puisse bénéficier deux fois de suite du même seuil d'importance scénaristique, ou bien que chaque arc d'intrigue partagé entre plusieurs joueurs leur accorde un seuil d'importance scénaristique plus élevé.<br /></p>
<p>D'autres mécaniques sont certainement possibles, par exemple le fait que les points de la jauge "seuil d'importance scénaristique" puissent être dépensés pour altérer l'intrigue ou sauver le personnage, ou encore acquis via des prises de risques réussies.<br /></p>https://blog.xyrop.com/post/paradoxe-PV#comment-formhttps://blog.xyrop.com/feed/atom/comments/64[Tactique de maîtrise] Les trois états du joueururn:md5:c68bd35dc167ad5e192c7fc819fba1252016-12-29T15:33:00+01:002020-05-10T17:21:34+02:00LudoxAide de jeuconseilsGamemasteringJdRJeu de rôlemaîtrisermener une partiemeneur de jeuMJTactical gamemasteringtactique de maîtrise<p>Actif, Réactif, ou Inactif. A chaque instant dans une partie de jeu de rôle, un joueur donné se trouve dans l'un de ces trois états de réceptivité au déroulement de la partie. Le présent billet a pour but de vous éclairer quant à ces états, leurs conséquences sur la manière de maîtriser une partie de jeu de rôle, et les techniques qui permettent de maintenir le plus longtemps possible les joueurs dans un état de réceptivité accru.</p> <p>L'interprétation de leur personnage-joueur et la mise en œuvre des règles sont les principaux vecteurs via lesquels les joueurs vont influer sur le déroulement de l'intrigue d'une partie de jeu de rôle.<br /></p>
<p>Les notions d'Actif, Réactif ou Inactif représentent l'état psychologique du joueur (la personne physique, et non le personnage) par rapport aux événements qui sont en train de se produire dans l'espace partagé imaginaire de la partie. Ces états s'articulent précisément avec l'influence créative que le joueur, via ses propres descriptions ou bien via les règles, est ou non en train d'exercer sur le déroulement de la partie.<br /></p>
<p><a href="https://blog.xyrop.com/public/Gamemastering/Images/3States/3States1.png"><img src="https://blog.xyrop.com/public/Gamemastering/Images/3States/.3States1_m.png" alt="" style="display:table; margin:0 auto;" title="Représentation des trois états (et du meneur" />)</a></p>
<h3>Actif</h3>
<p>Un joueur est dans un état <ins>actif</ins> lorsque la narration est focalisée sur son personnage. Le joueur actif est en train de parler, décrire ou interpréter son personnage ou ses actions, lancer les dés, calculer des dégâts, ou encore écouter une description faite par le meneur des conséquences de ses propres décisions.<br />
L'état Actif correspond donc peu ou prou à l'exercice effectif de son temps de parole par un joueur.<br />
Comme le jeu de rôle est pour l'essentiel un jeu de dialogue, où les participants ne parlent et n'agissent pas simultanément (en tant que joueurs), un seul et unique joueur à la fois peut se trouver "sous le feu des projecteurs".<br />
Par ricochet, cela signifie que si l'un des joueurs est actif, aucun des autres joueurs ne l'est simultanément : tous les autres joueurs sont donc soit réactifs, soit inactifs.<br />
Citation typique : "<em>Messieurs, par pudeur, reculez devant un tel outrage : Tybalt ! Mercutio ! Le prince a expressément interdit les rixes dans les rues de Vérone.</em>"<br /></p>
<h3>Réactif</h3>
<p>Un joueur est dans un état <ins>réactif</ins> lorsqu'il se tient prêt à intervenir dans la narration. Le joueur est très attentif à ce qui est en train de se passer dans la partie, et se trouve en "écoute active". Il se prépare à décrire les actions ou interpréter les paroles de son personnage en réaction à la situation, à interrompre une description faite par le meneur ou un autre joueur. Dans des jeux à "tour d'initiative", c'est bientôt à lui. Il n'est pas "sous le feu des projecteurs", mais peut ou va le devenir à tout moment.<br />
Pour autant, le joueur réactif est tout aussi investi dans la partie que le joueur actif : il doit rester concentré pour intervenir à bon escient, anticiper les paroles, faits et gestes des autres personnages-joueurs pour gérer les risques et maîtriser les conséquences.<br />
Citation typique : (interrompant le dialogue entre meneur et le joueur actif) "<em>J'ÉCLATE TYBALT D'UN COUP D'ARBALÈTE +3 !</em>"<br /></p>
<h3>Inactif</h3>
<p>Un joueur est dans un état <ins>inactif</ins> lorsqu'il n'est pas attentif au déroulement de la partie. Il a "décroché" et ne s'intéresse pas à ce qui est en train de se produire dans l'espace partagé imaginaire. Il ne se prépare pas à intervenir via son personnage ou les règles.<br /> Souvent, il est en train de lire les règles, une BD, ses e-mails, jouer sur son smartphone, ou s'assoupir. Il n'est pas "dans la partie", et il y a de bonnes chances que ce qui est en train de produire dans la partie l'ennuie, puisqu'il ne se sent manifestement pas concerné par ce qui est en train de se dérouler pour les autres joueurs.<br />
Lorsque c'est son tour de devenir actif, il est le plus souvent contraint de prendre quelques secondes (voire plus) pour se faire réexpliquer le contexte et pouvoir à nouveau "rentrer" dans la narration.<br />
C'est également ici que l'on comprend le vrai problème du téléphone mobile - lorsqu'un joueur répond à un message ou à un appel sur son téléphone mobile, il bascule instantanément vers l'état inactif, avec toutes les conséquences immédiatement délétères pour son immersion dans la partie.<br />
Citation typique : "<em>Attends, j'comprends pas, on est où, là ? C'est qui, le mec que tu veux éclater, déjà ?</em>"<br /></p>
<h2>Les délais de bascule</h2>
<p>Au cours de la partie, chaque joueur passe successivement de l'un de ces états à un autre, à tour de rôle.<br /></p>
<p>Cette bascule de chaque état vers le suivant est naturelle. Après que le meneur de jeu soit passé au joueur suivant, le joueur jusqu'ici actif va basculer vers l'état réactif car ce n'est plus à lui d'être sous les feux de la rampe.<br /></p>
<p>Le délai avant cette bascule de l'état actif à l'état réactif est d'environ 2 à 3 secondes, le temps que le joueur prenne la mesure de l'action qu'il vient d'entreprendre et s'aperçoive qu'il n'est plus "le héros de l'histoire" pour le moment.<br /></p>
<p>Devenu réactif, le joueur va rester concentré sur la situation pendant une poignée de secondes, focalisé sur l'influence de ses derniers faits et gestes sur la situation des autres joueurs et le déroulement de l'intrigue, prêt à rebondir sur ses propres actes et paroles et y apporter des précisions si nécessaire.<br />
En moyenne, le temps de concentration d'un joueur réactif est de 30 secondes. Certains joueurs sont plus attentifs, d'autres moins : cette durée variera selon les personnes et selon les situations en jeu (notamment si les "unités" sont maintenues : voir ci-après la section sur la règle des trois unités).<br /></p>
<p>À l'issue de cette période de réactivité, le joueur va basculer vers l'état inactif, pour une durée indéterminée, jusqu'à ce que ce soit de nouveau son tour de devenir actif.<br /></p>
<p>Schématiquement, le cycle de parole et de changement d'état fonctionne comme suit :<br /></p>
<p><a href="https://blog.xyrop.com/public/Gamemastering/Images/3States/3States_ingame.png"><img src="https://blog.xyrop.com/public/Gamemastering/Images/3States/.3States_ingame_m.png" alt="" style="display:table; margin:0 auto;" title="Les trois états dans une partie de jeu de rôle" /></a></p>
<h2>Les enjeux des trois états</h2>
<p>Tout l'intérêt de connaître et de comprendre ces trois états est d'optimiser le plaisir et le niveau de divertissement des joueurs.<br />
En effet, le temps d'une partie de jeu de rôle étant par nature limité, le temps de parole de chaque joueur est limité également. Plus il y a de joueurs, et plus ce temps de parole devra être divisé entre les participants. Si les joueurs se divisent en plusieurs groupes, le meneur de jeu devra également diviser ses descriptions en fonction de chaque groupe, aboutissant à diminuer encore le temps de parole effectif des joueurs.<br /></p>
<p>Forcément, chaque joueur a donc un intérêt à parler et agir le plus souvent possible, et que ces périodes soient les plus longues possibles. Ainsi, alors que le jeu de rôle est en temps normal coopératif entre les personnages-joueurs, les joueurs eux-mêmes sont en compétition les uns avec les autres, sinon pour interpréter le héros de la partie, du moins pour se sentir valorisés dans leurs paroles, décisions et actions.<br />
Les joueurs veulent se sentir actifs, apprécient de rester réactifs, et tolèrent mal de demeurer inactifs.<br /></p>
<p>L'objectif du meneur de jeu, selon toute vraisemblance, consistant à se divertir tout en divertissant tous les joueurs, le moyen de l'accomplir implique nécessairement de maintenir le plus longtemps possible chaque joueur dans un état d'investissement accru dans la partie, à savoir un état actif ou à défaut réactif.<br /></p>
<p>Or, comme un seul joueur peut se trouver actif à chaque instant de la partie, le meneur de jeu doit trouver un expédient pratique pour que tous les autres joueurs restent dans un état réactif et ne basculent jamais à l'état inactif.<br /></p>
<p>Les deux voies sont <ins>l'accélération du tour de jeu</ins>, et <ins>la règle des trois unités</ins>.</p>
<h2>Accélération du tour de jeu</h2>
<p>La première voie est la plus naturelle et la plus évidente à mettre en œuvre.<br /></p>
<p>Elle consiste à passer très vite d'un joueur à l'autre afin de les faire intervenir le plus souvent possible, de manière à revenir à chaque joueur en 33 secondes (cette durée est celle constatée par l'auteur comme constituant la durée moyenne de concentration d'un joueur non actif - cette durée varie selon les personnalités et facultés des individus, leur forme, leur état de santé ou de fatigue, etc.).<br /></p>
<p>Or, un échange entre un joueur et un meneur de jeu requiert environ 10 à 15 secondes, si ce n'est plus avec certains joueurs indécis. À 4 joueurs et un meneur, ce dernier devra impérativement s'assurer que chaque interaction avec un joueur dure au maximum 11 secondes, chronomètre en main. A 5 joueurs et un meneur, les interactions ne doivent pas dépasser 8 secondes !<br /></p>
<p>Par conséquent, cette tactique est souvent moins efficace dès que les joueurs sont 4. À 5 joueurs et plus, elle devient impraticable.<br /></p>
<p>Même à trois joueurs, cette tactique implique une discipline extrêmement rigoureuse pour le meneur de jeu, tandis que les joueurs doivent être en mesure de penser, réagir, décider, et énoncer leur action de manière très rapide. Les meneurs de jeu imposant un tel rythme aboutissent à des parties extrêmement intenses mais également éprouvantes en termes d'énergie pour eux-mêmes comme pour les joueurs.<br /></p>
<p>Il est donc difficile pour ne pas dire déraisonnable de maintenir une telle vitesse de tours de jeu sur toute la durée d'une partie.<br />
Généralement, le meneur tacticien préférera imposer ces accélérations lorsque les événements de l'espace partagé imaginaire ne permettent pas aux personnages de mener de longues réflexions.<br /></p>
<p>Afin d'économiser leurs forces et d'accélérer les tours de jeu, les meneurs utilisent en général quelques astuces :<br /></p>
<h3>Initiative changeante</h3>
<p>Uniquement applicable dans les jeux "à initiative", cette technique consiste, au prix d'une petite perte de temps commune au début de chaque tour de jeu, à faire relancer l'initiative à la totalité des personnages.<br /></p>
<p>Ceci mitige les bons comme les mauvais jets d'initiative, et rend les successions d'actions plus dynamiques que le jeu de l'oie où chacun sait précisément quand il va agir.<br /></p>
<p>L'inconvénient de cette astuce est qu'elle contraint le meneur à se remémorer un ordre de jeu différent à chaque tour de jeu - ce qui peut être déstabilisant et constitue encore une perte d'énergie.<br /></p>
<h3>Compte à rebours</h3>
<p>La deuxième astuce qui se prête très bien aux scènes d'action consiste à donner un temps extrêmement limité au joueur pour faire parler ou agir son personnage.<br /></p>
<p>Quand le tour vient de passer au joueur, le meneur de jeu lui explique la situation en quelques secondes, et compte à rebours en montrant sa main au joueur et en repliant ses doigts. Si le joueur n'est pas parvenu à faire parler ni agir son personnage de manière cohérente avant que le dernier doigt ne soit replié, le personnage aura perdu son tour, paralysé par l'indécision.<br />
Le meneur passe alors immédiatement au joueur suivant.<br /></p>
<p>Certains joueurs pourraient protester contre le fait qu'ils se sont mis à parler au moment où le meneur repliait son dernier doigt et passait au joueur suivant.
C'est l'occasion pour le meneur d'augmenter encore la pression, en prenant en compte cette action, mais en précisant la chose suivante : "<em>J'accepte exceptionnellement que tu agisses sur le fil, mais ce n'est pas juste pour les autres qui n'auront plus cette chance du reste de la partie. C'est donc la première et dernière fois que j'accepte une telle action.</em>"<br /></p>
<p>L'inconvénient majeur du compte à rebours est qu'il ne se prête que peu à des scènes de dialogue ou d'enquête - il est conçu pour des scènes dans lesquelles se produisent une succession rapide d'événements et actions.<br /></p>
<h3>Conséquences différées</h3>
<p>Une troisième astuce, qui se prête aussi bien aux scènes d'action qu'aux scènes un peu plus calmes, consiste pour le meneur à différer sa description des conséquences des paroles et gestes des personnages des joueurs jusqu'au tour suivant de chaque joueur.<br />
Certes, les dés ont été lancés, le résultat chiffré de l'action est connu par le meneur et par le joueur, mais la narration s'est arrêtée avant.<br />
A chaque fois qu'il revient vers un joueur, c'est seulement à ce moment-là que le meneur précise les conséquences de l'action précédente du joueur.<br /></p>
<p>Cette technique a deux avantages non négligeables :<br /></p>
<ol>
<li>Elle rallonge légèrement la durée de l'état actif du joueur et aide à le maintenir réactif. Ne connaissant pas immédiatement les conséquences des actes de son personnage, le joueur est laissé dans un état de "<em>cliffhanger</em>" à chaque tour de jeu et est contraint de se projeter dans son action suivante selon les conséquences qu'il anticipe en parallèle de la gestion des joueurs suivants par le meneur de jeu. Conséquence supplémentaire : le joueur jouera probablement plus rapidement au prochain tour.<br /></li>
<li>Elle laisse au meneur un peu plus de temps pour réfléchir aux conséquences des actions de chaque personnage avant de revenir vers son joueur.<br /></li>
</ol>
<p>Inconvénients de cette astuce :</p>
<ol>
<li>Celle-ci contraint le meneur à un effort de mémoire pour se souvenir précisément des actes de chaque personnage à chaque tour ;<br /></li>
<li>En outre, les joueurs très concentrés sur l'issue de leur action précédente et occupés à anticiper leurs prochaines actions peuvent parfois négliger d'écouter ce qui se passe autour de la table et commettre des erreurs.<br /></li>
</ol>
<p>L'axe d'accélération des tours de jeu, qui est la solution la plus logique pour maintenir les joueurs dans les états Actif et Réactif est donc une voie efficace mais :</p>
<ol>
<li>Coûteuse en énergie et en concentration pour le meneur de jeu, et éprouvante pour chaque joueur qui est soumis à une forte tension lorsqu'il devient actif ;<br /></li>
<li>Très difficilement applicable dès que les joueurs sont plus de trois, sauf à ce que le meneur et les joueurs soient en mesure de s'astreindre sur la durée à la discipline que requiert cet axe.<br /></li>
</ol>
<p>Schématiquement, le meneur force tous les joueurs à rester dans la zone "réactive" (en vert) du cycle de parole par l'accélération des échanges, au prix d'une dépense très importante d'énergie. Ainsi, avec 4 joueurs :<br /></p>
<p><a href="https://blog.xyrop.com/public/Gamemastering/Images/3States/3States_stressed.png"><img src="https://blog.xyrop.com/public/Gamemastering/Images/3States/.3States_stressed_m.png" alt="" style="display:table; margin:0 auto;" title="Les trois états et la contrainte de temps" /></a></p>
<p>Il existe une autre voie, complémentaire de l'accélération des tours de jeu, moins coûteuse en termes d'effort pour le meneur de jeu, qui est basée sur une forme de mutualisation des narrations individuelles.<br /></p>
<p>Cette voie utilise une règle bien connue des gens de théâtre : <ins>la règle des trois unités</ins>.<br /></p>
<h2>La règle des trois unités</h2>
<p>En théâtre classique, <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/R%C3%A8gles_du_th%C3%A9%C3%A2tre_classique" hreflang="fr">la règle des trois unités</a> permet de ramasser l'intrigue, de rendre la narration dense et efficace pour que le spectateur demeure intéressé par la pièce.<br /></p>
<p>Pour rappel, les trois unités sont les suivantes :<br /></p>
<ol>
<li>unité de temps</li>
<li>unité de lieu</li>
<li>unité d'action</li>
</ol>
<p>Transposée au jeu de rôle, la règle des trois unités accomplit précisément les mêmes objectifs qu'elle réalise en théâtre, de capter et de maintenir l'attention du joueur-spectateur, avec cependant un assouplissement.<br /></p>
<p>La partie de jeu de rôle a en effet cette particularité que son spectateur appartient à un public captif et bienveillant, qui est en outre également acteur de l'intrigue. Capter son attention et le maintenir dans l'état réactif est donc beaucoup plus facile que pour un public critique et non investi.<br />
Cependant, le joueur à la fois acteur et public attend que ses actes influent sur l'intrigue générale et celle des autres participants, et que les actes des autres participants influent sur l'intrigue de son propre personnage. En clair, il souhaite demeurer réactif, pouvoir agir et intervenir quand bon lui semble dans ce qui arrive aux joueurs "sous le feu des projecteurs".<br />
Il n'apparaît pas praticable d'imposer systématiquement les trois unités en jeu de rôles, deux s'avérant par expérience suffisantes.<br />
Si le meneur de jeu est contraint de se passer de l'une de ces trois unités, alors il lui est indispensable de conserver les deux autres unités entre le joueur actif et les autres joueurs afin de les maintenir dans un état réactif.<br /></p>
<p>Deuxième axe de la gestion des états des joueurs, cette tactique des trois unités ne prive nullement le meneur de jeu de la possibilité d'accélérer les tours de jeu. En revanche, elle lui permet d'économiser ses efforts pour maintenir les joueurs non actifs dans un état réactif.<br /></p>
<h3>Unité de temps</h3>
<p>L'unité de temps dans une partie de jeu de rôles est symbolisée par l'équivalence de l'écoulement du temps pour chaque personnage.<br />
Le temps de jeu est flexible : une succession d'événements rapides prendra plus de temps à narrer et à jouer qu'un seul événement d'une durée plus longue - par exemple, un combat prendra plusieurs tours de jeu, alors qu'un voyage de trois semaines prendra juste une phrase : "<em>Trois semaines plus tard, vous arrivez en vue du port de Saint-Malo</em>".<br />
Faire circuler le temps d'une manière différente pour des personnages-joueurs différents casse la cohérence temporelle entre ceux-ci, et remet en cause l'unité de temps. Si l'un annonce qu'il passe quelques heures à étudier un ouvrage, et que les autres décident qu'ils vont attaquer un convoi dès les prochaines secondes, alors le joueur du personnage plongé dans sa lecture va rester, par la force des choses, inactif pendant toute l'attaque du convoi - et probablement bien après.<br /></p>
<h4>Comment la maintenir ?</h4>
<p>Maintenir l'unité de temps dans l'hypothèse ci-dessus implique pour le meneur de jeu de trouver un expédient afin qu'une succession d'événements se déroule à la même vitesse pour le joueur dont le personnage souhaitait passer du temps à lire un livre.<br />
Dans l'exemple ci-dessus, le meneur de jeu pourra distiller progressivement les informations utiles recueillies par le lecteur, de tour de jeu en tour de jeu. Un meneur habile pourra même glisser dans ces informations des révélations essentielles (et dangereuses) sur le convoi que les autres personnages se préparent à attaquer, voire sont <strong>déjà</strong> en train d'attaquer.<br /></p>
<h3>Unité de lieu</h3>
<p>L'unité de lieu est peut-être l'unité la plus facile à appréhender, puisqu'elle est directement liée à l'une des hantises des meneurs de jeu : la séparation des personnages-joueurs en plusieurs groupes, ce qui multiplie les points de vue et les descriptions contextuelles, et diminue d'autant les temps effectifs de jeu des uns et des autres.<br />
Dans l'exemple plus haut, le personnage qui souhaite lire un livre ne le fait probablement pas au beau milieu de l'attaque du convoi, mais plus probablement à la bibliothèque. Le lieu d'activité des personnages étant différent (la route pour les uns, la bibliothèque pour l'autre), il n'y a ici pas d'unité de lieu.<br /></p>
<h4>Comment la maintenir ?</h4>
<p>Maintenir l'unité de lieu est aussi simple que de faire en sorte que les personnages ne se séparent pas physiquement en plusieurs groupes, ou, s'ils le font, que cette séparation physique n'empêche pas de les considérer comme dans un même lieu (par exemple un même hôpital bien que les chambres et étages soient différents, ou une même base spatiale, une même ville, etc), afin que l'unité de lieu participe à maintenir les joueurs non actifs dans un état de réactivité, dans la mesure où ils partagent le lieu où se déroule l'action du joueur actif.<br /></p>
<h3>Unité d'action</h3>
<p>Selon la règle de l'unité d'action, tous les événements doivent être liés et nécessaires jusqu'au dénouement de l'intrigue, les actions accessoires devant contribuer à l’action principale.<br />
Transposée au jeu de rôle, cela signifie que toute action d'un personnage-joueur doit avoir - potentiellement - une influence sur la situation immédiate (et donc les actions subséquentes) des autres personnages-joueurs.<br />
Dès lors que le meneur de jeu s'efforce de maintenir l'unité d'action, il maintient les joueurs non-actifs dans un état de réactivité parce que leurs prochaines actions apparaissent conditionnées par les actions des autres personnages-joueurs.<br /></p>
<h4>Comment la maintenir ?</h4>
<p>Maintenir l'unité d'action peut sembler plus complexe à première vue pour un meneur novice, car elle requiert la mise en œuvre de ses facultés d'improvisation et a un impact plus important sur l'intrigue.<br />
De manière pratique, le meneur souhaitant maintenir l'unité d'action doit, pour chaque action entreprise par un joueur, immédiatement imaginer et introduire dans sa narration (immédiatement ou non selon qu'il a recours à l'astuce des "<em>conséquences différées</em>" ou non), une conséquence directe ou indirecte de cette action sur la situation d'un ou plusieurs des autres joueurs.<br />
Ceci force nécessairement chaque joueur à demeurer concentré et attentif aux actes du joueur actif s'il veut continuer d'interagir efficacement avec l'intrigue via son personnage.<br />
Dans l'exemple ci-dessus des informations livresques à propos du convoi attaqué par les autres joueurs, le meneur de jeu pourrait trouver un expédient pour que les personnages se trouvent en contact. Par exemple via un cristal de communication, un téléphone mobile, un Service de Mortification Subite (le texto nécromantique qui s'imprime dans la chair du destinataire) ou autre, permettant au lecteur d'influer directement sur l'action, en bien comme en mal. Le téléphone mobile qui se met à sonner juste avant l'embuscade est un grand classique...<br /></p>
<h3>De quelle unité se passer ? Quelles unités maintenir ?</h3>
<p>La quasi-totalité du temps, <ins>ce sont les joueurs qui vont d'eux-mêmes briser l'une des trois unités</ins>.<br />
Le groupe se sépare ? L'unité de lieu est brisée.<br />
L'un des joueurs décide que son personnage enquête tandis que les autres dorment pendant nuit ? C'est l'unité d'action qui est atteinte.<br />
L'un des joueurs veut faire faire trois mois d'études intensives du haut-syldave à son personnage pendant que les autres joueurs entendent se contenter d'un livret de conversation basique ? C'est l'unité de temps qui est menacée.<br /></p>
<p>La réaction du meneur doit donc être automatique : dès que l'une des trois unités est menacée (ou brisée) par les actions d'un (ou plusieurs) joueur(s), le meneur doit tout mettre en œuvre pour conserver constantes les deux autres unités, quitte à altérer la structure de la narration, afin que les joueurs non actifs soient maintenus à l'état réactif.<br />
S'il n'y parvient pas, et qu'une deuxième des trois unités est menacée (ou brisée), le meneur dispose du délai standard (de 30 secondes en moyenne) pour rétablir au moins deux des trois unités avant que le dernier joueur ne bascule de l'état réactif à l'état inactif.<br />
Dans cette hypothèse, le choix des unités à rétablir appartient en totalité au meneur de jeu.<br /></p>
<p>Cependant, le meneur doit être conscient que chaque perte de l'une des trois unités a le plus souvent une cause narrative dans l'intrigue de la partie. Tant que cette cause n'a pas disparu ou n'a pas évolué suite aux actions des joueurs, il est probable que l'unité brisée ne puisse pas être rétablie ou seulement temporairement. Dans ce cas, le meneur devra passer via d'autres moyens de maintenir la réactivité des joueurs, jusqu'à ce que le nœud narratif soit résolu et lui permette de rétablir au moins deux unités sur les trois.<br />
Il pourra ensuite concentrer ses efforts sur le rétablissement de la troisième unité, mais ce n'est pas nécessaire et les joueurs pourraient ressentir cette cohésion forcée comme une limitation de leur champ d'action, ce qui n'est pas souhaitable.<br /></p>
<p>Schématiquement, le meneur ne contraint plus les joueurs à rester en zone "réactive" (en vert dans le cycle de parole), mais s'efforce de maintenir deux unités pour les joueurs se trouvant en zone "inactive" (en jaune orangé), Dans l'exemple ci-dessous, l'un des joueurs se retrouve inactif car les deux unités n'ont pas été maintenues pour son personnage pendant plus de 30 secondes :<br /></p>
<p><a href="https://blog.xyrop.com/public/Gamemastering/Images/3States/3States_managed.png"><img src="https://blog.xyrop.com/public/Gamemastering/Images/3States/.3States_managed_m.png" alt="" style="display:table; margin:0 auto;" title="Les trois états gérés via les trois unités" /></a></p>
<h2>Conclusion</h2>
<p>Les outils présentés dans ce billet permettent, au cours d'une partie de jeu de rôle, d'augmenter l'intensité de l'action en maintenant artificiellement les joueurs dans un état de concentration accru. Il faut néanmoins prendre garde à ce que la partie demeure un plaisir et un divertissement, et non une contrainte pour les joueurs.<br />
Pour cela, le plus efficace est de faire des pauses toutes les deux heures, destinées à reposer l'esprit des participants. Le meneur de jeu pourra en profiter pour reposer sa gorge endolorie, pour mettre à jour son <a href="https://blog.xyrop.com/index.php/post/2014/08/29/Strategic-Gamemastering-part-2">Tableau Holistique d'Analyse Conceptuelle et Organisationnelle</a> grâce aux derniers faits et gestes des personnages, et pour anticiper les scènes suivantes dans l'intrigue.<br /></p>https://blog.xyrop.com/post/2016/11/07/%5BTactique-de-ma%C3%AEtrise%5D-Les-trois-%C3%A9tats-du-joueur%2C-et-comment-les-exploiter#comment-formhttps://blog.xyrop.com/feed/atom/comments/65[Aide de jeu] Illustration musicale en JdRurn:md5:876ea1aa3cd01fbf8afbd3ba7190a48d2016-12-12T21:30:00+01:002020-05-10T17:23:58+02:00LudoxAide de jeuconseilsillustration musicaleJdRmaîtrisermeneur de jeuMJmusiqueRPG TheorysonsorisationTactical gamemastering<p>Nombreux sont les meneurs de jeu qui mettent un fond musical sonore dans l'espoir d'ajouter une certaine intensité à l'ambiance de leurs parties. Ils ont raison : la musique peut ajouter énormément à l'atmosphère d'une partie. En effet, le jeu de rôle est un loisir qui se base sur la communication, et la musique a cette force qu'<ins>elle s'adresse directement aux émotions de ceux qui l'écoutent</ins>. Cela signifie qu'un meneur de jeu habile peut se servir de la musique pour émettre directement un message qui sera perçu au niveau <ins>émotionnel</ins> par les joueurs, et non pas au niveau intellectuel abstrait auquel la plupart des échanges en JdR se produisent. Cette illustration musicale devient dès lors partie intégrante de la narration réalisée par le meneur de jeu.<br />
<br />
Cependant, rares sont les meneurs qui parviennent réellement à exploiter efficacement les morceaux qu'ils passent à leurs joueurs.<br />
Voici par conséquent une série d'explications et de conseils éclairant les points sur lesquels un meneur de jeu souhaitant ajouter de la musique à ses parties devrait porter son attention.<br />
La plupart de ces conseils ont d'ores et déjà été distillés au compte-gouttes sur <a href="http://couroberon.com/Salon" hreflang="fr">le forum de la cour d'obéron</a>. Ils sont ici repris, étendus et - je l'espère - enrichis, en un seul et unique article complet.<br /></p> <h2>Sonorisation vs. Illustration musicale</h2>
<p>Avant d'entrer dans le vif du sujet, il importe de poser une différence essentielle entre "sonoriser" et "illustrer musicalement" une partie de jeu de rôle, au niveau terminologique comme au niveau technique.<br /></p>
<p>"Sonoriser" consiste à passer une musique de fond, afin d'avoir un son plus ou moins mélodieux en arrière-plan de la partie. L'objectif du meneur qui "sonorise" est ostensiblement d'augmenter le divertissement des joueurs en intensifiant l'ambiance. A cette fin, le meneur de jeu qui "sonorise" met en pratque un album ou une compilation qui correspondent au thème, en espérant que l'ambiance à la table de jeu s'en trouvera améliorée. Son effort se sera ainsi limité à trouver la musique qui lui semble "coller" au thème. Ains, un tel meneur de jeu choisira habituellement une musique qui correspond à ses goûts et son propre sens de l'esthétique, voire tiré de la bande originale du film dont il est en train de mener le scénario.<br /></p>
<p>En revanche, lorsqu'il aura recours à des accessoires de jeu (cartes, parchemins, objets, costumes, dessin) pour augmenter l'immersion de ses joueurs, ce même meneur "<em>sonorisateur</em>" ne les présentera pas comme des approximations de l'ambiance qu'il veut obtenir, mais comme des éléments illustratifs exacts : c'est <strong>la</strong> carte du bar, c'est <strong>le</strong> parchemin qui vous est remis par le comte, c'est <strong>le</strong> McGuffin / fusil de Tchekov, c'est <strong>précisément l'</strong>uniforme des Stormtroopers qui se tiennent devant vous, voici un <strong>portrait fidèle</strong> de la fille du magnat corporatiste. Ces accessoires de jeu ne sont donc pas des approximations, mais des <ins><strong>illustrations</strong></ins> précises à destination des personnages-joueurs.<br /></p>
<p>Ce meneur traite donc différemment les accessoires de jeu et la musique, cette dernière étant au final plus une manière pour lui de faire apprécier la richesse de sa discothèque et ses goûts esthétiques qu'un outil au service de la partie.<br />
<br />
L<em>'illustration musicale</em> plutôt que la sonorisation se veut répondre à la même préoccupation de précision illustrative que les autres accessoires de jeu.<br />
Pour rappel, la musique véhicule par elle-même des messages émotionnels, et suscite également des émotions chez ses auditeurs. Les émotions véhiculées par la musique et reconnues au niveau intellectuel par les auditeurs viennent renforcer les émotions ressenties naturellement à l'écoute de la musique, et réciproquement (cf. Egermann, McAdams, <ins><a href="http://www.egermann.net/wp-content/uploads/2013/12/Egermann_2013_MP.pdf" hreflang="en">Empathy and emotional contagion as a link between recognized and felt emotions in music listening</a></ins>).<br /></p>
<p>D'autres études de psychologie ont d'ailleurs permis de montrer que les messages émotionnels véhiculés par des morceaux particuliers sont intelligibles par les auditeurs indépendamment de leur maturité ou de leur formation musicale (cf. Swaminathan, Schellenberg, <ins><a href="http://www.utm.utoronto.ca/~w3psygs/SwaminathanSchellenberg2015.pdf" hreflang="en">Current emotion research in music psychology</a></ins>).<br />
<br />
Or, dans le cadre d'une partie de jeu de rôle, les vecteurs quasi-exclusifs de communication utilisés par les participants sont la parole intelligible et l'écrit, qui pour l'essentiel stimulent les capacités de raisonnement des joueurs participants, à l'exclusion de leurs perceptions émotionnelles, qui demeurent alors sous-exploitées. La sonorisation ne visant qu'à poser une ambiance aboutit à cette même insuffisance de stimuli émotionnels. La musique devient un bruit de fond, et non un vecteur de communication utilisé par le meneur de jeu afin de fournir des informations de nature émotionnelle aux personnages-joueurs.<br /></p>
<p>Le but de l'illustration musicale n'est <strong>pas</strong> d'obtenir une approximation d'ambiance, mais d'utiliser la musique comme un outil de précision destiné à illustrer des scènes et l'emploi de la musique dans le cadre de la partie de jeu de rôle doit avoir pour fonction d'évoquer et/ou susciter des émotions chez les joueurs et d'augmenter ainsi leur intérêt pour la partie et leur immersion dans le jeu. C'est tout le sens de cet article, qui a pour ambition de fournir les clés de compréhension de l'utilisation de la musique à titre d'illustration.<br /></p>
<h2>Principes de base</h2>
<p><strong>L'illustration musicale doit être au service de la partie, et pas l'inverse.</strong><br /></p>
<p><strong>Le "service de la partie" est le divertissement des joueurs en tant qu'ils participent à la partie de JdR.</strong><br /></p>
<p><ins>Corollaires de ce principe, les écueils à éviter impérativement</ins> :<br /></p>
<ul>
<li>diffuser des musiques trop bien connues et appréciées des joueurs (ex: le thème d'Indiana Jones). Il est indispensable de s'en abstenir afin d'éviter que les joueurs ne décrochent de la partie pour se concentrer plus sur la musique que sur la partie ("<em>Ah, écoutez, c'est le moment où Indy poursuit les nazis dans le camion !</em>"). C'est divertissant, certes, mais ce n'est plus le divertissement des joueurs en tant qu'ils participent à la partie de JdR ;<br /></li>
<li>gêner la concentration des joueurs. Il est indispensable que l'illustration musicale soit une aide et/ou un support de la narration, et non un obstacle à celle-ci. Si la musique gêne la concentration d'un ou plusieurs joueurs, il faut impérativement l'arrêter ou en diminuer le volume.<br /></li>
</ul>
<p>Il existe <ins>deux grands cas d'illustration musicale</ins> :<br /></p>
<ul>
<li><strong>représenter l'ambiance du lieu</strong> : illustration de la musique perçue par les personnages-joueurs, qui appelle à une immersion immédiate des joueurs dans l'univers de jeu puisque ceux-ci écoutent directement la musique entendue par leurs personnages (par exemple un "ragtime" joué par un pianiste de bar alors que les personnages-joueurs pénètrent dans un <em>speakeasy</em> des années 20). Ce type d'illustration musicale ne véhicule pas nécessairement une émotion particulière ;<br /></li>
<li><strong>véhiculer une atmosphère émotionnelle</strong> : illustration de l'état émotionnel intérieur des personnages-joueurs, qui ne correspond pas à une immersion des joueurs dans l'univers de leurs personnages, mais intervient à un niveau "<em>méta-jeu</em>".<br /></li>
</ul>
<p>L'envie du meneur de jeu de passer telle ou telle musique à tel ou tel moment devrait être totalement indifférente : ce qui importe est que la musique illustre <ins><strong>parfaitement</strong></ins> la scène, ou bien que le le message émotionnel véhiculé par le morceau corresponde <ins><strong>exactement</strong></ins> à l'émotion que veut faire passer le meneur.<br />
Un morceau véhiculant l'émotion souhaitée plus intensément qu'un autre devra en principe être privilégié, même si le meneur préfère le deuxième au premier : ses goûts personnels ne devraient pas entrer en ligne de compte.<br /></p>
<p>En pratique, il vaut mieux s'abstenir de passer un morceau qui ne convient pas parfaitement à ce qui est recherché. Le risque serait, sinon, soit d'affaiblir l'identité musicale du scénario / de la campagne, soit de faire baisser l'impact des illustrations musicales futures, soit de troubler les joueurs, trois écueils à éviter absolument. Par conséquent, et en cas de doute, il vaut mieux maîtriser "<em>seul que mal accompagné</em>" musicalement.<br />
Ainsi, il importe de rappeler que préparer à l'avance une illustration musicale devrait juste être une manière pour le meneur de prévoir non pas les ambiances et scènes qui VONT survenir, mais celles qui RISQUENT de survenir.<br /></p>
<h2>Quand illustrer?</h2>
<p>Il ne serait pas raisonnable pour un meneur de jeu de préparer sa partie en disposant d'illustrations visuelles de toutes les scènes et de tous les PNJ, jusqu'aux plus mineurs, de sa partie de manière exhaustive (mis à part peut-être pour les jeux <a href="http://www.legrog.org/jeux/sketch" hreflang="fr">Sketch!</a> et <a href="http://www.legrog.org/jeux/everway" hreflang="fr">Everway</a> qui sont des exceptions où l'illustration visuelle sont justement des éléments essentiels de la narration voire de la mécanique du jeu), compte tenu notamment de la charge de travail considérable qu'une telle entreprise impliquerait.<br />
Et serait-il vraiment utile d'avoir une illustration de tous les bars, de toutes les rues, de tous les PNJ découverts par les joueurs ? Évidemment non ! La plupart des meneurs se limitent, avec raison, aux seules illustrations "qui comptent" : lieux importants, personnages significatifs, etc.<br /></p>
<p>L'illustration musicale suit le même principe. On n'illustre pas tout, mais uniquement ce qui est important, soit qu'il s'agisse de l'ambiance sonore découverte par les personnages-joueurs, soit que la musique véhicule un message émotionnel à destination des joueurs incarnés dans leur personnage.<br /></p>
<p>Comme l'illustration musicale porte sur ce qui est important, il est tout à fait possible voire souhaitable de laisser des "blancs", des périodes sans musique. En effet, en n'illustrant pas musicalement des scènes, le meneur de jeu laisse le temps aux joueurs de "reposer" leur écoute.<br /></p>
<p>L'illustration musicale ne saurait pas non plus être forcée. Si le meneur a prévu une musique pour une taverne, et que les joueurs n'y vont pas : tant pis, il ne la passera pas !<br /></p>
<p>En outre, si la partie a été illustrée par de la musique presque constamment, alors la mise en oeuvre d'un silence total peut aussi procéder d'un effet : une neutralisation de toute émotion dans la scène. Un meneur de jeu habile pourrait renforcer la crudité d'une scène qu'il veut choquante par l'absence totale de musique et la mise en oeuvre d'un simple bruitage se rapprochant du <em>sound design</em> : un craquement, un cri, un bruit mouillé, etc.<br /></p>
<p>Alternativement, un meneur peut aussi délibérément rechercher la "saturation" de l'oreille de ses joueurs pour créer un effet - mais il devrait s'agir d'un cas rare et très particulier, comme par exemple le bip sonar d'un sous-marin revenant périodiquement au long d'une partie à la "Octobre rouge" - car la répétition d'un morceau ou d'un effet sonore peut aboutir à amoindrir l'effet recherché par l'illustration musicale.<br /></p>
<p>Pour autant, tant que dure la scène à l'origine de l'émotion que le meneur souhaite véhiculer via la musique, il est possible, si le morceau s'y prête, de mettre le morceau en question en boucle jusqu'à la fin de la scène ou jusqu'au prochain changement d'ambiance. Un morceau se prête en général à une diffusion en boucle pendant une scène s'il répond aux conditions alternatives suivantes :<br /></p>
<ul>
<li>le morceau est constant en termes de style, d'ambiance et de volume sonore, permettant de le "boucler".<br /></li>
<li>le meneur de jeu a la possibilité d'arranger, voire de faire un montage/mixage de passages du morceau de manière à ce que celui-ci "boucle" naturellement, et c'est cette boucle qui sera passée.<br /></li>
</ul>
<p>Si l'une ou l'autre de ces conditions ne peut être remplie, alors il est préférable de passer la séquence voulue une seule fois avant de faire un fondu au silence.<br /></p>
<p>A cet effet, beaucoup de musiques de beaucoup de jeux vidéo se prêtent bien au passage en boucle, dans la mesure où elles sont théoriquement conçues pour passer plusieurs fois à la suite sans agacer le joueur.<br /></p>
<h2>Comment illustrer ?</h2>
<p>Au-delà de la nécessité intermittente d'employer des morceaux spécifiques pour illustrer des scènes particulières, il semble important de garder à l'esprit une cohérence thématique dans l'illustration d'une partie/scénario/campagne de JdR.<br /></p>
<p>Choisir un morceau de Rhapsody, par exemple "Land of Immortals" pour illustrer une scène d'action, puis choisir l'ouverture du "Carmina Burana" d'Orff pour une scène de combat, puis employer "Black Forest" de l'album Suspiria des Goblin pour une ambiance trouble et nocturne, c'est prendre le risque de ne plus faire que démontrer l'éclectisme de sa discothèque à ses joueurs, sans forcément apporter quelque chose de plus à la partie.<br />
Ces morceaux sont en effet suffisamment différents pour que le changement de style finisse par troubler les joueurs, plutôt que de leur apporter une expérience voulue "immersive" au niveau musical.<br /></p>
<p>Illustrer musicalement la partie / le scénario / la campagne n'est en effet pas exclusif d'un effort de détermination d'une <strong>identité musicale</strong> cohérente pour le scénario ou la campagne, qui présente un certain nombre d'avantages.<br /></p>
<p>Le fait de disposer d'une identité musicale pour le scénario ou la campagne permet en premier lieu d'optimiser l'immersion des personnages-joueurs sur la durée. En créant et en se tenant scrupuleusement aux principes qu'il aura définis en décidant de l'identité musicale de sa campagne, le meneur de jeu aboutira à ce que les joueurs "se reconnaissent" dans l'atmosphère de la partie, et s'immergent plus rapidement dans l'ambiance au niveau émotionnel. Une musique pourrait même servir de "générique de début" à la partie.<br />
En deuxième lieu, si le meneur de jeu a à disposition suffisamment de morceaux correspondant à l'identité musicale qu'il a définie, il peut, sans risquer de se tromper, sélectionner très vite des morceaux et même d'improviser une illustration musicale lorsque cela s'avère nécessaire.<br /></p>
<h4>L'identité musicale d'une œuvre composite</h4>
<p>Pour définir l'identité musicale d'une œuvre, il y a plusieurs méthodes, notamment :<br /></p>
<p>1 - Choisir un(e) mélodie/harmonie/type d'accord/cadence/rythme/jingle reconnaissable entre tous (Bernard Hermann pour la musique de "Psychose" ; Mozart et ses cadences parfaites ; en clef de sol les trois notes (avec un mordant sur la troisième) <em>fa4 ré4 do#5</em> répétées 3 fois, puis <em>fa4 ré4 fa5</em> à l'octave supérieure, puis à nouveau <em>fa4 ré4 do#5</em> avec un tenuto & trille sur la 3e note sont ainsi la signature mélodique de la série "Les Envahisseurs" ) ;<br /></p>
<p>2 - Employer des <ins><a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Leitmotiv" hreflang="fr">leitmotivs</a></ins> ;<br /></p>
<p>3 - Choisir une orchestration très particulière et immédiatement reconnaissable (Danny Elfman orchestré par Shirley Walker, par exemple).<br /></p>
<p>Souvent, le meneur de jeu qui prévoit une illustration musicale va mettre en oeuvre un mélange de toutes ces méthodes, dans des proportions variables.<br /></p>
<p>L'identité musicale tient souvent à bien peu de chose. Par exemple, l'identité musicale des films de la trilogie Matrix, telle que crée par Don Davis, est, outre certains leitmotivs (exemple, le thème de la résurrection, les chevauchements de gammes ascendantes concomitants aux défilements de caractères verts, les effets dissonants et métalliques au synthé a chaque apparition d'agent...) caractérisée par deux accords de treizième diminuée, séparés entre eux par une quinte diminuée, se font écho l'un à l'autre, d'un côté stéréophonique à l'autre (des effets de <em>pan/balance</em>, quoi...), avec des effets alternatifs de molto crescendo immédiatement suivis de molto diminuendo.<br /></p>
<p>C'est pas très beau à lire, mais il suffit de faire jouer ces accords par n'importe quels instruments exactement comme décrit ci-dessus, afin d'évoquer immédiatement l'univers des films Matrix, ceci alors même qu'aucune note précise n'a été définie : cette identité musicale est uniquement définie techniquement, par un jeu d'intervalles et d'accords.<br /></p>
<h4>Application du principe d'identité musicale dans l'illustration sonore des parties de JdR</h4>
<p>Il est difficile pour le MJ de définir une identité musicale sachant qu'il va probablement tirer ses extraits sonores et morceaux de sources très disparates. Notamment, il est impossible d'obtenir une cohérence mélodique, à moins de tirer tous les morceaux de la même source (la même BOF, la même symphonie, et avec un peu de chance le même compositeur qui fait des "copier-coller" d'un morceau à l'autre) : cette solution est adéquate pour des scénarii "one-shot", mais ne tient pas la distance, en raison de la probable répétition des pistes sur une longue durée dans le cas de campagnes.<br /></p>
<p>Il faudra nécessairement sur le long terme se résoudre à employer des mélodies différentes. La méthode consiste donc à aller chercher ce qui n'est PAS mélodique, afin de conserver néanmoins une cohérence à l'ensemble des morceaux qui seront utilisés.<br /></p>
<p>En premier lieu, il semble essentiel de s'atteler à l'<strong>orchestration</strong>, et privilégier des formations similaires, et si possible identiques, pour les différents morceaux qui seront utilisés pour illustrer musicalement les scénarii de la campagne. Il est également préférable, au niveau de l'orchestration, de privilégier des formations instrumentales qui "cadrent" avec l'univers choisi. Une musique de synthétiseur sera mieux adaptée à un univers de science-fiction, un air de clarinette jazzy plus appropriée pour une enquête dans les années 30, tandis que les guitares électriques devraient - en principe - être proscrites pour illustrer un univers médiéval qui ne connaît pas encore l'électricité.<br />
Cette règle peut souffrir des exceptions, à condition que ces exceptions servent l'intensité narrative et augmentent l'investissement émotionnel des joueurs : ainsi, un monde médiéval-fantastique ultra-violent et peu réaliste, faisant la part belle à des barbares huilés et des batailles sanglantes, pourrait très bien s'accommoder de musiques relevant du genre du "métal symphonique", voire "métal tout court".<br />
Aussi, la rupture délibérée de la cohérence de l'identité musicale peut accentuer l'émotion suscitée par une rupture brutale des lois fondamentales qui régissent l'univers décrit. Par exemple, une campagne apparemment historique uniquement illustrée par des orchestrations philharmoniques, quand soudain : un morceau au synthétiseur alors que des aliens technologiquement hyper-avancés apparaissent dans le scénario...<br /></p>
<p>En deuxième lieu, les <strong>leitmotivs</strong>. Le leitmotiv est habituellement une mélodie, mais compte tenu de ce que les meneurs de jeu ne sont habituellement pas compositeurs et n'ont pas un orchestre à disposition, le leitmotiv lors de l'illustration musicale sera le plus souvent lié à ce qui ne relève pas de la mélodie : l'orchestration, à la gamme tonale, la présence d'un instrument.<br />
Un leitmotiv devrait ainsi être utilisé lors que les trois conditions suivantes sont <ins>cumulativement</ins> remplies :<br /></p>
<ul>
<li>lorsque le lieu / thème / personnage auquel correspond leitmotiv est sous les feux des projecteurs ;<br /></li>
<li>lorsque la scène est importante pour les personnages-joueurs (qu'elle se rattache directement à l'accomplissement de leurs objectifs, l'exploration de leur historique, ou la mise en oeuvre de leurs facultés) ;<br /></li>
<li>lorsque l'orchestration et le mode du leitmotiv à disposition correspond au message émotionnel que veut véhiculer le meneur de jeu.<br /></li>
</ul>
<p>Ainsi exploités, la répétition des leitmotivs crée artificiellement une cohérence musicale, surtout quand il est difficile de conserver une même orchestration ou une même gamme modale. Le changement d'orchestration ou de mode devient alors signifiant, et non plus obstacle à la cohérence, et permet même l'introduction de nouveaux morceaux répondant aux règles d'orchestration et/ou modales du leitmotiv choisi.<br />
Un leitmotiv peut être quelque chose de très discret, pour influencer inconsciemment les joueurs : par exemple, chaque morceau qui passe lors de la présence d'un certain personnage, quel que soit son style, contient systématiquement des chœurs de femmes et d'enfants, alors qu'il n'y a jamais de choeurs dans aucun des autres morceaux passés quand ce personnage est absent. Le meneur de jeu entend par là suggérer aux personnages-joueurs que ce PNJ est en réalité un archange incarné sur terre, ce qu'ils n'apprendront qu'au bout de 30 parties...<br /></p>
<p>Pour un meneur de jeu ambitieux et désireux de gérer des leitmotiv mélodiques, l'écueil majeur à éviter serait de répéter de manière systématique exactement le même morceau, parce que son utilisation deviendrait trop artificielle et lasserait alors les joueurs.<br />
Les voies les plus pratiques pour utiliser efficacement les leitmotivs mélodiques sont les suivantes :<br /></p>
<ol>
<li>Recourir aux reprises de chansons, qui conservent une mélodie identique avec une orchestration différente. Par exemple, si le meneur de jeu a choisi la chanson "Mad World" comme leitmotiv mélodique pour un personnage, les différentes reprises de cette chanson pourront lui servir à illustrer musicalement les états émotionnels de ce personnage : l'original de Tears for Fears, très rythmé, lui permettra de suggérer la détermination, la reprise de Gary Jules suscitera la mélancolie, des extraits de la reprise par Zonaria pourra être utilisée pour illustrer un coup de folie ou une bagarre, tandis que la reprise de Twenty-One Pilots, minimaliste, pourra évoquer une certaine sérénité ;<br /></li>
<li>Exploiter les variations d'un thème dans les bandes originales de films (ou de jeux vidéo) "à séquelles" et dans les musiques internes de séries télévisées : on y trouve souvent des variations sur les thèmes principaux et secondaires, lorsque le compositeur aura essayé d'éviter le recyclage, ou bien dans le cas fréquent des changements de compositeurs, le suivant essayant de reprendre les thèmes du premier tout en y apposant sa patte (exemple : la bande originale du film <em>Predator</em> par Alan Silvestri et celle du film <em>Predators</em> par John Debney). Ceci aboutit souvent à des mélodies identiques ou similaires mais interprétées dans des orchestrations, styles et modes différents, ce qui est particulièrement utile pour un meneur de jeu souhaitant recourir à un leitmotiv mélodique.<br /></li>
</ol>
<p>Une option intéressante consiste également à laisser les joueurs décider du leitmotiv de leur propre personnage selon les mêmes principes, avec l'aide du meneur de jeu afin de ne pas rompre la cohérence de l'identité musicale de la campagne.<br /></p>
<p>En troisième lieu, le <strong>compositeur</strong> (et s'il y a lieu ses imitateurs et les membres de son école). Nombre de compositeurs ont des habitudes, des idiosyncrasies, des compulsions dans leur manière d'écrire leur musique. D'une œuvre à l'autre, les compositeurs reprennent même certaines de leurs phrases musicales, leurs cadences, leurs accords, et parfois même des mélodies entières.<br />
Pour vous en convaincre, n'hésitez pas à comparer les bandes originales des films "Willow" et "Avatar", toutes deux composées par James Horner, dont certains accords sont parfaitement identiques (mais James Horner est connu pour faire du copier-coller entre ses partitions, ce qui est plutôt pratique). Autre exemple, le "<em>Blood Theme</em>" de la série Dexter, composé par Daniel Licht, apparaît pour la première fois comme "pont" dans la bande originale du segment "<em>the library</em>" du film à sketches "<em>Necronomicon</em>", du même compositeur.<br />
Le choix d'un même compositeur (ou d'une même école / studio de production) apparaît donc comme une manière simple d'assurer une cohérence musicale à l'ensemble des illustrations musicales qui seront exploitées par le meneur, sous réserve que le style du compositeur n'ait pas trop évolué entre les différents morceaux choisis.<br /></p>
<p>En quatrième lieu, le <strong>ton</strong> peut recevoir une certaine attention. Conserver le même mode n'est pas indispensable, étant donné que l'on peut vouloir faire varier l'ambiance selon les scènes à illustrer musicalement. Il est en revanche préférable, dans ce cas, d'essayer de conserver un même ton (ou une harmonie basée sur la dominante) : par exemple, do majeur pour les ambiances heureuses, et do mineur pour les ambiances plus sombres, ce qui reste toujours des gammes de do (et donc sol majeur et mineur pour les mélodies basées sur les accords de la dominante). Idéalement, il serait souhaitable de conserver la même gamme tonale sur tous les morceaux passés. En pratique, à moins de disposer d'un orchestre, la plupart des meneurs devront se passer d'uniformité tonale, d'où l'importance de conserver une cohérence dans l'orchestration.</p>
<p>En cinquième lieu, <strong>tout le reste</strong>. L'harmonie, les cadences, les rythmes, les riffs de guitare, tout élément commun à de nombreux morceaux destinés à l'illustration musicale est un "bon point" supplémentaire pour créer une identité musicale et garder une cohérence sur la longueur.</p>
<h2>Comment choisir les morceaux ?</h2>
<p>Pour un univers de jeu donné, le meneur de jeu est censé travailler en amont le choix de ses morceaux en fonction des émotions qu'il estime qu'il aura à évoquer au cours de ses parties.<br />
Cependant, il est difficile de savoir de manière intuitive ce qui va correspondre exactement à ce dont la campagne/le scénario/la partie a besoin à un instant précis, de sorte qu'au final, le meneur de jeu sera amené à improviser.<br />
Paradoxalement cette improvisation sera plus fluide grâce à une bonne préparation de son "échantillonnage" de morceaux : si l'échantillonnage est large mais respecte des règles de cohérence interne définies par le meneur de jeu, alors ce dernier pourra aisément sélectionner "à la volée" des pistes additionnelles sans risquer de rompre l'identité musicale de sa trame narrative.<br />
Pour sélectionner les morceaux les plus appropriés, il importe de déterminer leurs caractéristiques évocatrices, visant à susciter des réponses physiologiques chez leur auditeur.<br />
A cet effet, l'étude Kawakami, Furukawa, Okanoy "<em><a href="http://icmpc-escom2012.web.auth.gr/sites/default/files/papers/520_Proc.pdf" hreflang="en">Musical emotions: perceived emotion and felt emotion in relation to musical structures</a></em>" met en évidence la relation entre d'une part les structures musicales et les émotions perçues et ressenties. Pour approfondir cette approche, l'étude de Gomez et Danuser "<em><a href="http://www.cs.tufts.edu/~jacob/250hcm/gomez.pdf" hreflang="en">Relationships between musical structure and psychophysiological measures of emotion</a></em>" fournit de précieuses informations sur le degré d'impact des différents paramètres musicaux sur les auditeurs, qui varie en outre selon la coloration émotionnelle positive ou négative du morceau.<br />
L'étude de Gomez et Danuser utilise le modèle Excitation (intensité de l'émotion ressentie) / Valence (qualité intrinsèque plaisante ou déplaisante de l'émotion). Ce modèle de qualification des stimuli émotionnels est certes contesté par certains chercheurs, mais suffisamment fidèle aux ressentis de la plupart des individus pour permettre une exploitation efficace dans le cadre de l'illustration musicale des parties de jeu de rôle.<br />
La traduction psychophysiologique de différentes structures musicales est présentée ci-après afin d'éclairer les choix potentiels de morceaux pour illustrer des scènes.<br /></p>
<h3>Mode</h3>
<p>Dans le cas d'un mode mineur, l'ambiance émotionnelle du morceau sera sombre/tendue, évoquant des émotions telles que peur, tristesse, mélancolie, rage, etc.<br />
Dans le cas d'un mode majeur, le message émotionnel du morceau sera au contraire lumineux/optimiste, évoquant des émotions comme la joie, le sentiment de triomphe, la fierté, la sérénité, etc.<br />
Il y a certes des méthodes musicales pour déterminer la gamme modale à partir des principaux accords du morceau, mais plutôt que d'entrer dans les arcanes du solfège, une petite "règle de pouce" :<br /></p>
<ul>
<li>Quand la musique semble "sombre" (exemple : le thème de Batman par Danny Elfman), ou empreinte d'une certaine mélancolie sous-jacente, avec une tension, alors elle est probablement en mode mineur ;<br /></li>
<li>Quand la musique n'est pas sombre, qu'elle est vive, solaire, optimiste, flamboyante, souvent dans le genre pompier : c'est probablement un morceau en mode majeur (exemple : le thème de Superman par John Williams).<br /></li>
</ul>
<p>Le mode majeur ou mineur a non seulement un impact déterminant sur l'émotion (positive ou négative) véhiculée, mais de surcroît <ins>altère la signification et l'impact pour l'auditeur d'autres structures musicales</ins> telles qu'une gamme ascendante ou descendante ou encore une accentuation (<em>marcato</em>) des notes jouées par les instrumentistes. Ainsi, l'accentuation (ou l'absence d'accentuation) des notes n'a rigoureusement aucun effet sur la nature positive ou négative de l'émotion véhiculée par le morceau, mais a un impact sur l'<ins>intensité</ins> de cette émotion.<br /></p>
<h3>Mélodie</h3>
<p><strong>Gamme ascendante</strong> : accentue les émotions évoquées par le mode majeur.</p>
<p><strong>Gamme descendante</strong> : accentue les émotions évoquées par le mode mineur.</p>
<p><strong>Répétition d'un fragment mélodique</strong> : attente, expectative. Si la répétition du fragment est accompagnée d'une densification progressive du spectre musical (nouveaux instruments, complexification du contrepoint) et/ou d'un raccourcissement progressif du fragment et/ou d'une augmentation du volume sonore (avec éventuellement l'apparition d'unisons aux octaves supérieures), le morceau fait lors passer une <ins>sensation d'imminence</ins> d'un événement. Un exemple de morceau visant à susciter cette émotion serait "<em>Clarence frags Bob</em>" (bande originale du film Robocop composée par le regretté Basil Poledouris).<br /></p>
<p><strong>Mélodie dont toutes les notes sont séparées par des intervalles de seconde</strong> : platitude, ennui. Un certain nombre de chants monodiques (plain-chant) entre le Ve et le VIIe siècle présentent cette structure mélodique.</p>
<h3>Tempo</h3>
<p>Plus le tempo de la musique sera rapide, et plus l'excitation émotionnelle (Arousal) sera importante, avec des effets un peu plus plus significatifs pour des émotions dont la valence est désagréable qu'avec des émotions dont la valence est agréable.<br />
Ainsi, un morceau en mode mineur à la gamme descendante aura d'autant plus d'impact que son tempo sera rapide. Il en va de même pour un morceau en mode majeur à la gamme ascendante, mais dans une proportion moindre.<br /></p>
<h3>Intervalles et accords</h3>
<p>Les effets psychophysiologiques des intervalles et accords sont, assez curieusement, transverses aux cultures humaines. Les intervalles (i.e. les notes sont jouées successivement) impliquent une sensation d'évolution entre deux états, tandis que les accords (i.e. les notes sont jouées simultanément) évoquent directement un état. J'indique ici la manière dont les intervalles et accords sont généralement perçus.<br /></p>
<p><strong>Intervalles de seconde augmentée dans chaque tétracorde de l'octave</strong> : ambiance orientale. Si en outre la gamme est essentiellement pentatonique (c'est-à-dire que la gamme ne comporte que 5 tons : par exemple "do, ré, mi, sol la"), alors l'ambiance sera extrême-orientale.</p>
<h4>Intervalles à valence positive.</h4>
<p>Les intervalles et accords présentant une valence positive sont consonants. La nature de l'émotion positive suscitée dépend directement de l'intervalle consonant en question.<br /></p>
<p><strong>Tierce majeure</strong> : joie, victoire, fierté.<br /></p>
<p><strong>Quarte juste</strong> : solidité, puissance.<br /></p>
<p><strong>Quinte juste</strong> : perfection.<br /></p>
<p>Tierce majeure, quarte juste et quinte juste sont les intervalles principaux du thème de Superman composé par John Williams, ce qui, évidemment, n'est pas un hasard.<br /></p>
<p><strong>Sixte majeure</strong> : clarté, élévation.<br /></p>
<p><strong>Octave (unison)</strong> : harmonie, absolu, transcendance (pensez au "Alleluia" de Haendel).<br /></p>
<h4>Intervalles à valence négative</h4>
<p>La plupart sont des dissonances. La nature de l'émotion négative suscitée par la dissonance dépend en revanche des autres caractéristiques de la musique dans laquelle cet accord dissonant s'intègre.<br /></p>
<p><strong>Seconde diminuée</strong> : angoisse, tourment, mélancolie. Les premières notes des "Dents de la mer" de John Williams vous rappelleront à quel point une mélodie présentant des intervalles de seconde diminuée peut susciter l'angoisse. Dans le cas d'un accord, la seconde diminuée est dissonante car les notes ne sont séparées que d'un demi-ton, et crée une forme de battement / ondulation.<br /></p>
<p><strong>Loups</strong> : un loup est une ondulation perceptible et désagréable, résultant d'un écart très faible entre deux notes jouées simultanément - encore plus faible que l'intervalle de seconde diminuée. Il donne immédiatement une impression de fausseté, d'inexactitude. Rares sont les compositeurs qui en usent à des fins psychophysiologiques, mais on peut citer en exemple Joseph LoDuca, qui les exploite dans la bande originale du film Evil Dead pour augmenter l'étrangeté des séquences de possessions démoniaques.<br /></p>
<p><strong>Triton (quarte augmentée ou quinte diminuée "du Diable")</strong> : l'<a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Triton_(musique)" hreflang="fr">article de wikipedia</a> est très bien fait et explicite. Il s'agit d'un intervalle faisant exactement trois tons. Il n'est pas désagréable à proprement parler, mais semble "dur" à l'oreille.<br /></p>
<p><strong>Septième augmentée</strong> : l'accord de septième augmentée est un accord entre la note tonique de la gamme et la note sensible - souvent altérée par un dièse. L'intervalle et l'accord de septième augmentée suscitent immédiatement une tension importante en raison de l'écart des notes.<br /></p>
<p><strong>Intervalles plus grands</strong> : les intervalles séparés de plusieurs octaves, en l'absence de notes intermédiaires, créent un "vide" dans le spectre musical, et suscitent une tension, laquelle est directement proportionnelle au "vide" dans le spectre musical. Les compositeurs de musiques de films usent (voire abusent) de cet effet, en posant une basse très grave et en superposant une mélodie mineure et légèrement dissonante plus aiguë de quatre voire cinq octaves - le meilleur exemple doit en être le thème de Halloween composé par John Carpenter.<br /></p>
<p>C'est ici qu'il importe de préciser les effets du <strong>spectre musical</strong>. <em>Plein</em>, c'est-à-dire avec une orchestration constituée de multiples instruments aux tessitures complémentaires permettant d'éviter des intervalles trop importants entre des accords "chevauchant" plusieurs instruments, il aura tendance à véhiculer des émotions compatibles avec des scènes diurnes, l'évidence. <em>Minimaliste</em>, c'est-à-dire avec une orchestration comportant peu d'instruments dont les tessitures sont éloignées les unes des autres sur la gamme, le morceau aura plutôt une tendance à véhiculer une impression de scène nocturne, de discrétion.<br /></p>
<h3>Le cas particulier du volume sonore</h3>
<p>Le volume sonore a pour principal effet de faire varier l'intensité de l'émotion ressentie. Plus le volume sonore est important, plus l'intensité de l'émotion est forte.<br />
Cependant, dans le cadre d'une partie de jeu de rôle, à la différence d'un concert ou d'un opéra, la musique n'est pas le vecteur unique, ni même le vecteur principal de la narration. Il est donc essentiel pour le meneur de jeu de rester vigilant afin d'empêcher que la musique ne couvre ou ne trouble les échanges entre les participants à la partie.<br />
En outre, le meneur peut avoir besoin de diffuser une musique avec un certain volume sonore, surtout dans le cas où ce volume est la principale caractéristique qui donnera de l'intensité à la scène que le morceau a vocation à illustrer - mais cette situation peut aboutir à faire passer la musique avant la narration, et il n'est jamais exclu que la réaction spontanée d'un joueur (l'incertitude permanente des jeux de rôle) ne gâche l'effet voulu.<br /></p>
<p>Dans cette hypothèse, il est préférable pour le meneur de travailler l'articulation entre la narration et l'illustration musicale, en préparant par avance les morceaux qui seront joués et le texte qui sera dit par le meneur.<br /></p>
<h2>Articuler narration et illustration musicale</h2>
<p>Articuler narration et illustration musicale requiert avant tout de minuter précisément les structures musicales des morceaux envisagés. Ce minutage est <del>nécessaire</del> indispensable afin de savoir de combien de temps réel de jeu le meneur et les joueurs disposent avant le prochain changement de structure musicale modifiant sa valence, son excitation, ou encore la nature de l'émotion suscitée.<br /></p>
<p>A titre d'illustration (musicale, hu hu hu), prenons <a href="https://www.youtube.com/watch?v=lLjwkamp3lI" hreflang="en">le deuxième mouvement de la <em>Symphonie n°94 en sol majeur dite "la Surprise"</em> de Joseph Haydn</a>. Au début de ce mouvement, qui a donné son nom à la symphonie (après 33 secondes dans l'interprétation dont le lien est fourni), la deuxième exposition de la mélodie principale donne lieu à un accord fortissimo propre à réveiller tout auditeur endormi, et qui peut avantageusement constituer l'illustration musicale d'un coup de théâtre soudain et stupéfiant.<br />
Pour utiliser efficacement ce morceau dans une narration, le meneur doit "caler" ses descriptions et éventuels échanges avec les joueurs afin d'éviter que celles-ci ne soient interrompues au mauvais moment par la survenance de cet accord : il sait que précisément 33 secondes après le début du morceau, les joueurs vont ressentir de la surprise.<br /></p>
<p>Autre exemple plus moderne, "<em>Careful with that axe, Eugene</em>" des Pink Floyd, met en place pendant plusieurs minutes une ambiance tendue (à cause de l'intervalle important entre basse et mélodie, spectre large peu comblé par les autres instruments) et languissante (des accords au rythme binaire de basse séparés d'une octave, soutenant une mélodie plutôt descendante en mode mineur) soudainement brisée par un roulé et un cri déchirant (un peu avant la 5ème minute), qui augmente encore l'excitation à valence négative du morceau.<br />
Ce morceau laisse plus de temps au meneur pour poser ses descriptions avant la survenance du changement de structure qui modifie la valence et/ou l'excitation du morceau et/ou les émotions véhiculées par la musique.<br /></p>
<p>Par conséquent, pour caler sa narration, le meneur de jeu doit avoir préparé son utilisation des morceaux musicaux, en connaissant (soit qu'il ait des fiches, soit qu'il ait une bonne mémoire) chaque changement important de valence, d'excitation, et/ou de nature de l'émotion suscitée - et la nature de ces changements.<br /></p>
<p>S'il parvient à identifier rapidement un morceau qui conviendrait et présenterait les changements de valence / excitation dont il a besoin, le meneur de jeu peut même parvenir à <strong>improviser</strong> l'illustration musicale d'une scène.<br /></p>
<h2>Aspects pratiques</h2>
<p>Mais assez de théorie ! Voyons comment mettre en pratique les informations ci-avant.</p>
<h2>Sources musicales</h2>
<p>Premier travail du meneur de jeu, sélectionner les sources musicales de ses illustrations, pour trouver celles qui correspondent aux émotions qu'il souhaite véhiculer. Évidemment, tout est possible, mais voici les différents avantages et inconvénients de certaines sources musicales.</p>
<h3>Musiques de compositeurs divers et variés (modernes ou non)</h3>
<p>Avantages : Évocatrices, de notoriété variable (certaines sont assez réussies et pourtant bien obscures, ce qui permet d'éviter l'effet de reconnaissance par un joueur), elles sont également la base de l'inspiration pour d'autres musiques de films. Tiens, par curiosité, n'hésitez pas à comparer "<em>Uranus, the Magician</em>" du compositeur Gustav Holst avec le morceau de John Willliams qui illustre l'abordage de la corvette corellienne par le Star Destroyer impérial au début du film "La Guerre des Étoiles".<br /></p>
<p>Inconvénients : Ces musiques sont la plupart du temps des morceaux qui contiennent leur propre narration, et sont donc peu propices à l'accompagnement. Les plus réussis de ces morceaux seront probablement connus des joueurs, sans compter qu'il peut toujours se trouver dans un groupe de joueurs un mélomane pour lequel Holst, Wagner et Mahler (ou bien Daft Punk, Mitch Murder et Betamaxx) n'ont pas de secret.<br /></p>
<h3>Chansons</h3>
<p>Avantages : habituellement relativement constantes dans leurs valence & excitation, c'est probablement le seul avantage en termes de transmission d'émotions qu'on peut leur trouver.<br /></p>
<p>Inconvénients : si l'on met de côté leur notoriété, à moins de tomber sur une version purement instrumentale, les chansons sont des musiques qui accompagnent déjà la narration constituée des vocalises du chanteur. Utiliser une chanson revient donc faire parler (en chant) quelqu'un d'autre pendant que le meneur et les joueurs parlent eux-mêmes, ce qui est contre-productif et contradictoire avec l'objectif de véhiculer une émotion.<br />
Cet inconvénient est nettement diminué lorsque la langue du chanteur est inconnue des joueurs.<br />
Échapper totalement à cet inconvénient est possible :<br /></p>
<ul>
<li>lorsque la chanson est précisément celle écoutée à ce moment dans l'univers de jeu par les personnages. Dans cette hypothèse, elle n'est pas utilisée pour véhiculer une émotion ;<br /></li>
<li>lorsque la chanson sert de "générique" à une partie à la manière d'une "série télévisée".<br /></li>
</ul>
<h3>Musiques de films et séries télévisées</h3>
<p>Avantages : Les musiques de films et séries télévisées sont particulièrement évocatrices, et ont d'ores et déjà été conçues pour l'accompagnement d'une narration. Pas étonnant dans ces conditions que de très nombreux meneurs de jeu privilégient fortement ces sources musicales pour l'illustration de leurs parties de jeu de rôle.<br /></p>
<p>Inconvénients : Les musiques de films et séries ont un défaut principal qui découle précisément de leur principale qualité. Celles-ci sont en effet d'ores et déjà conçues pour l'accompagnement d'une narration, mais cette narration est préexistante : ce sont les événements du film, de la série. Ce qui va se dérouler au cours de la partie de jeu de rôle ne correspondra donc pas nécessairement aux changements de valence et d'excitation du morceau utilisé pour illustrer musicalement la partie.<br />
Autre inconvénient, les musiques de films et séries sont souvent aussi célèbres que les œuvres vidéographiques dont elles sont extraites. Pour éviter que les joueurs ne reconnaissent une musique tirée d'une telle source, le meneur de jeu devra se débrouiller pour trouver des bandes originales de qualité provenant d’œuvres méconnues par ses joueurs. Or les films et séries méconnus le sont souvent pour de bonnes raisons (médiocrité ou manque de budget, les deux pouvant aller de pair) et leurs bandes originales sont pour ces raisons plus difficiles à trouver.<br /></p>
<h3>Musiques de jeux vidéo</h3>
<p>Avantages : les musiques de jeu vidéo ont parcouru énormément de chemin depuis l'époque de <em>pong</em> et ses effets sonores d'ondes en dents de scie ou les ritournelles en 8-bit. Les grosses productions de studios s'inspirent des orchestrations du cinéma, tandis que les applications de jeux mobiles un peu évoluées présentent parfois des musiques étonnantes de qualité.<br />
Deuxième avantage, et non des moindres : quand elles n'ont pas vocation à illustrer une cinématique, la plupart des musiques de jeu vidéo "bouclent" sans changement notable de valence / excitation / émotion. Cela signifie que leur durée n'est pas un problème si la scène avec les personnages joueurs dure plus longtemps que prévu, et le meneur peut les "laisser tourner" tant qu'il a besoin de véhiculer l'émotion qu'elles suscitent.</p>
<p>Inconvénients : les musiques de jeu de qualité demeurent encore l'exception plutôt que la règle, et les plus réussies deviennent vite notoires et surexploitées. Compte tenu de ce qu'il l'aura entendu de nombreuses fois, un joueur de jeu vidéo reconnaîtra très facilement une musique venant d'un jeu auquel il a joué. Enfin, comme ces musiques "bouclent", la tentation sera grande pour le meneur de jeu de choisir la voie de la facilité et de se mettre à "sonoriser" plutôt qu'"illustrer musicalement".</p>
<h3>Musiques sur Internet</h3>
<p>On trouve maintenant de nombreuses sources dédiées à l'écoute de musique sur Internet. Je ne mentionnerai pas Youtube, Deezer ou Spotify qui reprennent des catalogues de musiques appartenant aux catégories précitées.</p>
<p>Parlons donc de :</p>
<h4>Tabletopaudio.com</h4>
<p>Avantages : ces musiques sont non seulement conçues pour l'accompagnement, mais en outre spécifiquement pour l'accompagnement de parties de jeux de rôle, avec un classement thématique très utile. La plupart des musiques proposées, qui "collent" assez bien à leur classement thématique, ont en outre l'avantage de boucler. Le "soundpad" proposé par le site web permet également de bruiter les parties et de faire du sound design en temps réel (sous réserve d'avoir pris le temps d'écouter le caractère approprié des bruitages). Enfin, les musiques ne présentent pas de notoriété particulière.<br /></p>
<p>Inconvénients : le nombre limité de musiques disponibles, qui sont d'un mérite esthétique variable, et qui ne peuvent pas être utilisées sans connexion Internet. Comme celles-ci bouclent, attention à ne pas céder à la tentation de les laisser tourner en fond sonore en perdant de vue les objectifs de l'illustration musicale.<br /></p>
<h4>Soundcloud.com</h4>
<p>Avantages : le nombre de musiques disponibles sur Soundcloud est très important, et surtout nombre d'utilisateurs mettent des "tags" sur les musiques appropriées pour l'illustration de parties de jeu de rôle, à titre d'exemples : les tags "<em>roll20</em>" et "<em>soundscape vision</em>". Vous pouvez ainsi préparer des playlists thématiques en piochant dans les morceaux mis à disposition par les autres utilisateurs.<br />
Avantage très intéressant de soundcloud, la visualisation de l'avancement de la lecture des morceaux sous forme d'ondes, qui permet d'anticiper <ins>visuellement</ins> les changements de structure musicale et "surprises" à la Haydn.<br /></p>
<p>Inconvénients : la qualité et l'esthétique des morceaux sur Soundcloud est très variable, le meilleur y côtoie le pire d'une piste à l'autre. En outre, tous les morceaux ne sont pas téléchargeables - ce serait même l'exception - ce qui rend indispensable de demeurer connecté à Internet pour utiliser ce service pendant une partie.<br /></p>
<h4>Les sites de musique libre (par exemple Jamendo.com)</h4>
<p>Avantages : avantage immédiat et le plus évident des musiques libres, c'est leur liberté d'usage. Téléchargeables pour la plupart, ceci rend possible leur emploi dans une partie de jeu de rôle "offline". Le nombre de celles-ci est également tout à fait respectable, ce qui donne du choix aux meneurs de jeu.<br /></p>
<p>Inconvénients : inconvénient majeur de la musique libre, un fréquent manque de qualité esthétique. Ceci est d'autant plus fâcheux que ce sont bien les qualités esthétiques d'une musique qui aident de véhiculer une émotion. Hélas, rares sont les musiques qui se distinguent du lot sur des sites comme Jamendo.com.<br /></p>
<h3>Jouer les pistes</h3>
<p>Après avoir étudié les sources ci-avant et choisi les morceaux qui lui semblent les plus appropriés pour véhiculer ou susciter les émotions qui illustreront les scènes de sa partie, le meneur de jeu doit s'interroger sur la manière pratique de les faire entendre à ses joueurs pendant la partie. Il existe plusieurs solutions, qui ont leurs avantages et leurs inconvénients.<br /></p>
<h4>Sources de diffusion</h4>
<p>Le meneur de jeu dispose de nombreuses possibilités de sources principales pour diffuser la musique qu'il souhaite pendant une partie : l'ordinateur, le téléphone, le baladeur FLAC, la tablette, le flux audio d'une playlist via une enceinte reliée à un service de diffusion, etc.<br /></p>
<p>Toutes ces possibilités sont également valables tant qu'elles permettent une diffusion et un contrôle fluide des musiques. Le meneur de jeu doit trouver la solution qui lui fait perdre le moins de temps possible à chercher la bonne piste ou le bon morceau : pendant qu'il consacre ce temps à la recherche de la piste, il n'est pas en train d'interagir avec les joueurs. Par expérience, l'utilisation d'un lecteur CD portable est curieusement plus rapide que celle d'un lecteur audio digital, car pour le premier, il suffit de mettre le bon cd et d'avoir mémorisé le n° de piste pour tout de suite avoir la musique qui va bien, tandis que le second requiert de prendre le temps de naviguer jusqu'au bon fichier.<br /></p>
<p>L'ordinateur est plus encombrant mais permet d'afficher en même temps de nombreuses pistes (moins de temps perdu à rechercher la bonne), et peut également avoir d'autres utilités pour le meneur indépendamment de la diffusion musicale (prise de notes, etc.).<br /></p>
<p>Une possibilité souvent sous-estimée est celle de réaliser sa propre "<em>soundboard</em>", sa propre table d'échantillons sonores. De nombreuses applications mobiles et sur tablettes proposent à leur utilisateur de créer ses propres tables, en chargeant dans l'application ses propres échantillons sonores, et en préparant des "boutons" tactiles pour déclencher leur diffusion. La plupart de ces applications ne mettent pas de limite à la durée des échantillons, qui peuvent très bien être des morceaux de musique.<br />
En préparant très en amont ses tables de sons, par exemple une par ambiance, le meneur de jeu peut disposer d'un puissant outil qui lui permet, sans cesser d'interagir avec les joueurs, d'appuyer discrètement sur une zone de l'écran tactile et de lancer la musique appropriée. Il n'est donc plus besoin d'aller naviguer dans l'arborescence des dossiers du baladeur ou de l'ordinateur : tout ce dont le meneur a besoin est là, à portée de son doigt.<br /></p>
<p>Les applications de tables de son offrent pour la plupart une possibilité supplémentaire : celle de nommer le bouton tactile indépendamment du fichier de musique qui lui est associé. Or, l'astuce consiste à nommer chaque bouton selon une charte de nommage permettant de connaître la nature de l'émotion véhiculée, la durée du morceau, l'existence d'un changement soudain de valence et/ou d'excitation.<br />
L'auteur de ces lignes utilise ainsi la charte de nommage suivante :<br /></p>
<blockquote><p>
<strong>Mot-clef sur valence</strong> | <strong>Durée totale en secondes</strong> | _ | <strong>Changement</strong> | <strong>Temps en secondes auquel arrive le changement</strong></p></blockquote>
<p>Ainsi, un fichier s'appelant <em>BridgeOut30_Slash18</em> est l'indication, sur la table de sons de l'auteur de ces lignes, qu'il s'agit d'un extrait de 30 secondes issu du morceau "Bridge Out !" de Joseph LoDuca, provenant de la bande originale du film "the Evil Dead". Le <code>_Slash18</code> est une indication de ce qu'à la 18e seconde de cet extrait retentit un accord vif et dissonant, ressemblant aux glissandos rapides qui illustrent les coups de couteau dans le film "Psychose".<br /></p>
<p><img src="https://blog.xyrop.com/public/Gamemastering/Images/Screenshot_2016-12-12-19-51-11.png" alt="" style="display:table; margin:0 auto;" title="Exemple de SoundBoard" /></p>
<p>Évidemment, le morceau initial de Joseph LoDuca ne dure pas que 30 secondes. Cependant, il est nécessaire de le couper via un fondu vers le silence, car après 30 secondes, la structuration de la musique change pour accompagner la narration du film - problème habituel des musiques de film, que le recours à un mixage (par exemple via un outil libre comme <a href="http://audacity.fr/" hreflang="fr">Audacity</a>) permet de pallier.<br /></p>
<p>Dans tous les cas, quelle que soit la source de diffusion choisie, il est essentiel d'anticiper les changements de musique. Au moment où le meneur de jeu diffuse une musique particulière pour illustrer une scène, il est impératif qu'il se projette déjà dans la scène suivante, et qu'il commence à réfléchir si la musique sera nécessaire, et, si oui, à l'émotion qu'il voudra véhiculer et susciter : pour casser le moins possible le rythme de la partie, le choix de la piste musicale suivante devrait être arrêté avant le passage à la scène suivante.<br /></p>
<p>Une fois la source de diffusion choisie, reste la question des moyens de diffuser la musique.<br /></p>
<h4>Moyens de diffusion</h4>
<p>La qualité de diffusion d'une musique a un impact direct sur ses valences et excitation. Mis à part dans rares cas particuliers où par exemple le souffle crachotant d'un 78 tours peut avoir un véritable impact sur l'ambiance d'une scène située dans un passé proche, une bonne qualité d'écoute est nécessaire pour véhiculer et/ou susciter les effets psychophysiologiques voulus par le meneur de jeu.<br /></p>
<p>Les enceintes et hauts-parleurs internes de téléphones et d'ordinateurs portables sont à proscrire : elles émettent une bouillie sans ampleur qui est de plus couverte par les voix des joueurs.<br /></p>
<p>Beaucoup de meneurs favorisent de petites enceintes stéréo. Cependant celles-ci ont un inconvénient majeur : tous les joueurs ne vont pas percevoir également la musique diffusée. Le joueur plus près d'un baffle jouira du (ou sera gêné par le) volume plus important que celui qui en est éloigné.<br />
En outre, la stéréophonie implique que seul le joueur à équidistance des deux enceintes dispose d'une "balance" correcte. L'un bénéficiera du canal de droite, l'autre du canal de gauche, or les joueurs sont toujours répartis autour de la table.<br /></p>
<p>Une solution consisterait à éloigner les enceintes le plus possible de la table et l'une de l'autre, afin de couvrir une large zone, mais encore faut-il que ces enceintes soient suffisamment puissantes, et le son suffisamment clair pour que tout le monde puisse profiter de l'illustration sonore sans être gêné.<br /></p>
<p>Le son spatial d'une chaîne de qualité est nettement préférable, mais hors le coût de ce moyen de diffusion, les problèmes liés à la stéréophonie peuvent encore survenir selon la configuration de la table de jeu / de la pièce. Si les enceintes sont trop proches, l'un entendra surtout le canal des satellites surround, l'autre aura l'oreille collée au haut-parleur gérant le canal gauche.<br /></p>
<p>En fait, à part dans le cas où le meneur de jeu dispose d'une installation de très bonne qualité (et de très grand coût), la stéréophonie & le son spatial empêchent chaque joueur de percevoir également les canaux musicaux, ce qui trouble les effets psychophysiologiques que le meneur de jeu voudra susciter.<br />
De surcroît, une telle installation empêche toute mobilité : le meneur de jeu qui voudra illustrer musicalement devra illustrer musicalement chez lui et nulle part ailleurs.</p>
<p><strong>L'idéal serait de pouvoir distribuer à chaque joueur un son monophonique, rassemblant les canaux de son sans trop de distorsion, et de manière à ce que chacun soit en mesure de percevoir le son à peu près à la même distance.</strong><br /></p>
<p>Les enceintes monophoniques à haut parleur sont revenues à la mode, mais leur qualité est en général insuffisante. La plupart manquent de l'amplitude nécessaire pour susciter les effet psychophysiologiques voulus, sans parler de l'écrêtage, et toutes ont encore une fois le même défaut : selon sa place à la table, plus ou moins éloigné de l'enceinte, chaque joueur ressentira un volume sonore supérieur ou moindre.<br /></p>
<p>Or, des enceintes permettent actuellement de pallier ces insuffisances. Ce sont les enceintes vibrantes, qui transforment la table de jeu elle-même en moyen de diffusion sonore monophonique. Ainsi, chaque joueur jouit d'un son monophonique correct, et tous les joueurs se trouvent équidistants de l'appareil l'émetteur du signal sonore, puisqu'il s'agit de la table de jeu elle-même.<br /></p>
<p>Pour une cinquantaine d'euros environ, soit le prix d'un gros livre de base, l'enceinte vibrante est donc un investissement avisé pour un meneur souhaitant pratiquer l'illustration musicale de ses parties de jeu de rôle.<br /></p>
<h2>Pour aller plus loin :</h2>
<p><a href="http://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC3259101/" hreflang="en">Cognitive and affective judgements of syncopated musical themes (Keller, Schubert)</a></p>
<p><a href="http://www.utm.utoronto.ca/~w3psygs/SwaminathanSchellenberg2015.pdf" hreflang="en">Current emotion research in music psychology (Swaminathan, Schellenberg)</a></p>
<p><a href="http://www.egermann.net/wp-content/uploads/2013/12/Egermann_2013_MP.pdf" hreflang="en">Empathy and emotional contagion as a link between recognized and felt emotions in music listening (Egermann, McAdams)</a></p>
<p><a href="http://icmpc-escom2012.web.auth.gr/sites/default/files/papers/520_Proc.pdf" hreflang="en">Musical emotions: perceived emotion and felt emotion in relation to musical structures (Kawakami, Furukawa, Okanoy)</a></p>
<p><a href="http://www.cs.tufts.edu/~jacob/250hcm/gomez.pdf" hreflang="en">Relationships between musical structure and psychophysiological measures of emotion (Gomez, Danuser)</a></p>
<p><a href="http://www.claudegabriel.be/Acoustique%20chapitre%2011.pdf" hreflang="fr">Support pédagogique "Chapitre 11 : acoustique musicale et gamme(s)" (Claude Gabriel)</a></p>https://blog.xyrop.com/post/Illustration-musicale-en-JdR#comment-formhttps://blog.xyrop.com/feed/atom/comments/66[Octogones 2016] Conférence "Tactiques d'optimisation des parties de jeu de rôle"urn:md5:bac4578faa0927da7bbab7691692b83e2016-10-02T12:00:00+02:002016-12-29T18:37:15+01:00LudoxconseilsCreative agendaGamemasteringJdRJeu de rôlemener une partieMJOctogonesOptimizationSalontactique de maîtrise <p>En annexe de ce billet se trouve le support de présentation de la conférence
"Tactiques d'optimisation des parties de jeu de rôle", présentée à la
convention Octogones le 2 octobre 2016 au Double Mixte, à Lyon, sous le double
parrainage des associations <a href="http://www.legrog.org" hreflang="fr">GROG</a> et <a href="https://forum.opale-roliste.com/" hreflang="fr">Opale</a>.</p>
<p>Bonne lecture, et n'hésitez pas à poser des questions (ou faire toutes
remarques) en commentaires !</p>https://blog.xyrop.com/post/Octogones2016-Optimisation#comment-formhttps://blog.xyrop.com/feed/atom/comments/51[Tactique de maîtrise] Maîtriser des scènes oniriquesurn:md5:86f0e8717df04402a2990ee40735df4d2016-08-05T10:05:00+02:002016-08-05T10:05:00+02:00LudoxAdviceconseilsgamemasteringGamemasteringGMmener une partieMJrêvesTactical gamemasteringtactique de maîtrise<p>Il peut arriver que des meneurs de jeu souhaitent faire interpréter aux
joueurs les rêves de leurs personnages afin de favoriser leur immersion dans
l'univers de jeu ou distiller des indices relatifs à l'intrigue. Introduire une
telle scène onirique dans la narration a aussi un grand intérêt, en ce qu'elle
donne une ambiance surnaturelle sans aucunement violer les lois de la réalité,
puisque ce que semble vivre le personnage n'est qu'un rêve où tout est
possible.</p>
<p>Le présent billet donne une série de conseils et principes directeurs
destinés à optimiser l'impact des scènes oniriques sur les personnages et les
joueurs.</p> <h3>Personnages concernés par la scène</h3>
<p>Une scène onirique ne devrait, en théorie, jamais concerner directement
qu'un seul et unique personnage-joueur à la fois. Ses rêves lui sont
personnels, ce qui exclut normalement toute interaction avec les autres
personnages-joueurs. Une telle interaction peut cependant avoir lieu dans deux
cas :</p>
<ul>
<li>le personnage-joueur n'est pas conscient de rêver, et croit interagir
réellement avec un autre personnage-joueur. Il est dans ce cas possible voire
souhaitable que le joueur incarnant l'autre personnage "joue le jeu" et
interagisse dans le rêve. Si plus tard, à l'état de veille, le rêveur mentionne
à l'autre personnage-joueur leur interaction lors de la séquence onirique, il
faudra préciser à cet autre personnage-joueur qu'il n'a aucun souvenir de cette
prétendue interaction. C'est normal : il n'était tout simplement pas dans
le rêve du personnage-joueur endormi ;</li>
<li>des personnages-joueurs partagent leurs rêves ou leurs visions d'une
manière ou d'une autre, par exemple par magie ou pouvoirs psychiques.</li>
</ul>
<h3>Durée de la scène</h3>
<p>Comme le point focal d'une scène onirique est presque toujours un seul
personnage-joueur, une telle scène ne devrait pas dépasser quelques minutes
tout au plus, afin d'éviter que les autres personnages-joueurs ne décrochent de
l'ambiance ou ne s'ennuient. Au pire, si la séquence devait s'avérer plus
longue pour les versions de la narration, il faudrait trouver un moyen pour que
les autres joueurs puissent jouer dans celle-ci (leur donner à jouer des PNJ
n'appartenant qu'à l'univers onirique par exemple), ou leur permettre
d'intervenir dans les conditions rappelées ci-avant. Une séquence très courte
peut être extrêmement marquante en raison de son dynamisme, et de l'éventuel
sentiment d'impuissance qu'elle peut provoquer chez le joueur.</p>
<h3>Déclenchement de la scène</h3>
<p>Dès que les personnages s'endorment, ils sont susceptibles de rêver. Il
serait cependant pour le moins suspect de demander à un joueur si son
personnage s'endort : Sa méfiance éveillée, le joueur serait capable de
faire veiller son personnage toute la nuit. Quand les personnages-joueurs
indiquent ne rien faire avant le lendemain, il est possible de déduire qu'à un
moment ou à un autre, ils vont s'endormir et être susceptibles de vivre une
situation onirique. De manière générale, il est préférable de ne déclencher une
séquence onirique que quand tous les personnages-joueurs ont laissé entendre,
implicitement ou explicitement, qu'ils s'endormaient. Si les joueurs ont
organisé des tours de garde, c'est normalement l'un des joueurs endormis qui
expérimentera les rêves de son personnage. Cependant, afin d'éviter d'amener la
séquence de manière trop artificielle, ce qui en atténuerait l'impact, rien
n'empêche le meneur de commencer la séquence onirique en "trichant" de la
manière suivante : "<em>Alors que tu fais ton tour de garde et que le feu
de camp dans ton dos projette des ombres vacillantes sur les troncs d'arbres de
la forêt, tu contemples avec étonnement une clairière baignée par le soleil,
rafraîchie par un petit lac dans lequel de jeunes éphèbes nagent et
s'ébattent.</em>"</p>
<h3>Fréquence des scènes oniriques</h3>
<p>Afin de rendre les séquences oniriques intéressantes sur la durée, il est
préférable de ne pas les faire intervenir trop fréquemment, afin que les
personnages-joueurs ne soient pas blasés par ces situations inhabituelles. De
même, il est préférable qu'un seul personnage-joueur expérimente une séquence
onirique par période de sommeil. Aussi, des séquences oniriques occasionnelles
mais sans signification particulière évitent qu'un personnages-joueurs ne se
focalise sur séquence onirique particulière parce qu'il s'agit de la seule
séquence qui ait été jouée depuis un certain temps.</p>
<h3>Abolition des règles</h3>
<p>Les scènes oniriques, en ce qu'elles sont des manifestations des
inconscients respectifs des personnages-joueurs ou de l'influence de pouvoirs
magiques ou psychiques tiers sur ceux-ci, ne nécessitent pas que les règles de
base du jeu soient respectées : tout est possible dans une séquence
onirique, même l'impossible. Le respect apparent des règles du jeu apparaît
alors, dans ce cadre, comme un outil destiné à donner au personnage-joueur
l'impression qu'il est réveillé, ou qu'il dispose d'une marge de manœuvre
réelle, comparable à celle dont il dispose quand il est éveillé.</p>
<h3>Lignes directrices</h3>
<p>Les séquences oniriques peuvent être courtes ou longues, anodines ou
intenses, réalistes ou au contraire fantasmagoriques. Néanmoins, les rêves se
caractérisent la plupart du temps par une ou plusieurs lignes directrices qui
motivent l'action et l'implication du rêveur dans son propre rêve, et en
assurent la cohérence. Par exemple, une personne préoccupée par le fait de
retrouver un objet perdu pourrait faire un rêve dans lequel elle recherche cet
objet à des endroits très improbables à travers le monde, rencontrant des amis
dans des lieux inconnus, observant des créatures imaginaires, mais avec
toujours pour thématique motrice le fait de retrouver l'objet perdu.</p>
<p>Utiliser une telle ligne directrice permet d'assurer une cohérence interne
au rêve, tout en permettant aux événements de la scène onirique de prendre un
tour complètement délirant par ailleurs. Pour plus d'intensité de la séquence
onirique, la ligne directrice devrait porter sur un thème qui tient à cœur au
personnage-joueur rêvant. Ceci permet également de placer une influence ou un
indice éventuel de la partie comme élément de décor du rêve, et de ne pas
attirer artificiellement l'attention du personnage-joueur sur cette influence
ou ce message.</p>
<h3>Ambiance et marge de manœuvre du personnage-joueur</h3>
<p>La marge de manœuvre dont dispose un personnage rêvant est très variable. Il
existe en effet des rêves sur lesquels le rêveur n'exerce pas de contrôle
conscient, et dont il se limite à subir les événements. A l'inverse, certains
rêveurs ont la capacité de prendre des initiatives voire de modifier
consciemment certains détails de leurs rêves.</p>
<p>De la même manière, la marge de manœuvre d'un personnage-joueur rêvant
devrait être variable, plus ou moins importante selon l'ambiance de la séquence
onirique voulue par le meneur de jeu.</p>
<p>Dans le cas où la séquence onirique serait entièrement narrée par le meneur
de jeu, sans interactivité, des joueurs pourraient se sentir frustrés de ne
pouvoir que subir la séquence de manière comparable aux cinématiques des jeux
vidéo. Cette manière de narrer une séquence onirique présente donc le risque de
limiter le ressenti du joueur ou son investissement dans la séquence onirique.
Ce mode de narration de la séquence permet toutefois au meneur de jeu de garder
un contrôle total sur celle-ci et d'en limiter la durée si nécessaire.</p>
<p>Dans le cas d'une séquence où le personnage-joueur dispose d'une large marge
d'action, l'investissement et le ressenti du joueur seront certainement plus
intenses, mais ce mode de narration ralentit la narration, allongeant le temps
d'inactivité des autres joueurs, et peut aboutir à une impasse narrative si le
joueur se comporte de manière à « sortir » du rêve.</p>
<p>Le mélange de ces deux approches permet de faire varier l'ambiance de la
séquence onirique.</p>
<p>Afin d'obtenir un rêve oppressant et intense, il est possible de laisser
d'abord une certaine latitude au personnage-joueur dans la séquence, puis de
resserrer sa marge de manœuvre au fur et à mesure de ses actions dans le rêve,
afin de lui donner l'impression qu'il s'enferre dans une situation dont il ne
peut plus sortir, et/ou qu'il perd le contrôle alors que les scènes
désagréables s'enchaînent à un rythme qui va s'accélérant.</p>
<p>Afin de susciter au contraire un rêve positif, il est souhaitable de
commencer par une narration peu interactive, puis d'augmenter progressivement
le niveau de contrôle du personnage-joueur sur son rêve, améliorant sa marge de
manœuvre et ainsi la gratification qu'il peut tirer du rêve.</p>
<h3>Le basculement dans et hors d'un rêve</h3>
<p>Idéalement, le basculement entre les séquences oniriques et les scènes
réellement vécues par le personnage-joueur ne devrait pas être explicitement
signalé par le meneur de jeu, mais venir de manière naturelle dans la
narration.</p>
<p>En effet, les gens n'ont que rarement conscience de basculer de l'état de
veille à l'état de sommeil. Par suite, il n'est pas nécessaire d'indiquer au
personnage-joueur qu'il rêve, même si le joueur lui-même peut en prendre
conscience, par exemple à cause d'un changement brutal et inexplicable du
décor : Les rêveurs se comportent, dans leurs rêves, d'une manière qui
leur semble naturelle.</p>
<p>Dans cette situation, le rêve pourrait naturellement commencer à l'endroit
où le personnage-joueur s'est endormi, et croit être demeuré éveillé, ou encore
à un endroit où il est normal que le personnage-joueur se trouve peu après son
réveil.</p>
<p>Alternativement, tous les rêves ne brillent pas pas leur cohérence, et il
est également loisible au meneur de jeu de plonger le personnage-joueur dans un
univers onirique particulièrement différent de son quotidien.</p>
<p>Le meneur de jeu peut jouer sur le basculement de l'état de sommeil à l'état
de veille en prétendant que le personnage-joueur « se réveille »,
alors que ce faux réveil est uniquement un élément de son rêve. Le
personnage-joueur qui se croit réveillé alors qu'il ne l'est pas est dans un
état de réceptivité particulière, propice à des descriptions marquantes ou des
effets destinés à provoquer la fascination, la peur ou la surprise.</p>
<p>Ainsi, le "double réveil" : un personnage-joueur a fui, dans son rêve,
un monstre affreux qui le poursuivait. Il se réveille en sursaut, va jusqu'à sa
salle de bains, s'asperge le visage d'eau, prend une serviette pour s'essuyer.
Quand il regarde dans le miroir ou ouvre le placard : "<em>LA CRÉATURE EST
LA !</em>" Le meneur de jeu élève brusquement la voix dans le cadre de sa
description pour surprendre et provoquer le retour brutal d'une tension extrême
chez le personnage-joueur, qui, tout de suite après, se réveille
<ins>vraiment</ins> en sursaut.</p>https://blog.xyrop.com/post/2016/08/05/%5BTactique-de-ma%C3%AEtrise%5D-Scenes-oniriques#comment-formhttps://blog.xyrop.com/feed/atom/comments/45[Tactique de maîtrise] Les descriptions instables (et trop stables)urn:md5:0821fdc9ec2e42cafde95bc4afa1a9b92016-08-02T19:19:00+02:002016-08-02T19:19:00+02:00LudoxAdviceconseilsgamemasteringGamemasteringGMmener une partieMJTactical gamemasteringtactique de maîtrise<p>Les conseils aux meneurs de jeu qu'on peut lire dans des ouvrages récents
tels que Monsterhearts pour ne citer que celui-ci mettent fréquemment l'accent
sur le fait que je meneur de jeu devrait décrire fidèlement l'univers de jeu et
être "honnête". Si ce principe relève d'une saine gestion des capacités
d'action des joueurs, celui-ci peut être remis en cause dans une certaine
mesure par le biais de descriptions instables, trompeuses, aux fins de générer
une sensation d'étrangeté ou de malaise.</p>
<p>Une autre sensation d'étrangeté peut également être suscitée par des
descriptions artificielles et répétitives, qui n'ont pas tout à fait le même
effet.</p> <p>Les descriptions réalisées par le meneur sont le mécanisme principal par
lesquels les personnages-joueurs, et donc par extension les joueurs, vont
percevoir et appréhender l'espace imaginaire partagé, socle de la
narration.</p>
<p>C'est la raison pour laquelle les descriptions réalisées par le meneur de
jeu se doivent en théorie d'être les plus fidèles à la réalité perçue par les
personnages afin que les joueurs disposent de toute latitude pour effectuer des
actions qui s'inscrivent dans la logique de la situation.</p>
<p>Il est cependant possible de remettre en cause ce principe de fidélité des
descriptions afin de faire passer directement aux joueurs une sensation
d'étrangeté ou de malaise de manière implicite, en évitant l'écueil de
l'affirmation explicite et maladroite : "<em>vous ressentez une impression
d'étrangeté</em>".</p>
<p>Les deux techniques visent à susciter une angoisse liée à l'incertitude de
la réalité dans laquelle évoluent les personnages - l'une remettant en cause
les fondements du décor, l'autre faisant paraître ce décor totalement
artificiel.</p>
<h3>Descriptions instables</h3>
<p>L'exemple cinématographique le plus évident de cette technique se trouve
dans <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/%C2%AB_Il_%C2%BB_est_revenu" hreflang="fr">l'adaptation télévisuelle de l’œuvre "Ça", de Stephen King</a>,
où les successions de champs/contre-champs sont l'occasion pour le réalisateur
d'altérer des détails des illusions générées par la créature du film, révélant
ainsi précisément leur nature illusoire.</p>
<p>La tactique de maîtrise des descriptions instables consiste, de manière
incidente à l'action, à modifier les détails de descriptions successives d'un
même élément de décor. Cette technique a un intérêt pour susciter une sensation
d'étrangeté et donner un indice sur le caractère chimérique ou fantasmagorique
de leurs perceptions - ou bien que la réalité de leur univers s'effondre
progressivement. Par exemple, si la description introductive de la scène
mentionne un <em>pont de bois apparemment solide, verni et neuf</em>, et que
les personnages-joueurs s'engagent sur ce pont, la description suivante de
cette action précisera que <em>les vieilles planches vermoulues et usées du
pont grincent et se fendillent sous leurs pas</em>.</p>
<p>Plusieurs cas de figure sont alors possibles :</p>
<ol>
<li>Aucun joueur ne réagit par rapport à cette curieuse évolution du décor, qui
n'a au final aucun impact narratif (le fait que les planches du pont soient
neuves ou vermoulues est sans importance pour la suite de l'action). Cela ne
veut pas obligatoirement dire que l'effet est raté : il n'est pas possible
de savoir ce que les différents joueurs ont perçu. Peut-être que l'écart des
perceptions des personnages-joueurs aura un impact plus tard (ce qui
démultipliera la sensation d'étrangeté) ou peut-être que ceux-ci n'ont pas
voulu réagir à ce qui semble une erreur du meneur de jeu, ou encore peut-être
que le joueur a cru mal comprendre. Cela ne fera que renforcer l'impact de ces
descriptions instables lorsque les joueurs s'apercevront qu'elles ne sont pas
erronées mais correspondent à la réalité des perceptions de leurs personnages.
Si l'évolution n'est vraiment pas détectée, il sera toujours temps de réitérer
la technique au détour d'une autre description ;</li>
</ol>
<ol>
<li>Aucun joueur ne réagit, mais au détour d'une action, l'écart est
détecté : "PJ1 : - <em>J'arrache une des planches vermoulues du pont.
PJ2 : - Hein ? Mais le MJ a dit que le pont était neuf, comment
veux-tu faire cela ?</em> MJ : - <em>Tu parviens à glisser tes mains sous
une planche disjointe et à l'arracher de la structure du pont, le bois usé et
poreux cédant facilement sous tes efforts.</em> PJ2 : - <em>Qu...
Quoi ? M... Mais ?!</em>". Cette situation est peut-être la plus riche car
l'étrangeté de la description aura un impact supérieur sur les joueurs en
raison des enjeux liés à leurs actions.</li>
</ol>
<ol>
<li>Au moins un joueur s'aperçoit de l'évolution de la description, et le
manifeste. L'absence d'enjeu lié à une action particulière diminue l'impact de
cette découverte, mais la découverte spontanée de l'instabilité de leurs
perceptions devrait tout de même les inquiéter.</li>
</ol>
<p>Dans tous les cas demeure la question de la gestion par le meneur de la
situation d'instabilité une fois qu'elle est découverte par les joueurs. Il est
inutile de rester vague, puisque l'instabilité des descriptions est découverte.
Des joueurs pourraient aussi vouloir tirer avantage de l'instabilité pour
augmenter leur pouvoir narratif. Par expérience, l'attitude la plus efficace
pour maintenir la sensation d'étrangeté consiste pour le meneur de jeu à
respecter les deux principes suivants :</p>
<ul>
<li>tout ce qui a été dit a bien été dit par le conteur, y compris en cas de
contradictions successives (sur lesquelles le meneur de jeu se refusera à tout
commentaire) ;</li>
<li>seule la description la plus récente est valable en termes de jeu :
les anciennes descriptions n'ont a priori jamais existé.</li>
</ul>
<p>Un point est à garder à l'esprit : si plusieurs de ces instabilités
descriptives sont réitérées à brève échéance, les joueurs s'en apercevront
nécessairement, car aussi flexible que puisse être l'univers mental qu'ils
construisent par l'intermédiaire des descriptions réalisées par le conteur,
l'accumulation d'incohérences apparentes ne pourra qu'être détecté consciemment
par les joueurs, soulignant trop "l'effet de maîtrise" - ce qui fait sombrer à
nouveau dans l'écueil "démonstratif".</p>
<h3>Descriptions répétitives</h3>
<p>Rappelons-nous un instant le premier film de la trilogie Matrix, et le
déjà-vu du chat. Si cet effet fonctionne dans le film, il n'est pas possible
pour un conteur de mettre directement en œuvre le même effet sans l'amener
artificiellement - et donc attirer spécifiquement l'attention sur la
description de ce phénomène ce qui en atténuerait l'impact par rapport à une
détection "spontanée".</p>
<p>Afin de recréer cet effet dans le cadre d'une narration contée, la tactique
de maîtrise est exactement inverse de celle des descriptions instables. Au lieu
de modifier des détails, le conteur va répéter mot pour mot, intonation pour
intonation, et idéalement geste par geste les détails dont il veut souligner
l'artificialité.</p>
<p>Cela peut aussi passer à travers des dialogues de personnages non-joueurs,
qui vont se comporter de manière si parfaitement prévisible que les joueurs
auront l'impression - exacte ou au contraire erronée - que ceux-ci ne sont pas
"de vrais gens". <a href="http://www.legrog.org/jeux/exquisite-replicas" hreflang="fr">Que ce décor soit véritablement un mensonge ou que cette
impression vienne uniquement des personnages-joueurs</a>, cette tactique de
maîtrise est un outil à ne pas négliger.</p>https://blog.xyrop.com/post/2016/08/02/%5BTactique-de-ma%C3%AEtrise%5D-Descriptions-Instables-Repetitives#comment-formhttps://blog.xyrop.com/feed/atom/comments/21[Tactique de maîtrise] Les descriptions synesthétiquesurn:md5:5af3307903f1b4100c48c0ab229d1a702016-07-25T15:00:00+02:002016-07-25T14:02:58+02:00LudoxAdviceAide de jeuconseilsGamemasteringgamemasteringGMGM ToolsJdRJeu de rôlemener une partieMJOptimizationRPGRPG theoryTactical gamemasteringtactique de maîtrise<p>La mise en œuvre de descriptions captivantes est l'un des piliers d'une
narration réussie. Ce billet explore la manière dont le recours à la
synesthésie peut constituer un outil utile pour raccourcir les descriptions
tout en les faisant s'adresser aux émotions et au ressenti plus qu'à la seule
raison.</p> <p>La plupart des conseils aux conteurs, écrivains ou meneurs de jeu, mettent
l'accent sur l'implication des cinq sens au lieu des deux seuls sens de vue et
de l'ouïe afin d'obtenir des descriptions immersives et captivantes.</p>
<p>Or, certains sens évoquent plus facilement des émotions que d'autres. La vue
et de l'ouïe permettent de percevoir de loin, tandis que les odeurs, le
toucher, le goût, ont tendance à affecter plus directement l'intimité du sujet
de perception.</p>
<p>Ainsi, les parties visuelles et auditives d'une description susciteront
difficilement des réactions émotionnelles, tandis que les parties olfactives,
tactiles et gustatives de cette même description y parviendront plus
facilement.</p>
<p>Le remède habituel à cette difficulté consiste pour le conteur à décrire
également les effets émotionnels des perceptions visuelles et auditives.
Cependant, sauf bien entendu pour les gens de grand talent, capables à la fois
de décrire et de faire avancer l'action, rallonger la description implique de
ralentir l'action.</p>
<p>Le conteur moyen devra nécessairement se contenter, quant à lui, de
pratiquer un arbitrage entre le temps qu'il consacrera à décrire les
perceptions des personnages et le temps qu'il consacrera à narrer l'action,
afin que l'intrigue se poursuive à un rythme acceptable.</p>
<p>C'est là qu'intervient une technique bien utile basée sur la
synesthésie.</p>
<p>D'après <a href="https://fr.m.wikipedia.org/wiki/Synesth%C3%A9sie" hreflang="fr">Wikipedia, la synesthésie</a> (du grec syn, avec, union), et aesthesis,
sensation) est un phénomène neurologique par lequel deux ou plusieurs sens sont
associés.</p>
<p>Utiliser la synesthésie dans une description consiste à affecter à une
description visuelle ou auditive des caractéristiques, adjectifs, aspects,
connotations, dénotations, associés normalement à d'autres sens.</p>
<p>Par exemple, une odeur bleue, une couleur nauséabonde, une voix glissante,
un goût strident. Howard Philips Lovecraft ne fait pas autre chose en décrivant
la voix profonde, vide et gélatineuse de la créature dans sa nouvelle "La
déclaration de Randolph Carter".</p>
<p>Ces juxtapositions synesthétiques, apparemment absurdes, ne peuvent être
interprétées directement par la raison. Elles suscitent directement un ressenti
basé sur la combinaison des connotations associées aux mots employés.</p>
<p>Lorsque la juxtaposition directe n'est pas possible, ou que le temps manque
au conteur pour créer un effet (par exemple s'il souhaite improviser), il
demeure possible de décrire de manière synesthétique en procédant à des
comparaisons.</p>
<p>À titre d'exemple, "les remparts de la cité se dressent dans un désordre
harmonieux comme le chant cristallin d'une myriade d'oiseaux à l'aube".</p>
<p>L'emploi de la synesthésie permet donc au conteur de faire des descriptions
plus synthétiques, plus courtes, et néanmoins de conserver un certain impact en
termes de ressenti émotionnel.</p>
<p>Il n'est pas matériellement possible de présenter les infinies possibilités
du langage et de ces juxtapositions synesthétiques.</p>
<p>Cependant, le meilleur outil pour s'aider à réaliser de telles descriptions
sera probablement le recours à un simple dictionnaire des synonymes.</p>https://blog.xyrop.com/post/2016/03/11/Descriptions-synesthetiques#comment-formhttps://blog.xyrop.com/feed/atom/comments/17[Salon Fantastique 2016] Atelier : Devenir MJurn:md5:339858866a7b4297b8e37ee618ddc0c22016-02-27T17:30:00+01:002016-12-29T18:37:48+01:00LudoxAide de jeuconseilsJdRJeu de rôlemener une partieMJSalontactique de maîtriseÉvénement <p>Bonjour !</p>
<p>Vous trouverez, en annexe du présent billet, les slides pour
l'Atelier : "Devenir MJ", présenté le 27 février 2016 de 17h30 à 19h00 et
le 28 février 2016 de 14h30 à 16h00 sur la Petite Scène du Salon
Fantastique.</p>
<p>Bonne lecture, et si vous en prenez connaissance en même temps : bonne
conférence et bon salon !</p>https://blog.xyrop.com/post/2016/02/27/%5BSalon-Fantastique%5D-Devenir-MJ#comment-formhttps://blog.xyrop.com/feed/atom/comments/27[Salon Fantastique 2016] Conférence : Illustration musicale d'une narrationurn:md5:17c0add430af4425d765a7d2c5cbeaf22016-02-27T13:00:00+01:002016-12-29T18:38:24+01:00LudoxAide de jeuconseilsJdRJeu de rôleMJSalon <p>Bonjour !</p>
<p>Vous trouverez, en annexe du présent billet, les slides de la conférence
"Illustration musicale d'une narration", présentée le 27 février 2016 de 13h à
14h30 sur la Petite Scène du Salon Fantastique.</p>
<p>Bonne lecture, et si vous en prenez connaissance en même temps : bonne
conférence et bon salon !</p>https://blog.xyrop.com/post/2016/02/27/%5BSalon-Fantastique%5D-Illustration-musicale#comment-formhttps://blog.xyrop.com/feed/atom/comments/31[Geekopolis 2015] Slides de l'Atelier / Masterclass "Tuez vos PJ !"urn:md5:6ddc349ba29e13fa75b90900feb988892015-05-30T23:29:00+02:002015-06-06T16:32:46+02:00LudoxAide de jeuGamemasteringGeekopolisGMGRoGJdRMJRPG theory <p>Le 23 mai 2015 s'est déroulé l'Atelier / Masterclass "Tuez vos PJ" présenté
conjointement par les associations <em><a href="http://forum.opale-roliste.com/" hreflang="fr">Opale</a></em>, <em><a href="http://projets-r.org/" hreflang="fr">Projets R</a></em> et le <em><a href="http://legrog.org" hreflang="fr">GRoG</a></em> (j'intervenais pour cette
dernière association). Cet atelier s'est déroulé de manière uniquement orale,
sans support de présentation particulier - mais j'avais de mon côté commencé de
préparer un tel support.<br />
Suite à l'atelier, j'ai mis à jour ce support des points que j'ai présentés en
tant que GRoGuiste, enrichissant les diapositives que vous trouverez ici même
en annexe.<br />
Ce support est évidemment incomplet en ce qu'ils ne reprend que la partie sur
laquelle je suis intervenu, sans les propos tenus et explications claires et
détaillées fournies à cette occasion par Dreyf & Krom des associations
respectives <em>Opale</em> & <em>Projets R</em>, que je salue
cordialement.<br /></p>https://blog.xyrop.com/post/Geekopolis2015-Tuez-vos-PJ#comment-formhttps://blog.xyrop.com/feed/atom/comments/25